Les meilleurs albums 2022 selon PAN M 360 (4e partie)

· par Rédaction PAN M 360

Avec la pandĂ©mie qui semble se rĂ©sorber, il s’est créé beaucoup de musique en 2022. Que faire pour trier le bon grain de l’ivraie?

Nous, de PAN M 360, pensons que nous ne sommes pas que des critiques et des journalistes culturels, mais aussi des prescripteurs de musique Ă  une Ă©poque oĂč il est plus compliquĂ© que jamais d’identifier les meilleurs sons en circulation.

Alors ? Voici le 4e et dernier volet de notre Top 100 albums, 4e de 4 parties. Vous remarquerez qu’il n’y a pas de classement dans cette liste, pas d’ordre de style, pas de hiĂ©rarchie de sons, mĂȘme pas d’ordre alphabĂ©tique.

Pourquoi ? Parce que nous pensons sincĂšrement que les mĂ©lomanes n’ont pas besoin de telles structures hiĂ©rarchiques pour qu’ils se fassent leur propre opinion aprĂšs nous avoir fait confiance. Souhaitons donc que vous dĂ©busquerez de l’excellente nouvelle musique Ă  la veille de la nouvelle annĂ©e !

Joe Rainey
Niineta (mai)
37d03d
Pow wow, ambient, électronique, industriel, autochtone
Écoutez ICI
Pour les profanes, le chant pow wow peut sembler simpliste et redondant. Vraiment? Un artiste ojibwe de la Red Lake Nation infirme cette perception avec la sortie de Niineta, album excellent créé en collaboration avec un beatmaker au visage pĂąle et de bonne volontĂ©. Ainsi, le chanteur autochtone Joe Rainey et son collĂšgue blanc Andrew Broder ont oeuvrĂ© entre le Minnesota et le Wisconsin pour ainsi crĂ©er le prolongement parfait du chant traditionnel et de son impulsion rythmique dans un monde oĂč l’harmonisation est souhaitĂ©e, oĂč la musique de chambre instrumentale est nourrie par l’univers textural de la musique Ă©lectronique aux tendances bruitistes et industrielles. Aucune Ă©dulcoration folklorique au programme de cette Ɠuvre marquante, qui fera probablement Ă©cole dans le renouveau culturel autochtone. (Alain Brunet)

Pierre Kwenders
José Louis and the Paradox of Love (avril)
Arts & Crafts
Électro, afrobeats, afro-pop, soul/R&B, soukouss, rumba congolaise, coupĂ©-dĂ©calĂ©
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On ne peut boucler l’annĂ©e 2022 sans souligner la qualitĂ© de cet opus signĂ© Pierre Kwenders (et dont le titre porte son vĂ©ritable prĂ©nom), ce qui lui a valu le prestigieux prix Polaris. Au retour d’une tournĂ©e en Afrique centrale, plus prĂ©cisĂ©ment dans la RĂ©publique dĂ©mocratique du Congo oĂč il est nĂ© et a passĂ© son enfance avant de s’établir Ă  MontrĂ©al, l’artiste a rĂ©ussi la crĂ©ation d’un album synthĂšse de son parcours musical, en solo et au sein du collectif Moonshine, vĂ©ritable bouillon de transculture montrĂ©alaise. Afro-pop, afrobeats, nusoul /R&B, soukouss, rumba congolaise, coupĂ©-dĂ©calĂ© ou variĂ©tĂ© française sont au nombre des rĂ©fĂ©rences dĂ©licatement amalgamĂ©es par l’artiste, le tout Ă©toffĂ© de collaborations internationales – Tendai Maraire, Branko, Win Butler, Michael Brun, Uproot Andy. (Alain Brunet)

