Rassemblés dans le projet Enemy Radio, Chuck D, DJ Lord, The S1W (Security of the First World) et Jahi proposent l’album Loud Is Not Enough. Pas grand-chose différencie Public Enemy (légendaire groupe hip-hop de Long Island, New York, créé dans les années 1980) d’Enemy Radio, un projet parallèle de Chuck D : on a changé l’un des leaders de Public Enemy, Flavor Flav, pour le MC Jahi, basé à Oakland. Il faut certainement ajouter qu’Enemy Radio, tout comme Public Enemy, se nourrit du old-school hip-hop. On ressent par ailleurs une sensibilité certaine pour le reggae sur la chanson Food As A Machine Gun, à laquelle participe Flavor Flav. « Eat it up, eat it up / They eat it, they don’t need it », envoie-t-il sur un amalgame de rythmes rap et reggae, en appui à la voix grave de Chuck D. L’apport relativement sommaire de Flavor Flav consiste en fait à livrer quelques ad-libs qui servent de hook dans le morceau.
Ce nouvel album n’a rien de transcendant. Il ressemble à de nombreuses œuvres offertes au fil des ans par divers rappeurs. Certes, l’accrocheur morceau Food As A Machine Gun devrait plaire à beaucoup de mélomanes amateurs du genre, mais au moins le tiers des dix morceaux de cette production manque d’originalité. C’est le cas de STD et de Same God. Le départ est bon, mais ça trébuche un peu durant la performance. Les autres pièces sont somme toute assez musclées et réussies. On pense à Born Woke, Man Listen et la jazzy Lock Your Wheels. En filigrane de cette œuvre d’une trentaine de minutes, encore ce discours sociopolitique, provocateur et assez intelligent que l’on appose normalement aux écrits de Chuck D et de Public Enemy depuis quelques décennies. On doit mentionner aussi les nombreux passages de scratches (DJ Lord et C-Doc), les beats assez pesants et les textes livrés avec passablement d’aplomb par les rappeurs.
Le stunt publicitaire / poisson d’avril entourant le conflit entre Chuck D et Flavor Flav (ce dernier aurait abandonné le groupe) a piqué la curiosité de plusieurs journalistes et du public à l’endroit de l’album, ce qui est très bien pour une formation (Public Enemy) souvent négligée par les médias, malgré son énorme succès rencontré depuis environ 35 ans.