Sophie Lukacs, kora-cœur à Nuits d’Afrique

par Luc Marchessault

« Dring-dring-dring » fait le téléphone à l’entrée du Balattou, pendant que la présentatrice nous présente Sophie Lukacs. « Dring-dring-dring » fait de nouveau l’intempestif appareil à la sonnerie rétro, tandis que la principale intéressée pose sur ses cuisses son instrument sphérique. Tout le monde sourit, y compris Sophie. On ne pourrait espérer une ambiance plus détendue et conviviale. Le lieu y est pour beaucoup : côté décor, pas grand-chose n’a changé au Balattou depuis 37 ans; ce sont avant tout les rencontres, découvertes et métissages musicaux sans cesse renouvelés qui donnent son âme à ce vénérable club.

La feuille de route de Sophie Lukacs risque de provoquer l’apoplexie chez les néo-pharisiens qui ont dénigré le choix de Mélissa Lavergne comme porte-parole de Nuits d’Afrique cette année : une non-Africaine, non-homme et non-griot qui s’est approprié la kora, instrument emblématique des contrées mandingues! Sacrilège!

Madame Lukacs a vu le jour à Budapest, en Hongrie. Elle a immigré au Québec et a étudié le violon à McGill, notamment. Lors d’un voyage au Burkina Faso, elle a découvert la kora, cet instrument traditionnel à 21 cordes dont les sonorités lui ont tapé dans l’oreille, au point qu’elle voulut se l’approprier. Comme elle nous le racontait candidement hier soir, elle est retournée en Afrique de l’Ouest en se donnant un an ou deux pour maîtriser l’instrument et apprendre de 50 à 100 pièces traditionnelles mandingues, forte de sa formation classique. Une fois sur place à Bamako, elle alterna les maîtres pour apprendre plus rapidement. Or, le grand Toumani Diabaté, qui fut son mentor, l’avait mise en garde : « Ne multiplie pas les professeurs, tu vas tout mélanger. »

C’est exactement ce qui se produisit. Sophie Lukacs dut donc prendre le temps et suivre les étapes. Elle nous l’a bien résumé lors d’une courte et instructive démonstration : d’abord les pouces et l’accompagnement pendant un bon bout de temps; puis les index et davantage de rythmes; ensuite les mélodies; et enfin l’improvisation, le tout étalé sur sept années. Pour cette prestation à Nuits d’Afrique, Sophie Lukacs était accompagnée du percussionniste chevronné Michel Medrano Brindis à la calebasse, ainsi que du compatriote magyar László Koós au violoncelle, dont il pinçait les cordes comme s’il se fût agi d’une contrebasse. Au programme, des airs traditionnels mandingues et des compositions avec paroles en bambara, dont Tolon et Forama, parue sous forme de simple avec Awa Kassé Mady Diabaté au chant. Sophie Lukacs a aussi interprété des compos en anglais – dont Too Many Times et Falling – et une en hongrois. On a remarqué que sa voix semble plus assurée lorsqu’elle chante dans la langue nationale du Mali. Et on a constaté que les années d’apprentissage de Sophie Lukacs ont été fort fructueuses : sa maîtrise de cet instrument enchanteur ne fait aucun doute. Un plus vaste public pourra d’ailleurs en prendre la mesure en septembre, puisque Sophie lancera son premier album sur étiquette Nuits d’Afrique.

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