Hormis un simple en 2020, on attendait toujours la suite de l’excellent Third Daughter, 2e album paru en 2017, qui l’avait enfin révélé comme une MC innovatrice et versatile, à l’oreille aiguisée pour la musique hors-norme et un talent naturel pour s’y installer.
Établie comme une force incontournable dans le milieu musical de Seattle, elle inspire autant par sa proposition artistique que par sa démarche fièrement indépendante, qui se fait peut-être au détriment d’un rayonnement national mais qui au final insuffle à sa musique une authenticité infeignable qui sait nous atteindre malgré les détours de son oeuvre.
Avec les sept années qui séparent les albums, la continuité s’est évaporée entre les 2 c’est certain mais ce n’est pas non plus un nouveau départ. DoNormaal a raffiné sa livraison mais garde cette même intricalité avec la musique. Musique produite par un seul réalisateur cette fois, Welp Disney, qui a su concocter le cocon parfait pour que la MC s’y love, étirant les limites du hip hop avec ses forceps avant-gardistes et une attitude punk qui sied à merveille à l’univers que veut présenter DoNormaal.
C’est, vous l’aurez compris, plus champ gauche que la norme et ne figurera probablement pas dans les palmarès hip hop de fin d’année. Mais ça a le mérite de pousser le bouchon un peu plus loin et de contrebalancer, dans une certaine mesure, la surabondance de plaignards auto-tunés qui broutent notre oxygène et étouffent notre intérêt. Elle a la maturité et l’expérience de s’adresser à son auditoire en mettant les obstacles nécessaires pour que celui-ci la trouve et personne d’autre. Elle commande dès la première pièce à une certaine écoute et n’en dérogera à aucun moment, une intransigeance qui est pour ceux à qui ça s’adresse une garantie que les détours sont nécessaires pour arriver à point. Une œuvre forte, complexe et texturée, livrée par 2 artistes sans attente sauf pour eux-mêmes, et un plateau sur mesure pour le talent de DoNormaal qui, à défaut d’être sur les mêmes que ses consœurs plus carriéristes, ne l’oblige pas à jouer un jeu qu’elle ne mène pas. Une vraie boss, dans tous les sens.