Louis Cole fait partie de l’écosystème jazzistique mené par le saxophoniste Kamasi Washington, fondé dans les années 2000 en compagnie de Thundercat, Miles Mosley, Cameron Graves et de nombreux autres. Des créateurs qui voulaient mélanger le jazz à des musiques plus pops : funk, hip-hop, R&B, dans une ambiance sud-californienne urbaine.
Louis Cole est d’abord un batteur, devenu multi-instrumentiste, puis compositeur et arrangeur. Il se réclame autant des Beach Boys et de Stevie Wonder que du jazz expérimental. Nothing est son cinquième album solo, réalisé avec la collaboration du Metropol Orkest basé aux Pays Bas. Depuis huit décennies, cet orchestre symphonique s’est fait une spécialité d’accompagner des musiciens pop ou jazz, d’Elvis Costello à Jacob Collier en passant par Snarky Puppy et Brian Eno.
Dirigé par le britannique Jules Buckley, le Metropol Orkest ne se contente pas d’accompagner les artistes. Il transforme souvent leur musique par des arrangements audacieux, qui sont complètement différents d’un artiste à l’autre.
Pour Nothing, la fusion entre Louis Cole et l’orchestre est totale, pour ces dix-sept morceaux dont la durée varie d’une minute vingt-quatre secondes à onze minutes et onze secondes. À part deux reprises d’anciennes chansons, tout le matériel de cet album est original.
Nous passons d’une musique orchestrale éthérée à du funk prog que Robert Fripp, le guitariste fondateur de King Crimson, ne désavouerait pas. Au centre de cette proposition, on trouve aussi la voix de Genevieve Artadi, omniprésente sur tout l’album, qui travaille avec Cole depuis plus d’une décennie.
Nothing démontre les ambitions de Louis Cole de faire une musique de plus en plus complexe, tout en offrant des refrains accrocheurs et, parfois, des musiques dansantes. Chose certaine, cet album est tout sauf Rien (Nothing). Louis Cole semble éprouver du plaisir à choisir des titres qui n’évoquent rien : Who Cares, Doesn’t Matter, It All Passes. Humour noir ?
L’album n’est pas parfait. Pour une rare fois, j’ai trouvé certains arrangements du Metropol Orkest trop appuyés, pas très subtils. Il y a des longueurs sur certaines pièces. Mais, dans l’ensemble, il s’agit d’une expérience fort réussie, qui demande une écoute approfondie. Louis Cole et l’Orkest ont tourné et tourneront en Europe. Pour l’Amérique du Nord, ça reste à voir. Espérons !