L’ensemble Constantinople dirigé par Kiya Tabassian a invité le public à une rencontre profondément touchante et humaine hier soir à la salle Bourgie de Montréal. Faisant coïncider tant musicalement que thématiquement les partitions de Bach (1685-1750) et les textes du poète persan Omar Khayyam (1048-1131), même à 600 ans d’écart, Tabassian et les musiciens qui l’accompagnaient ont ainsi servi de véhicule à de très beaux moments de communion pour le public nombreux et très diversifié en âge et en provenance culturelle. Le choix des pièces a été fait avec grand soin, de toute évidence, car les enchaînements entre extraits de cantates (par exemple) et chants ou pièces instrumentales de style classique persan se faisaient avec beaucoup de fluidité. La soprano tchèque Hana Blažíková a une fort belle voix, bellement équilibrée et d’une justesse impeccable.
Le même concert, avec les mêmes interprètes, donné à l’Abbatiale Sainte-Foy de Conques, le 9 août dernier :
On a enchaîné pièces de Bach et morceaux classiques persans dans une sorte de cohabitation inspirée où les deux géants ont échangé, parfois même chanté dans un unison partagé, sur la vie, la mort, dieu et l’amour. Tout cela dans un grand respect qui laissait autant de place à l’un qu’à l’autre, mais aussi à des interactions plus serrées et étroites, presque fusionnelles. C’est fascinant de constater que deux univers qui, il y a 50 ans et plus, auraient parus irréconciliables aux supposés connaisseurs et puristes musicaux, semblent aujourd’hui tout à fait capables de s’entendre et de stimuler chez le public une attention soutenue et des réactions très enthousiastes. Les applaudissements ont été en effet très chaleureux. Il semble bien que la musique soit encore une fois un modèle que les humains de la Terre devraient suivre plus étroitement!
Soulignons également la grande qualité musicale des membres de l’ensemble, les réguliers comme Didem Basar au kanun, Tanya LaPerrière au violon baroque, Michel Anger au théorbe et Patrick Graham aux percussions (et Tabassian lui-même au chant et au setar), et les invités comme la Turque Neva Özgen au kemenche, la Néerlandaise Tineke Steenbrink à l’orgue positif (également co-fondatrice du Holland Baroque) et l’Allemande Johanna Rose à la viole de gambe.
Crédit photo : Constantinople