Aceh (qui se prononce atché) est le nom de la province indonésienne qui se trouve sur la pointe nord de l’île de Sumatra. Avec ses 2 000 millimètres de précipitations annuelles, il y règne à l’année une chaleur moite supérieure à 30 °C. Dans de pareilles conditions, on pourrait être tenté de croire que la musique de ce groupe acehnais est aussi indolente que, par exemple, le reggae jamaïcain ou la bossa nova carioca. Il n’en est rien. Non seulement celle-ci est-elle du genre plutôt exubérant et enlevé, mais même les pièces qui commencent lentement se mettent invariablement à accélérer le tempo après quelques mesures. Les changements de ton y sont également fréquents.
Keubitbit – qui signifie en indonésien chaleureusement, de tout cœur – est une formation qui existe depuis 2014 et ce Stories of Aceh est en fait une compilation de ses meilleures pièces jusqu’ici. Bien que son instrumentation soit relativement conventionnelle, outre ses deux joueurs des serune kalee et rapa’i – flûte et tambour traditionnels acehnais –, elle comprend piano, synthé, saxo alto, guitare, basse électrique, batterie et à l’occasion des interventions chantées – la musique de Keubitbit est aussi surprenante que difficile à cerner. D’abord par son emploi assez abondant de sonorités électroniques et d’autres associées au jazz fusion surgies tout droit des années 70, mais aussi parce qu’elle rappelle souvent la musique traditionnelle… des Balkans. Sans parler d’éléments plutôt prog. Certaines pièces évoquent même le Brésilien Milton Nascimento. Mais toutes ont en commun d’être joyeuses, avec des solos tout aussi réjouissants, jamais forcenés. Idéales pour affronter les canicules avec tonus et légèreté.