AKOUSMA | Rocío Cano Valiño, la composition, l’architecture et la « physicalité des sons »

Entrevue réalisée par Laurent Bellemare

Le plus surprenant chez la compositrice argentine Rocío Cano Valiño, c’est qu’elle mène aussi une carrière d’architecte d’intérieur. C’est peut-être ce qui explique sa fascination pour les sons qui l’entourent, et plus particulièrement leur décomposition en de plus petites particules sonores. 

Ce passage à la loupe de la matière sonore lui permet ensuite de la recomposer avec du micro-montage, technique de composition numérique des plus minutieuses. Habitués et néophytes pourront entendre deux de ses œuvres acousmatiques résonner dans l’orchestre de hauts-parleurs de l’Usine C : Astérion et Oknu.

Bien qu’elle ait étudié la composition à Buenos Aires  avec Demian Rudel Rey, elle  a fait presque toute sa scolarité en France, à Lyon. Elle se spécialise en musique mixte, composant autant pour ensemble instrumental que pour bande électroacoustique. Elle a développé de nombreux projets au sein de la communauté française de musique contemporaine. 

Ainsi donc, Akousma accueille Rocío Cano Valiño et PAN M 360 en fait de même !

Pan M 360 : Vous allez donc participer à la 19e édition d’Akousma, un festival reconnu pour la musique acousmatique.

Rocío Cano Valiño : Tout d’abord, je suis extrêmement heureuse d’avoir été invitée à participer au Festival Akousma, que j’admire énormément depuis des années! 
à

PAN M 360: Plus généralement, comme décririez vous votre démarche artistique?

Rocío Cano Valiño : En tant que compositrice, je fais des pièces instrumentales, mixtes (instrument et électronique) et électroacoustiques ou acousmatiques, et chaque projet c’est une nouvelle aventure.

Pour la composition de mes pièces, j’utilise diverses sources sonores. J’aime beaucoup les sons proches, la granulation et la “physicalité” des sons. Je pense que cette physicalité est aussi reliée à mon double parcours : compositrice et architecte d’intérieur. 

Je me concentre aussi sur l’exploration du timbre à partir de la technique du micro-montage, c’est-à-dire, je travaille avec de petites particules des sons choisies pour explorer les éléments qui le composent (les partiels, les rythmes internes, les variations timbrales).

PAN M 360: Quel est l’objet de votre quête ?

Rocío Cano Valiño : Mon intention est de générer, à travers l’interaction complexe entre différents objets sonores, des gestes vertueux dans un devenir musical dynamique (en constante mutation). Mes sources d’inspirations sont assez diverses, tout d’abord, la musique, l’architecture et le design sont des choses qui me passionnent. De plus, la littérature et la peinture me permettent aussi de rêver.

PAN M 360: Que pouvez-vous nous dire des œuvres présentées à Akousma?


Rocío Cano Valiño : Pour les deux pièces qui seront présentées au Festival Akousma, Astérion et Okno (cette dernière commandée par Radio France pour l’émission «Création Mondiale» et réalisée au Studio GRM Groupe de Recherches Musicales. Elle a eu sa création publique le 14 février au Festival Présences à La Maison de la Radio à Paris), voici quelques informations :

Pour Astérion, j’ai utilisé pas mal d’enregistrements de fermetures éclairs, à différents vitesses, plus proches, plus loin, aussi avec la spatialisation stéréo de ces sons. J’intègre aussi d’autres types de machines que nous pouvons trouver dans une maison, lave-linge, aspirateur… L’utilisation de sons provenant des machines (électriques ou analogiques) m’intéresse énormément, et je les utilise souvent dans mes œuvres. 

Dans le cas de la pièce Okno, j’ai intégré aussi des enregistrements de sons faits avec des machines et magnétophones (boutons, mécanismes, engrenages…) posant la question de la relation des êtres humains avec l’automatisme. Dans l’œuvre, il y a toujours l’idée de la frontière entre ce qu’il est réel et de ce qui est fictif. L’imaginaire est exprimé dans des sons qui peuvent avoir une connotation déjà déterminée en eux-mêmes. Il se construit alors un son imaginaire en dehors du contexte d’origine de chaque élément. 