Arcadia Quartet
MieczysƂaw Weinberg: String Quartets Nos. 1, 7 & 11 (Vol. 2) (mai)
CHANDOS
Classical, String Quarter
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La musique de Winberg, cet Ă©gal et presque jumeau musical de Chostakovitch, longtemps restĂ©e dans l’ombre de celle de son plus illustre compatriote, prend de plus en plus son envol et affirme son autonomie dans le plus large public, et ce avec raison. La musique de ce Polonais de naissance mais devenu soviĂ©tique aprĂšs l’invasion nazie de son pays en 1939, est Ă©motivement viscĂ©rale, musicalement loquace et discursivement trĂšs communicative, mĂȘme si elle est souvent sombre. Comme celle de Chostakovitch, elle est le tĂ©moin direct de l’ùre soviĂ©tique et de ses Ă©cartĂšlements socio-culturels et artistiques. Elle se veut Ă  la fois savante et populaire, mais Ă©choue plus souvent qu’autrement au devoir d’optimisme qui lui Ă©tait dictĂ©, transformant ce dernier en sarcasme incisif mais totalement lucide Ă  propos de la sociĂ©tĂ© russe de son Ă©poque, soit le 20e siĂšcle. (FrĂ©dĂ©ric Cardin)

Afrorack
The Afrorack (mai)
Hakula Kulala
Électro, afro-electro, techno, acid, trance, ambient
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Concepteur de synthĂ©tiseurs et producteur, l’Ougandais Brian Bamanya, alias Afrorack est derriĂšre le premier synthĂ©tiseur modulaire DIY d’Afrique, soit un mur de modules et d’unitĂ©s FX faits maison qu’il a carrĂ©ment nommĂ© l’Afrorack en en a fait son pseudo. Authentique pionnier du synthĂ© modulaire en Afrique, il a fait Ă©voluer une technologie quasi inexistante auparavant et conçue pour la musique occidentale, il a dĂ©veloppĂ© sa propre mĂ©thodologie et son propre langage musical et adaptĂ© les machines Ă  ses besoins. Sur ces fonds technoĂŻdes, ambient, minimalistes ou acid, il intĂšgre dans ce premier album des rythmes de sa rĂ©gion, l’Afrique de l’Est, et propose ainsi des ambiances inĂ©dites avec ces outils de plus en plus utilisĂ©s sur ce continent. Cette dĂ©marche Ă  elle seule vaut la peine d’ĂȘtre soulignĂ©e.(Alain Brunet)

Monica Pearce
Textile Fantasies (octobre)
Centre Disques
Classique, musique de chambre

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C’est la premiĂšre fois que l’on me propose un lien entre des sons musicaux et des textures tactiles. Cela dit, si l’on fait l’effort de prendre du recul par rapport aux attentes suscitĂ©es par les textiles Ă©voquĂ©s, on remarquera un cycle de piĂšces pour clavier (piano ou clavecin) et percussions d’une grande originalitĂ©, avec foisonnement de paysages sonores stimulants et de couleurs instrumentales excitantes. Textile Fantasies vous fera voyager dans des univers sonores aussi fascinants que curieux et sĂ©duisants. (FrĂ©dĂ©ric Cardin)

Julian Lage
A View with a Room (septembre)
Blue Note
Jazz contemporain
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Son style ne cesse de se raffiner. À 34 ans, Julian Lage fait partie de la jeune gĂ©nĂ©ration de guitaristes jazz, bien qu’il aie dĂ©jĂ  plusieurs albums derriĂšre la cravate. Pour moi, guitariste mĂ©diocre, jouer ultra rapidement comme Al Di Meola ou John McLaughlin me laisse indiffĂ©rent (heureusement ils ont fait autre chose). C’est dans les ballades qu’on voit la capacitĂ© crĂ©ative d’un guitariste jazz, et cet album nous en offre de magnifiques. Julian Lage se retrouve en communication totale avec Bill Frisell, 71 ans, prince de l’éclectisme guitaristique qui n’essaie jamais de lui voler la vedette. Juste donner plus de sens Ă  sa prestation. Le bassiste Jorge Roder et le batteur Dave King (The Bad Plus) complĂštent la formation. Paradis de la guitare ! (Michel Labrecque)

Big Thief
Dragon New Warm Mountain I Believe in You (février)
4AD
Indie folk, folk-rock, americana

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Pendant une pĂ©riode de cinq mois, le groupe a Ă©crit 45 chansons, ajoutant de nouveaux sons (violon, flĂ»te, harpe Ă  bouche) Ă  leur intĂ©ressant rĂ©pertoire de rock/folk indĂ©. Et le rĂ©sultat est une expĂ©rience d’Ă©coute sublime, mais Ă©clectique, qui puise ses influences dans le folk appalachien, le country folk, l’americana, l’indie rock, etc. Il suffit d’Ă©couter la nature brute et le caractĂšre ludique de Spud Infinity pour s’en convaincre. Au premier plan se trouve la voix prophĂ©tique et tremblante d’Adrianne Lenker, mais aussi celle du choriste et guitariste Buck Meek, qui ajoute une essence magnifique et bucolique Ă  de nombreuses harmonies sur Dragon New Warm Mountain I Believe In You. (Stephan Boissonneault)

