Alors que Trees Speak nous conduisait dans les méandres d’un rêve cybernétique du début du XXe siècle, dans son plus récent album Vertigo of Flaws : Emancipation of the Dissonance and Temperaments in Irrational Waveforms, le vidéoclip du morceau Traumsprache, présenté en exclusivité sur PAN M 360, semble annoncer le scénario d’un film muet, d’abord écrit en musique avant d’être capturé sur la pellicule. Mettant en scène les acteurs Chiara D’Anna (The Duke of Burgundy avec une musique composée par Cat’s Eyes) et Ned Dennehy (Calm with Horses avec une musique composée par Blanck Mass), l’intrigue de ce brillant tour de force réalisé par le jeune artiste londonien Dylan Hayes ne demande maintenant plus qu’à être lue.
Ramenée du front de la première Grande Guerre technologique, une femme angoissée, mutilée et éborgnée implore l’aide des secours restés trop longtemps introuvables dans le Cabinet du Dr Caligari. Si l’on ne peut toujours pas déterminer cent ans plus tard qui, du patient ou du docteur, est réellement fou dans cette histoire, Traumsprache nous laisse plutôt imaginer l’atmosphère exiguë d’une expérience de psychopharmacologie qui tournerait mal, de l’administration inhospitalière et forcée d’une camisole chimique ou encore du caractère incertain d’une utilisation dangereuse de ciseaux de chirurgie biotechnologique, qui viendraient modifier le tréfonds de notre être contre notre gré. À travers la perte symbolique de son œil gauche, cette « gueule cassée » infirme nous laisse entrevoir le monde parallèle d’un ange déchu et torturé, mais dont le discours déconstruit reste inaudible face au monde rationnel. Dans son propre langage de rêve surréaliste et brouillé, ce dernier ne demande peut-être rien d’autre que de pouvoir exprimer à travers elle les Ailes du désir de sa renaissance promise.