Pour son deuxième album solo en près de quarante ans de carrière, King Buzzo, chanteur et guitariste des teigneux Melvins, a requis les services du bassiste Trevor Dunn, un habitué des expérimentations rock tordues, autant chez John Zorn qu’au sein de Mr Bungle. Cette nouvelle galette n’est pourtant pas la première collaboration entre l’hirsute roi buzzé et le virtuose des quatre cordes puisque ces rockeurs peu orthodoxes font tous deux partie du tonitruant groupe Fantômas et que Dunn a déjà accompagné les Melvins à quelques reprises.
Mental Vomit, le court morceau instrumental qui ouvre l’album nous prévient : même si les deux lascars sont en mode acoustique, la traversée de cet album n’aura rien du beau lac calme, Buzz Ozborne et son acolyte explorent des eaux beaucoup plus troubles. Le duo prend un malin plaisir à brouiller la surface de ses chansons en y lançant des cailloux de bruit pur. Les finales des pièces au programme sont souvent exploratoires, voire carrément noise. Ozborne chante parfois comme s’il était mort de peur, plus souvent comme si c’était lui qui voulait effrayer le monstre. Dunn, quant à lui, apporte une touche jazz au projet avec son jeu free, surtout dans les passages où il a recours à un archet.
La présence de la contrebasse confère à Gift of Sacrifice une profondeur que le premier album en solo de King Buzzo n’avait pas. Delayed Clarity et Bird Animal sont des perles de folk psychédélique qui figurent parmi les meilleures chansons qu’Osborne a créées dans les dernières années, avec ou sans les Melvins. En prime, histoire de nous démontrer qu’il n’a rien perdu de sa goguenardise, il revisite le Shock Me de Kiss, ici rebaptisé Mock She.