The Chats
Get Fucked (août)
Bargain Bin Records
Punk, Garage, Aussie

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K.I.S.S. ou Keep It Simple Stupid, voilĂ  une devise que les trois teigneux mal sapĂ©s des Chats appliquent Ă  la lettre depuis qu’ils se sont fait connaĂźtre avec leur premier EP en 2016. Sur ce deuxiĂšme album complet, le trio australien crache 13 titres courts et furieux, le pied au plancher. BoostĂ©s Ă  l’adrĂ©naline et sans doute plusieurs biĂšres, les Chats sont lĂ  pour s’amuser, prĂȘt Ă  se battre pour leur droit Ă  la fĂȘte. Get Fucked – titre sans Ă©quivoque – est plus rapide, plus furieux et plus direct que tout ce que les Chats ont fait auparavant. Un jouissif doigt d’honneur, digne du meilleur des Saints, Damned ou Ramones. À Ă©couter le volume Ă  bloc. (Patrick Baillargeon)

Björk
Fossora (septembre)
One Little Independent Records
Avant-Pop, Electronica

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La rĂ©ussite de Björk tient Ă  la qualitĂ© des liens Ă©tablis entre diffĂ©rents genres musicaux, communautĂ©s et Ă©poques, de la noise Ă  la musique ancienne. Tous peuvent s’accrocher Ă  ses repĂšres consensuels, et c’est encore le cas ici. Cordes, anches, percussions, chant choral, beatmaking et autres variables servent les mĂ©lodies incarnĂ©es et la voix saisissante de la brillante soliste et conceptrice. Fossora parle d’une diffraction poĂ©tique de sa condition actuelle de femme artiste, tributaire d’une Ă©ducation trĂšs ouverte par sa dĂ©funte mĂšre, Ă  laquelle elle rend hommage : Hildur RĂșna HauksdĂłttir Ă©tait une militante fĂ©ministe, une intellectuelle encline au nihilisme, une mĂšre nĂ©anmoins aimante et responsable, malgrĂ© une vision du monde plutĂŽt sombre. (Alain Brunet)

Salvador Chavajay 
Chavahaze (novembre)
Passport Discs, Nikamo
Classique, rap, musique traditionnelle maya
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Pianiste classique guatĂ©maltĂšque, mais aussi rappeur qui a appris le français en travaillant dans les champs agricoles de la province, Salvador Chavajay arrive avec un album aussi inattendu que surprenant, rĂ©jouissant et original : du rap en langue maya (le tz’utujil) sur base mĂ©lodique d’oeuvres de Bach, Handel, Rachmaninov, etc.! Oui messieurs-dames. Ça marche, ça groove, ça fait du bien de la platitude mainstream qui affecte dĂ©sormais tellement de hip-hop commercial. PoussĂ© par Nikamo, le label de Samian, Salvador va vite faire parler de lui pas mal partout en 2023. Et ben oui, il assurera la premiĂšre partie de la tournĂ©e de… Samian! Fabuleusement audacieux.  (FrĂ©dĂ©ric Cardin)

Mieczyslaw Weinberg 
Die Passagierin (The Passenger) (juillet)
NAXOS
Classique, opéra, période moderne
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Une Ɠuvre majeure qui a tous les avantages : pertinente, poignante, moderne mais accessible, brĂšve et concentrĂ©e. Des solistes imprĂ©gnĂ©s, un chef incandescent, une musique magistrale. Voici un drame bien trempĂ© dans le sarcasme autant que le lyrisme tĂ©nĂ©breux d’un maĂźtre raconteur.  (FrĂ©dĂ©ric Cardin)

