Natif de Chicago, le saxophoniste Idris Ackamoor fait carrière depuis un bon demi-siècle. Après avoir étudié auprès de Cecil Taylor, il a fondé l’ensemble The Pyramids au début des années soixante-dix avant de s’embarquer pour une tournée déterminante en Afrique au cours de laquelle la musique de l’orchestre ainsi que sa configuration se sont transformées. Après la séparation des Pyramids vers la fin de la même décennie, Ackamoor a reformé le groupe à quelques reprises, quand bon lui semblait.
Shaman! est le troisième album des Pyramids que fait paraître l’étiquette britannique Strut après We Be All Africans (2015) et An Angel Fell (2018). On peut donc parler d’un regain d’activité pour Ackamoor qui a repris les choses exactement où il les avait laissées il y a quelques années. Il continue donc de promener sa caravane entre les mêmes dunes et les mêmes courants musicaux : la branche plus spirituelle du mouvement free jazz, les musiques d’Afrique occidentale, le funk, le rock psychédélique, l’ethio-jazz… Les noms de Sun Ra, mais surtout de Pharoah Sanders viennent à l’esprit à l’écoute de l’album.
On ne peut cependant pas accuser notre chamelier cosmique de faire du surplace. La musique que l’on entend sur Shaman! est exécutée avec tellement de ferveur qu’elle est tout sauf en mode pilotage automatique. Ackamoor est un saxophoniste très doué et polyvalent dont le registre s’étend aux envolées free de Sanders au jazz West Coast de Ben Webster et Gerry Mulligan. Les échanges auxquels il prend part avec la flûtiste et la violoniste sont délectables. Les passages récités sont bien sentis et les grooves de la section rythmique et de la guitare électrique sont, quant à eux, irrésistibles. On suggère aux mélomanes qui croient que Kamasi Washington nous propose quelque chose de neuf d’y prêter l’oreille !