Raising Sand, premier album conjoint Plant-Krauss, avait soulevé pas mal de sable en 2007. Voilà que quatorze ans plus tard paraît Raise the Roof, deuxième chapitre des pérégrinations américaniennes du duo. Cet opus soulèvera-t-il le toit des chaumières de musicophiles friands de country-folk-rock-blues-bluegrass? Ça reste à voir. Une chose est sûre : à défaut de faire se mouvoir les solives et autres charpentes, Raise the Roof fera léviter un fort contingent de fans. Alison Krauss, chanteuse-violoniste, cheffe de gare chez Union Station et sœur du remarquable bassiste Viktor (qui joue sur le présent album), mène une plus qu’enviable carrière. Sa voix n’a absolument rien perdu de sa pureté, bien au contraire : elle se déploie, plus que jamais, comme une vapeur argentée par les monts et vaux des Appalaches. Plant, quant à lui, poursuit son existence musicale comme il l’entend, souverain, curieux et toujours en voix, plus de quarante ans après les derniers fracas du Marteau des Dieux.
L’amiral de l’americana T Bone Burnett est à la console et aux guitares, comme pour Raising Sand. D’autres membres de l’équipe ont aussi suivi, dont les hypermusiciens Marc Ribot (guitares) et Jay Bellerose (batterie). Les tout sauf manchots guitaristes David Hidalgo, Buddy Miller et Bill Frisell s’ajoutent à la bande. On a droit à High and Lonesome, un blues-boogie terreux signé Plant et Burnett et à onze reprises sélectionnées avec goût. Ça va de Quattro (World Drifts In) de Joey Burns et John Convertino – alias Calexico – à Somebody Was Watchin’ Over Me de la Texane Brenda Burns, en passant notamment par The Price of Love des Everly Brothers, Trouble With My Lover d’Allen Toussaint, It Don’t Bother Me du légendaire folkie écossais Bert Jansch, Can’t Let Go de Lucinda Williams, You Led Me to the Wrong de l’auteure-compositrice-interprète et banjoïste appalachienne Ola Belle Reed et Going Where the Lonely Go de Dean Holloway et Merle Haggard.
Après quelques écoutes, on fait le constat suivant : la symbiose vocale Plant-Krauss fonctionne aussi bien, sinon plus, qu’en 2007; si l’on conjugue cela à la réalisation puissante et nuancée de T Bone Burnett, au choix irréprochable des pièces et au jeu sensationnel des instrumentistes, on obtient un recueil émouvant. Écoutez Robert Plant chanter « I wanna die » à la fin du deuxième couplet de Go Your Way : si ça ne vous met pas le motton dans le gorgoton, vous êtes fait fort.