Pan M 360 : Quelle a été votre formation musicale et votre parcours avant de vous lancer dans l’art sonore et l’utilisation des technologies numériques?


Rocío Cano Valiño : J’ai tout d’abord expérimenté avec la batterie et le violon. J’ai vite développé une attirance pour la musique contemporaine, pour le timbre, les sonorités qui m’entouraient dans la vie quotidienne et les sons que j’entendais dans diverses ateliers de travail pour construire des objets en bois. C’est très probablement grâce à ça que je me suis décidé plus tard pour suivre des cours d’analyse, d’histoire et d’instrumentation de la musique. Et parallèlement, j’étais tellement motivée que j’ai commencé à prendre des cours de composition, mixage et prise de son. Mon intérêt dans les nouvelles technologies et l’art sonore est venu naturellement depuis le début, comme une sorte de nécessité profonde d’intégrer tous mes désirs artistiques dans mes projets. 



Pan M 360 : Vous avez collaboré avec l’ensemble montréalais Paramirabo en 2021. Que pouvez-vous dire de ce projet qui réunissait plusieurs ensembles?


Rocío Cano Valiño : Ce projet était magnifique ! On a fait une tournée dans diverses villes de France et du Canada. C’était une expérience humaine et musicale extrêmement enrichissante. Ce rassemblement de trois ensembles que j’admire énormément m’a permis de prendre tous les risques artistiques que je voulais afin d’arriver à un résultat dont j’était (et je suis) très satisfaite. Et là, j’ai essayé de mettre en valeur l’empreinte sonore de chaque groupe (Paramirabo, Proxima Centauri et HANATSUmiroir). Cela m’a permis de trouver une confluence sonore d’énergie dans ma pièce Okinamaro, pour 12 musiciens et électronique (Commande de l’État du Ministère de la Culture – DRAC Nouvelle-Aquitaine, et l’Aide à l’écriture musicale de l’OARA)




Pan M 360 : Vous avez cofondé l’Ensemble Orbis à Lyon. Quel est votre rôle au sein de cet ensemble et à quels projets pouvons nous nous attendre prochainement?

Rocío Cano Valiño : Je suis dans le comité artistique de l’Ensemble Orbis que j’ai effectivement cofondé à Lyon (France) en 2021 et, qui est dirigé artistiquement par le compositeur Demian Rudel Rey. Je suis responsable de la partie électronique de l’ensemble. Ce projet est un rêve qui est devenu une réalité et qui nous permet d’unifier nos forces pour créer des projets musicaux et interdisciplinaires ensemble.

 La musique de création est au cœur de l’ensemble et nous aimons programmer des pièces instrumentales, mixtes et acousmatiques. Nous faisons différents types de formats de concerts : “standards”, déambulations, spectacles, avec des lumières et de la vidéo. Nous avons eu la possibilité de passer commandes à plusieurs compositrices et compositeurs et maintenant, j’ai la chance d’écrire une pièce pour l’Ensemble Orbis, pour tout son instrumentarium et électronique, qui sera créée dans la Biennale de Musiques Exploratoires de Lyon 2024 organisé par le GRAME Centre national de création musicale.



Pan M 360 :Avez-vous des attentes de la part du public montréalais, ou par rapport au Québec de façon plus générale?

Rocío Cano Valiño : J’attends une belle rencontre, une connexion avec eux à travers mon univers musical et peut-être, si j’ai de la chance, de pouvoir échanger avec eux après le concert. Pour moi, c’est toujours très important de créer une liaison et des échanges avec les individus de différentes régions du monde ! C’est cela qui nourrit aussi mes pièces !

Pan M 360 : Merci beaucoup!

Rocío Cano Valiño : Avec plaisir!

Vous pourrez entendre les œuvres de Rocío Cano Valiño lors du Bloc 2 de la première soirée d’Akousma, le 18 octobre 2023 à 21h. INFOS ET BILLETS ICI

https://akousma.ca/Programmation-Akousma-19

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