Ce week-end à la Sala Rossa, les deux soirées consécutives chapeautées par Sunset Rubdown sont d’authentiques retrouvailles pour le groupe reconstitué et dont c’était jeudi le premier concert depuis 13 ans.
C’était aussi l’occasion pour ces hipsters ayant dépassé la trentaine de reprendre contact avec ce groupe excellent, né jadis à Montréal et mené par l’un des plus doués songwriters canadiens, Spencer Krug, surtout connu pour sa participation à la formation Wolf Parade.
Comme c’est le cas d’un nombre sans cesse croissant d’artistes hyper doués qui s’égarent dans les répertoires infinis des plateformes d’écoute en continu, Spencer Krug est une aiguille en or massif, perdue dans la méga botte de foin. Heureusement pour lui et pour nous, son immense talent suffit au moins à payer ses frais fixes… sans que les institutions médiatiques de l’écosystème musical ne s’en préoccupent comme elles le devraient.
Je me souviens encore d’un concert donné jadis dans le contexte de Pop Montréal il y a une mèche et puis… pas grand-chose. Normalement, un groupe de cette trempe devrait remplir le MTELUS pour services rendus à nos âmes mais bon. Spencer Krug n’ayant vraiment pas de plan de carrière, son esprit libre et peu carriériste l’a mené ailleurs que sur les listes d’écoute à succès. À l’évidence, ses multiples projets n’ont pas produit un effet de convergence.
Aujourd’hui, sa notoriété est assez grande pour remplir deux Sala Rossa d’affilée, sans plus. Gageons qu’il existe encore tout plein de fans de Wolf Parade ne sachant pas l’existence de Sunset Rubdown. Pourtant…Il fallait vraiment se trouver à la Sala Rossa pour se redire wow, quel joyau de la mouvance indie!
Du premier album de Sunset Rubdown, Snake’s Got a Leg (2005), on a reconnu la chanson titre.
De l’album Shut Up I’m Dreaming (2006), on a pu identifierThe Empty Threats of Little Lord, Shut Up I Am Dreaming of Places Where Lovers Have Wings, Stadiums and Shrines II,The Men Are Called Horsemen There.
De l’album Random Spirit Lover (2007), on a eu droit à The Taming of the Hands That Came Back to Life, Winged / Wicked Things,The Mending of the Gown.
De Dragonslayer (2009), Silver Moons, You Go On Ahead (Trumpet Trumpet II), Idiot Heart, Dragon Lair.
De l’EP Sunset Rubdown Introducing Moonface, Coming to at Dawn.
Jamais enregistrée mais composée dans les années 2000, la chanson We’re Losing Light fut exécutée avec brio, comme l’ensemble de cette performance top niveau. En plus d’être un parolier d’une classe à part, Spencer Krug est un redoutable chanteur d’esprit rock. Toujours penché sur son micro et ses claviers, il n’est pas exactement ce qu’on appelle une bête de scène mais la qualité de son travail musico-poétique et l’indiscutablecompétence de son band compensent largement pour ces carences apparentes.
Fallait-il se formaliser que bien peu de nouvelles musiques figuraient au programme de ces retrouvailles? Pas à ce stade de la reconstruction. Il fallait plutôt reconfirmer les grandes qualités de ce groupe que forment Spencer Krug (voix et claviers), Michael Doerksen (guitare, batterie), Jordan Robson-Cramer (batterie, guiare), Camilla Wynne (claviers) et Spencer Krug (voix soliste et claviers), joints sporadiquement par le bassiste Nicholas Merz qui s’était produit en première partie.
Ce dernier est d’ailleurs un authentique mutant de la mouvance americana, en plus de s’avérer un redoutable multi-instrumentiste, chanteur et concepteur sonore, Son usage façon dark ambient d’une guitare pedal steel assortie de filtres électroniques qui en transforment les fréquences, ses envolées de baryton extra-terrestre, sa dégaine de cow boy sous acide, ses psalmodies et reprises étranges (on a même reconnu Wicked Games de Chris Isaak!) sont autant de matériaux constitutifs d’un personnage unique, pour employer un euphémisme.
Si vous pouvez donc vous faufiler pour la seconde soirée de Sunset Rubdown à la Sala, la recommandation est chaude et fervente.