Revisiter les compositeurs classiques à la lumière des musiques traditionnelles n’a rien de nouveau. Bach lui-même a déjà été passé au prisme de l’Afrique, Mozart à celui du monde arabe et Vivaldi a été ‘’celtisé’’ dans un album assez célèbre paru il y a environ 25 ans (O’Stravaganza). Ici, on explore les sonorités de cordes rustiques du folklore scandinave (semblables à son cousin celtique), mais avec Bach pour la majorité des pièces (Couperin et Lully, entre autres, sont aussi appelés à quelques occasions). Bach est probablement le plus facile de tous les grands compositeurs à adapter. Pourquoi? Parce que la rigueur rythmique et la richesse mélodique de ses compositions fixent une base solide et cohérente sur laquelle apposer les tics, recettes et autres caractéristiques musicales typiques d’un genre ou d’un autre. C’est un peu ce qui se produit ici sur Bach to Folk, avec cette relecture d’extraits de grands titres tels la Suite anglaise no 3, les Suites pour violoncelle nos 5 et 6, la Suite pour orchestre no 3 et la Sonate pour violon no 3. On retrouve également des pièces traditionnelles et quelques compos originales, toutes bien adaptées au style général de l’album.
Bien que les mélodies soient enluminées avec passablement de réflexes rythmiques et harmoniques locaux, le violon traditionnel norvégien (aussi appelé Hardanger fiddle) et le nyckelharpa suédois, additionnés à un violon classique, donnent à l’ensemble une sonorité rugueuse qui ne serait pas du tout hors champ dans un concert de baroqueux. Les arrangements sont agréables et donnent surtout la forte impression d’éviter à tout prix la facilité et le stéréotype, bien que certaines oreilles n’échapperont pas à l’envie de poser ce diagnostic. L’attitude ici est classique et respectueuse de la nature savante du matériau d’origine et de la richesse artistique du matériau folklorique.