« Je sors de la pièce, on va entendre de l’orgue attention – Autre dimension », nous met en garde Claire Pommet dans 22:51, l’intro d’un recueil tout juste paru qui s’intitule Consolation. Quelques notes cristallines suivent, puis c’est Jardin, où Pomme revient sur son enfance. De ces souvenirs nimbés de joies affleurent tout de même quelques violences, qu’accentuent les violons de Zoé Dumais et de Yubin Kim. La présence de ces musiciens québécois n’est pas un hasard, puisque Pomme tisse depuis longtemps des liens serrés avec notre territoire et ses habitants.
On entend donc sur Consolation le boulot des arrangeurs Rose Normandin et Gabriel Desjardins, respectivement aux cordes et aux vents, puis des musiciens Agathe Dupéré, Marianne Houle, Simon Veilleux, Laurie Torres, Renaud Gratton, David Carbonneau, Jérôme Dupuis-Cloutier et Jean-Sébastien Vachon. Sans compter l’ubiquiste Ghyslain Luc Lavigne à l’enregistrement et au mixage, entre autres. Qui plus est, une partie de la création de l’album s’est déroulée dans la forêt lanaudoise, à Saint-Zénon.
Des collègues hexagonaux de renom ont aussi prêté main-forte à Pomme. Flavien Berger a coréalisé l’album avec elle, en plus de lui faire profiter de son don pour la composition électronique (écoutez Bleu pour en avoir une idée), tandis qu’Albin de la Simone a joué du piano sur La rivière. Tout au long de Consolation, Pomme déploie ses talents d’une manière époustouflante de délicatesse et de beauté. Sa voix n’a jamais été aussi juste et pure. Ses textes n’ont jamais été aussi émouvants, notamment son hommage à Nelly Arcan (« J’aurais voulu le soir – Confier tes peines à la nuit – Ou les porter »), sa salutation à son hypertalentueuse collègue Barbara Pravi sur B. et ses constats sur Tombeau (« Tout l’monde va vieillir – Je n’apprends rien à personne – Tu peux tout détruire – Disparaître quand vient l’automne »). Ajoutons à cela cette pop-folk de chambre pleinement maîtrisée que rehaussent de judicieuses touches de mandoline, d’Omnichord, d’échantillonneur et de synthés.
Claire Pommet nous prouve, comme bien d’autres avant elle, que Gainsbourg se gourait et que Guy Béart avait raison : la chanson est un art majeur.