Inarrêtables. Alors qu’on venait à peine de digérer l’excellent Wall of Eyes, The Smile offre sur un plateau d’argent le tout aussi excellent Cutouts, seulement neuf mois après son deuxième effort. Les morceaux de ce deuxième et de ce troisième album signés Yorke, Greenwood et Skinner proviennent de la même session d’enregistrement. Et pourtant, l’ensemble de Cutouts ne laisse pas penser à des B-sides qui n’auraient pas dû sortir des vieux tiroirs (ce qui renvoie inévitablement à l’exercice similaire pratiqué par Radiohead, en 2001, avec Amnesiac, pratiquement aussi bon que son intime conjoint Kid A).
Foreign Spies ouvre la galette dans une ambiance nostalgique et planante, teintée de claviers rétros et languissants, comme un écho, tandis qu’Instant Psalm et son folk-électro éthéré ponctué d’instruments de musique classique confirme la veine douce de l’introduction de Cutouts. Veine directement rompue par la batterie syncopée de Tom Skinner sur la très jazz Zero Sum, bien plus audacieuse et rythmée que les deux premières chansons du projet.
Facile de comprendre que The Smile, encore une fois, ne s’impose pas de limites en composant, le trio parvenant à concilier brillamment l’expérimentation à l’accessibilité pour le grand public. The Smile, ce sont trois virtuoses en quête de nouveauté, en quête de frisson, jouant avant tout pour s’amuser et amuser la galerie.
La forme olympique du trio réjouit, mais à la fois, pas complètement : avec un troisième album en moins de trois ans, Thom Yorke et Jonny Greenwood semblent alors délaisser tranquillement Radiohead au profit de The Smile, transformant peu à peu leur projet parallèle en une préoccupation numéro un (les propos tenus récemment par Yorke abondent dans ce sens). C’est compréhensible, la tête créative de Radiohead veut aller voir ailleurs, toucher à de nouveaux horizons, mais à la fois, ça donne un goût quelque peu amer.
The Smile est, d’un avis personnel, l’un des meilleurs groupes sur Terre à l’heure actuelle, ne vous méprenez pas. Sa discographie est pour l’instant sans faille. Mais Radiohead, c’est Radiohead. Ils sont irremplaçables, c’est tout.