John Luther Adams
Sila: The Breath of the World (septembre)
Wise Music
Contemporain / expérimental, musique symphonique
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On est emportĂ©, bien que dans un Ă©trange effet de ralenti, par ce monumental hommage Ă  la puissance physique ET mĂ©taphysique du monde, tel que reprĂ©sentĂ© par l’Étatsunien John Luther Adams (Ă  ne pas confondre avec le post-minimaliste John Adams, tout court). Grandiosement, mais lentement, l’orchestre d’Adams respire et expire, vibre, illumine, mue et se transforme, comme s’il se faisait le porte-voix de la Terre entiĂšre, ou Gaia, un seul et unique organisme vivant. FrĂ©dĂ©ric Cardin)

Holy Fawn
Dimensional Bleed (septembre)
Wax Bodega
Post-rock, shoegaze, métal, stoner rock

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HOLY FAWN a conçu un album introspectif et lucidement lourd qui met Ă  contribution des synthĂ©s, des Ă©chos vocaux et des sons cueillis sur le terrain afin rendre les passages mĂ©talliques vraiment exaltants (cris, toms de batterie explosifs et murs de guitares distorsionnĂ©es) d’autant plus doux. L’homonyme Dimensional Bleed en est un parfait exemple, avec son intro qui ressemble Ă  quelque chose d’Explosions in the Sky et qui descend ensuite vers une sortie diabolique et gargantuesque. Sightless, le morceau le plus long de l’album, se construit et se construit Ă©galement en une libĂ©ration complĂšte de bruit et d’Ă©motion. (Stephan Boissonneault)

Talk Show
Touch the Ground EP (septembre)
Missing Piece Records
Post punk, dance rock, rock alternatif

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Touch The Ground EP sonne comme une discothĂšque dĂ©pravĂ©e, une discothĂšque oĂč le DJ divague et perd la tĂȘte, mĂ©langeant des basses lourdes avec un furieux laĂŻus post-punk. Ce groupe britannique a un son Ă©trange, se situant quelque part entre Shame et un groupe de rave qui aime les grooves industriels de formations telle The Sisters of Mercy. Il y a l’interaction entre une vraie batterie et une batterie techno 808, mĂ©langĂ©e Ă  des trilles de guitares brillantes et foudroyantes, tandis que Harrison Swann chantonne ses annonces discursives. ce qui donne parfois l’impression que sa gorge a Ă©tĂ© arrachĂ©e de son cou. C’est violent et grinçant, parfait pour les tendances narcissiques du post-punk. Mais c’est du post-punk pour danser. (Stephan Boissonneault)

Viagra Boys
Cave World (juillet)
Year0001
Post-punk, dance-punk, rock alternatif

Écoutez ici

Nous sortons d’une des pĂ©riodes les plus difficiles de l’histoire rĂ©cente. Mais aussi, aux yeux du chanteur Sebastian Murphy, certains d’entre nous rĂ©gressent vers nos dĂ©buts troglodytiques en tant qu’espĂšce. Malade physiquement et mentalement de ce qui se passe dans le monde, Murphy a Ă©tĂ© poussĂ© Ă  crĂ©er Cave World, un album qui aborde les thĂ©ories conspirationnistes Ă  la noix comme QAnon, ainsi que le racisme flagrant, l’homophobie et la folie plus gĂ©nĂ©rale qui se dĂ©veloppe sous le sol de la Terre. Le tout sur fond de post punk saxophonique… comment ne pas aimer ? (Stephan Boissonneault)

Osees
Foul Form (août)
Castle Face Records
Garage punk, rock psychédélique

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Sur le dernier album des Osees, A Foul Form, John Dwyer a dĂ» puiser dans mon cerveau subreptilien. Cet album est un punk lourd et stupide jusqu’Ă  la moelle et me rend nostalgique des fĂȘtes de skate/piscine et de maison de l’adolescence qui se terminaient par des murs cassĂ©s, des brĂ»lures de tapis de cigarettes et des interventions bizarres de la police. C’est un hommage Ă  l’Ă©poque de Black Flag, Wire et Crass, mais il ne se prend pas trop au sĂ©rieux et n’est qu’un amusement stupide. D’une durĂ©e de 20 minutes seulement, avec la plupart des chansons qui ne durent pas plus de deux minutes, les Osees ne s’Ă©ternisent pas. (Stephan Boissonneault)

