Si, dans la foulée de Boukman Eksperyans et compagnie, Chouk Bwa a cherché des auditeurs internationaux pour sa mizik rasin, ou musique racine, la version haïtienne des polyrythmies et des chants choraux africains, c’est dans une large mesure pour mieux montrer le vrai visage de la foi vodou, de même que la réalité de la vie quotidienne en Haïti, les hauts autant que les bas.
Le sextuor a une structure pyramidale, avec le leader Jean-Claude « Sambaton » Dorvil flanqué des choristes Maloune Prévaly et Edèle « Sasufi » Joseph, tous trois soutenus à leur tour par les chanteurs-batteurs Gomez Henris, Sadrack Merzier et Jean Rigaud Aimable. Cette dynamique semble bien leur réussir.
Depuis 2016, ils sont partenaires des Ångströmers, le duo bruxellois de Nicolas Esterle et Frédéric Alstadt, dont l’électronique analogique brute et les distorsions dub contribuent à l’enrichissement et à la diversification de la palette de Chouk Bwa.
La chanson-titre, qui ouvre l’album de façon percutante, se rapproche hélas du modèle ethno-techno habituel un brin assommant, bien que ce soit certainement mieux que ça. Ce n’est que sur l’instrumental plus discret et funky Kay Marasa Dub que les Belges trouvent leur place en avant. Cette pièce est rapidement suivie de Peleren avec le chant a cappella de Dorvil, auquel s’ajoutent des bruits de la nature et le son du fè, le gong de fer du chef d’orchestre. Sur la suivante, l’imposante Negriye, celui-ci donne un coup de chapeau à Fela Kuti, mais c’est une toute autre histoire.
Les doux délires hallucinatoires des Ångströmers sont toujours présents, mais ils ne gênent aucunement l’expression puissante de Chouk Bwa. Bref, il s’agit d’une étude non pas sur les contrastes, mais plutôt, de manière rafraîchissante, sur la coopération créative.