Après avoir fait escale dans ces derniers opus à Curaçao et à Buenos Aires, la pianiste canadienne de renommée internationale Louise Bessette pose sa valise – et son piano – chez nos voisins du Sud. Pour ce nouvel opus des pérégrinations pianistiques de sa série Un piano autour du monde, Bessette nous emmène à Concord, Massachusetts et Danbury, Connecticut, sur les traces de Charles Ives pour nous présenter une œuvre phare du compositeur, sa Sonate pour piano no 2, sous-titrée « Concord Mass ». Figure emblématique de la musique moderne américaine du début du XXe siècle, Ives est un compositeur au style particulier, composite et avant-gardiste. L’année 2024, qui marque son 150ᵉ anniversaire de naissance, est le prétexte idéal pour découvrir une partie de son répertoire et de son univers musical. Et quel univers qu’est celui-ci!
Organisé selon la forme traditionnelle de la sonate avec ces quatre mouvements, chacun pour le nom de poètes rattachés au transcendantalisme, ce mouvement politico-religieux basé à Concord qui postulait que « toute expérience peut mener à une connaissance de l’Univers ». Son évoqué respectivement dans chacun des mouvements Ralph Waldo Emerson, Nathaniel Hawthorne, Bronson et Louisa May Alcott ainsi qu’Henry David Thoreau. Ives est un compositeur dont l’œuvre est marquée par une grande expérimentation, par l’éclatement des formes et des styles et des passages hétéroclites. Ainsi, on entend en citation le fameux motif de la Cinquième symphonie de Beethoven à plusieurs reprises au détour de changements de métriques, de textures atonales et d’envolées lyriques que Louise Bessette maîtrise avec érudition, livrant chacun des éléments avec précision et sensibilité. Isaac Chalk (alto) et Jeffrey Stonehouse (flûte) complémentent l’œuvre, respectivement dans des interventions au premier et dernier mouvement, marqué comme optionnel dans une version manuscrite révisée en 1947 par le compositeur.
D’un style et d’un caractère radicalement différents, voire même plus champêtres, les New England Idylls d’Edward MacDowell sont des tableaux sonores colorés qui amènent des éléments de contraste à ce disque/carnet de voyage à deux extrêmes de la tonalité au tournant de la modernité qui est, vraiment, une expérience en soi.