Angel Olsen
Big Time (juin)
Jagujauwar
Americana, country, twang

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Avec Big Time, Angel Olsen a trouvĂ© sa place au domaine de l’Americana country. Ce n’est pas la premiĂšre fois qu’elle expĂ©rimente ce son country Americana, mais sur Big Time, la voix opĂ©ratique d’Angel se marie merveilleusement bien avec la guitare lap steel, les crescendos de l’orgue country, les trilles de la mandoline et le mellotron chaud, synonymes de la country des annĂ©es 70 comme Tammy Wynette ou Loretta Lynn. Elle a toujours voulu que ses disques donnent l’impression qu’un groupe joue en arriĂšre-plan avec sa voix au premier plan, et son souhait est maintenant exaucĂ©. (Stephan Boissonneault)

Thus Owls
Who Would You Hold If The Sky Betrayed Us (octobre)
Angell & Angell
Expérimental, art rock, jazz contemporain
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Pour ce projet, Thus Owls a invitĂ© des musiciens Ă  Ă©toffer sa proposition, bien au-delĂ  de la simple performance, on peut l’observer dans les bribes d’arrangements et d’improvisations de chacun. Ainsi, les saxophonistes Jason Sharp (basse, filtres Ă©lectroniques), Adam Kinner (tĂ©nor, voix) et Claire Devlin (tĂ©nor, voix) se joignent au batteur Samuel Joly, au bassiste Marc-AndrĂ© Landry, le tout accompagnĂ© de Simon Angell (guitares, basse synthĂ©tique, basse) et d’Erika Angell (voix principale, claviers). Les artistes impliquĂ©s ici viennent du jazz contemporain, de la crĂ©ation Ă©lectroacoustique, de l’avant-rock, de l’avant-folk et mĂ©langent ces rĂ©fĂ©rences afin d’atteindre autre chose. Ensemble, ils prolongent une forme d’art hybride, collaborative, trĂšs imaginative et font de rĂ©elles avancĂ©es. C’est un album qui marquera la scĂšne indie montrĂ©alaise en 2022. (Alain Brunet)

Esmerine
Everything Was Forever Until It Was No More (mai)
Constellation
Expérimental, musique contemporaine, musique actuelle, post-rock
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Avec une discographie qui s’Ă©tend sur deux dĂ©cennies, Esmerine s’est dĂ©marquĂ© de ses contemporains par son style distinct de post-rock qui s’appuie fortement sur des Ă©lĂ©ments nĂ©o-classiques/chambreurs et sur la musique folklorique du monde entier. Everything Was Forever Until It Was No More est un album magnifiquement conçu et convaincant, qui tĂ©moigne de la pertinence du genre Ă  l’Ăšre post-pandĂ©mique. VoilĂ  un album rafraĂźchissant et accessible dans un genre qui peut ĂȘtre intimidant. À l’exception de quelques longs morceaux, l’album se compose principalement de paysages sonores autonomes, mais il est prĂ©fĂ©rable de l’Ă©couter dans son ensemble si l’on veut en apprĂ©cier le flux et le reflux naturel, d’un thĂšme Ă  l’autre. (Varun Swarup).

Open Mike Eagle
a tape called component system with the auto reverse (octobre)
Auto Reverse
Alternative hip hop, art rap
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Le style bizarre, peu orthodoxe et souvent comique d’Open Mike, ainsi que son choix de rythmes lo-fi, rĂ©tros et simplistes, sont assez rafraĂźchissants en 2022. Écouter une chanson comme 79th and Stony Island, oĂč Mike explique qui il est et pourquoi il est comme il est – un produit de son environnement de Chicago et de Crenshaw, Ă  qui l’on a dit de sortir et de poursuivre le rĂȘve amĂ©ricain (quoi que cela signifie de nos jours) – est comprĂ©hensible pour les gens ordinaires. La plupart des musiques de rap d’aujourd’hui consistent en des histoires d’amour insondables et autres histoires disneyesques, ou en de l’ultra-violence et des affaires de gangsters entre millionnaires et milliardaires. En revanche, les chansons de Mike Eagle comme I’ll Fight You et I Retired Then I Changed My Mind explorent sa mentalitĂ© unique tout en abordant des pensĂ©es et des sentiments rĂ©alistes que les gens ordinaires ont tous les jours. (CCJ Gabriel)

