Anthony Marwood et les Violons du Roy ont visité la Salle Bourgie vendredi soir pour un concert présentant des œuvres assez peu communes, mais qui après leur écoute en compagnie de ces musiciens aguerris, occuperont certainement une plus grande place dans les mémoires.
Marwood fait très bonne impression sur scène. Son jeu puissant et son showmanship font de lui un violon solo excitant et agréable à entendre. Il réalise avec brio et adresse des lignes mélodiques virtuoses et, surtout, très chargées. Durant la seconde pièce, celle de Mendelssohn, il dirigeait en tant que soliste et sa prestance humble et confiante semblait centrer l’orchestre autour de lui. Il n’y a plus de doutes à avoir sur la qualité des musiciens des Violons du Roy. Chaque section a su réaliser avec justesse et intensité les partitions souvent très complexes des trois œuvres présentées, même en support. On note également le travail exemplaire de Isaac Chalk à l’alto, qui avait d’importantes sections solos durant la dernière pièce, et dont les sonorités évoquaient presque une section complète de vents.
Que dire sur les œuvres joués? On peut commencer par le fait que les trois œuvres ont été composée durant la jeunesse des trois compositeurs. La première œuvre, la Sérénade pour cordes en mi mineur de Edward Elgar a été composée en 1892 alors qu’il avait 35 ans et précède encore un peu sa maturation musicale finale. Il s’agit d’une œuvre enlevante, presque enivrante qui vous emporte dans ces largesses et ses sonorités enchanteresses. La seconde œuvre, composée à 13 ans par Félix Mendelssohn, est le Concerto pour violon et cordes no. 1 datant de 1822. La composition y est plus simple, plus formelle, mais on y trouve une énergie et une intensité tant pour le soliste que pour l’orchestre autour. Le style y est presque classique (Mendelssohn n’ayant visiblement pas encore acquis son style propre), mais on sent l’éclosion proche d’un langage nouveau.
La dernière œuvre est plus paradoxale. L’Octuor en do majeur de Georges Enesco, fabuleusement arrangé par nul autre qu’Anthony Marwood, témoigne de la fougue et de l’ambition du jeune compositeur qui l’a écrit. Enesco avait en 1900, date de la composition, 19 ans et il avait clairement beaucoup de choses à dire. Peut-être un peut trop, parce qu’on perd facilement le fil avec toutes les idées différentes qui nous sont présentées. Les idées musicales sont très intéressantes, mais la surcharge de notes et le manque de continuité laisse l’auditeur un peu au dépourvu. C’est une œuvre de qualité, mais qui démontre également que, parfois, trop vouloir en dire revient à n’en dire que peu au final.
Il s’agit, somme toute, d’un concert bien réussi pour les Violons du Roy. La Salle Bourgie est effectivement bien adaptée à ce format et à cet ensemble. On espère avoir la chance d’en entendre plus souvent dans le futur!
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