Earthworks se présente comme «un enfant de l’amour entre le land art, l’activisme environnemental et la musique concrète». C’était à l’origine la bande sonore d’une installation intitulée «Planetary Home Improvement; From Just-in-time to Geological Time». Ce n’est pas simple de rendre justice à une installation, une œuvre qui existe dans un espace défini et dans laquelle on peut généralement déambuler, par un enregistrement. Le compositeur et percussionniste Nathan Davis y parvient cependant très bien – peut-être est-il préférable d’utiliser des écouteurs pour avoir véritablement l’impression d’être au milieu d’un vaste espace artificiel.
Ça peut rappeler la musique de Pierre Mercure pour le film La forme des choses (1965) de Jacques Giraldeau. Mais l’œuvre de Davis est très calme de bout en bout, et on pense inévitablement à la technique visant à déclencher un processus de «réponse autonome sensorielle méridienne» (c’est la traduction qu’offre le Grand dictionnaire terminologique du Québec de l’expression «autonomous sensory meridian response – ASMR »). Dès le départ, la voix de Syvlia Milo chuchote. Elle murmure les noms d’objets qui entrent dans la construction d’une maison : «Galvanized steel sheet. Foam insulation. Polycarbonate panel»… Le texte qu’elle récite est une adaptation des instructions trouvées dans des vidéos de rénovation, et les sons qui l’accompagnent sont à l’avenant : forage, fracturation, raclage, fissuration, éclatement, martelage… Mais toujours de façon très atmosphérique.
En plus des échantillonnages réalisés et agencés par Davis, on peut aussi entendre, sans forcément les reconnaître, des interventions de ses collègues du International Contemporary Ensemble : Katinka Kleijn (violoncelle), Levy Lorenzo (percussion), Josh Modney (violon) et Joshua Rubin (clarinette). Le projet est une réflexion sur le fait que c’est peut-être la terre, notre ultime maison, qu’il faudrait maintenant commencer à rénover… La vidéo est sans doute plus explicite à ce sujet, mais le travail de Nathan Davis sur le son et sa mise en espace est impressionnant.