Mitski
Laurel Hell ( février )
Dead Oceans
Indie pop, synth-pop, électro-rock

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Mitski enveloppe ses chansons d’une musique plus ambitieuse, puis aborde subtilement les thĂšmes poĂ©tiques de sa « bande-son de transformation ». Toutes ces questions – et bien d’autres encore – sont explorĂ©es : l’incertitude de l’amour intime, la dĂ©pression, la rupture, la dĂ©sillusion, les leçons tirĂ©es de l’adversitĂ©.  Il faut en dĂ©duire que l’univers de Mitski est d’abord celui d’une autrice de chansons ; son processus littĂ©raire requiert une attention soutenue. (Alain Brunet)

Saba
Few Good Things (février)
Saba PIVOT, LLC
 Hip-hop, trap, jazz, neo-soul
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La pochette de Few Good Things illustre un black sexagĂ©naire assis au pied d’un immeuble urbain, ceinturĂ© d’une clĂŽture Frost. Son regard est torve. Étrangement, sa tronche est entourĂ©e de fleurs. Étrangement? Excellent rappeur de Chicago, Saba a fort bien compris l’incertitude et la bizarrerie de l’existence humaine, qu’il explore poĂ©tiquement Ă  travers son propre parcours dans la Windy City. Le narrateur Ă©voque un parcours difficile, parfois dur, mais en rappelle aussi les privilĂšges acquis : logis, fringues, loisirs, oisivetĂ© domestique
 Few Good Things
 Cela ne se fait pas dans l’allĂ©gresse pour autant, les questions restent nombreuses et sans rĂ©ponse pour la plupart. Les angles d’observation sont variĂ©s et exprimĂ©s par un esprit vagabond, lĂ©gĂšrement dĂ©tachĂ© de son sujet, intelligent et sensuel. Paradoxe assumĂ© entre drame et lĂ©gĂšretĂ© de l’existence? Oui, c’est ça.  (Alain Brunet)

Cate Le Bon
Pompeii (février)
Mexican Summer
Pop baroque, indie, krautrock
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Pompeii est nĂ© de la volontĂ© de Cate Le Bon de crĂ©er une musique qui ressemble Ă  un tableau, avec des vagues indies de guitare Telecaster, des grappes de saxophones et clarinettes appariĂ©es, des Ă©chos de clavecin, des synthĂ©s en dents de scie et, bien sĂ»r, la subtile voix de sirĂšne de Cate Le Bon. Sans oublier les lignes de basse qui sont le ciment lui permettant de passer d’un intermĂšde mystificateur Ă  un autre carrĂ©ment anormal. L’artiste prouve ici qu’elle est une « musicienne pour musiciens », qui essaie constamment de se rĂ©inventer dans les genres indie rock/krautrock/pop baroque et qui sait nĂ©anmoins Ă©crire des mĂ©lodies accrocheuses… et musicalement abstraites. (Stephan Boissonneault)

Tanya Tagaq
Tongues (mars)
Atlantic Records
Darkwave, ambient, bruitisme, expérimental, chant de gorge
Écoutez ICI

En dix chansons ou piĂšces musicales, Tongues traite avec virulence de nombreuses souffrances vĂ©cues par les autochtones canadiens, consĂ©quences directes et indirectes de la colonisation occidentale. On y ressent la condition des victimes et le retour de la confiance, dans cette renaissance indigĂšne… nĂ©anmoins en proie Ă  la souffrance, pour les raisons que l’on sait. Dans ce contexte, la musique de Tanya Tagaq est donc moins conceptuelle, et plus viscĂ©rale que jamais. Le chant guttural inuit s’apparente au grognement du death metal, les rythmes deviennent plus lourds, les frĂ©quences synthĂ©tiques prennent d’assaut nos oreilles, elle se rapproche parfois de la darkwave ou du synthpunk. TrĂšs chargĂ©s, parfois mĂȘme violents, mais lancĂ©s dans une forme gĂ©nĂ©ralement succincte, les mots nous plongent dans un tourment et l’espoir autochtone « made in Canada ». (Alain Brunet)

Pressure Pin
Superficial Feature (avril)
Autoproduction
Art punk, post-hardcore, new wave

