La compositrice, productrice et DJ californienne émerveille avec un projet complètement distinct du reste de son catalogue.
Avec un passé principalement penché sur l’électro, Laurel Halo (Laurel Anne Chartow) a effectué un saut dans le vide en composant un album ambient orchestral aux touches jazz et classiques. Un saut dont l’atterrissage aurait pu faire bien mal. Mais, preuve du contraire, Atlas est un nuage mystifiant d’atmosphère, un océan merveilleux et magique, qui nous demande justement d’y plonger.
Halo, avec ses habiletés de multi-instrumentiste (piano, guitare, vibraphone, voix, électroniques), fait équipe avec Bendik Giske (saxophone), Lucy Railton (violoncelle), James Underwood (violon) et plusieurs autres collaborateurs. Ensemble, ils combinent vagues et courants de l’ambient, du minimalisme, du jazz, et du classique. Le résultat est une composition en apesanteur, d’une beauté délicate. Ce sont dix morceaux qui ne font qu’une expérience continue.
À chaque fois que je me retrouve dans le nuage dérobé d’Atlas, je m’imagine une méduse. L’aspect extraterrestre, la légèreté et l’apparente paix du mouvement ondulatoire de l’animal en font le parfait analogue visuel à la musique. La composition respire, son flux et reflux laissent des impressions vivantes dans l’esprit. Verticalement orientée, elle ne se soucie pas de progresser ou de grandir. Plutôt, elle nage sur place, laissant les courants la transporter. En écoutant, on est très loin sous l’eau, quelque part où la lourde pression et le silence se mêlent à notre subconscient; où les rayons lumineux se comptent sur les doigts d’une main. Ici, la texture est reine, et les mouvements sont subtils. Il suffit de fermer les yeux, et de sentir. L’atmosphère pure imprègne nos poumons. Nous sommes en pleine gestation, dans le phytoplancton des idées, la soupe primitive de l’inspiration. On se sent hors du monde, mais plus près de tout, au milieu de la dérive des énergies.
Cet album, avec si peu de mouvement, réussit à nous emmener loin. Atlas est opaque, enveloppant, mais détaillé jusque dans l’infime. C’est une nappe qui émerveille, qui s’adapte à la profondeur de notre écoute. Il s’agit définitivement d’un de mes projets préférés de l’année. Si vous avez aimé Promises, de Floating Points et Pharoah Sanders, je dirais qu’Atlas en est la version protozoaire, primordiale, vieille d’un milliard d’années. Je vous encourage à y plonger, à l’écouter en entier, pour vous perdre et vous retrouver.