Écoutez ICI

Pressure Pin est un projet venu de nulle part, d’un certain Kenny Smith, soit le batteur du nouveau groupe de disco-art punk La SĂ©curitĂ©. Le mixage s’avĂšre Ă©galement fantastique avec une cacophonie de cuivres sous des guitares rugueuses. Les voix se prĂ©sentent Ă©galement comme des dĂ©clarations d’intĂ©rĂȘt public, comme dans Complete Impulse Directive, oĂč Smith identifie exactement ce qui ne va pas dans la sociĂ©tĂ©, en rimant dans une prose qui semble ĂȘtre un pur flux de conscience doublĂ© d’un cĂŽtĂ© agitĂ© et surrĂ©aliste. Et les brĂšves pauses entre les prises de voix sont chaotiques de la meilleure maniĂšre imaginable. (Stephan Boissonneault)

Little Simz

No Thank You (décembre)

Forever Living Originals / AWAL

LISTEN HERE

Rap, grime, hip-hop instrumental, électronique, pop de chambre

Simbiatu Ajikawo, alias Little Simz, a annoncĂ© la semaine passĂ©e et sorti dans la foulĂ©e son 5Ăšme album NO THANK YOU, comme une surprise, avec la mention « emotion is energy in motion, honour your truth and feelings, eradicate fear, boundaries are important”. Cette phrase simple, efficace, est Ă  l’image de la mentalitĂ© de la rappeuse, affirmant la volontĂ© de la construction d’un soi solide. Pour cause, elle a produit cet album album son acolyte depuis les touts dĂ©buts, Inflo, qui n’est autre que la patte derriĂšre SAULT, et insuffle encore Ă  cet album une plus-value aux allures orchestrales et cinĂ©matographiques. Les percussions tantĂŽt jazz, tantĂŽt proches des traditions guerriĂšres, et la voix de Cleo Sol forment le fil directeur d’un album humble mais complet.

Little Simz est une poĂ©tesse aguerrie (son Mercury Prize l’a prouvĂ©), et tire de ses ancĂȘtres (Ă  base d’échantillons d’A Tribe called Quest et des Fugees) le lyrisme et la musicalitĂ©, faisant de son Ɠuvre entiĂšre un objet nouveau et rempli de cachet, qu’elle dĂ©ploie tout en dĂ©tente dans le morceau Gorilla. La contrebasse et le glissement des violons traduisent sa nonchalance, au regard de la place qu’elle s’est créée dans un milieu qui tend Ă  ĂȘtre masculin. Depuis le dĂ©but de sa vingtaine, elle a su cultiver cette fidĂ©litĂ© envers elle-mĂȘme, et une intuition crĂ©atrice que je rapprocherais de celle de Kendrick Lamar, qu’elle sample aussi dans son morceau No Merci. Il n’y a pas de hasard Ă  la rencontre de ces deux univers, le sien et celui de Lamar, puisque cette gĂ©nĂ©ration tend la main Ă  la vulnĂ©rabilitĂ© et parvient Ă  cueillir des Ă©motions profondes par le medium du rap. C’est cette gĂ©nĂ©ration-lĂ , riche de cultures mĂ©langĂ©es et alerte Ă  propos du danger d’ignorer les traumas, qui fait de l’écriture un exutoire et sublime le rĂ©el et son lot de misĂšre mentale et sociale. Little Simz ne s’excusera pas et n’aura de grĂące que pour la philosophie du wabi-sabi (de la philosophie japonaise visant Ă  trouver la beautĂ© dans l’imperfection) qu’elle invoque dans son dernier morceau comme Ă©tendard d’une vie imparfaite, dont la progression lente et sĂ»re dĂ©ploie l’espace nĂ©cessaire Ă  l’amour, concluant d’un « it might just blossom into a new love », car Ă  la fin, et envers et contre l’industrie musicale, fiĂšre de son indĂ©pendance, Little Simz a construit avec pudeur un empire sage, tendre et solide Ă  la fois. (Anne-Sophie Rasolo)

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Festival de LanaudiÚre | Paulus & Elias : Les oratorios de Mendelssohn interprétés par Akamus

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Nuits d’Afrique | Sousou et Maher Cissoko : l’amour, de la kora et par la kora

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Nuits d’Afrique | Sahad : l’étoile de Dakar brille sur le Balattou

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Suzanne Vega – Flying With Angels

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Nuits d’Afrique | Femi Kuti & The Positive Force en live

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