Était-ce pessimiste d’appréhender le quatrième album d’Half Moon Run? Ayant grandi sur leurs deux premiers et bien aimé leur troisième, j’avais peur que le trio montréalais n’atteigne pas les sommets mélodiques et harmoniques qu’on leur connaissait. On dirait aussi que la sortie d’un quatrième album est toujours plus banale que ceux qui peuvent entrer dans une trilogie… Leur premier album les a révélés, leur second les a confirmés, et leur troisième a étendu leur portée. Que serait donc le rôle de leur quatrième? Une évolution? Une stagnation? Après toutes ces questions, on remarque finalement que sur Salt, le groupe tente de retourner vers un son plus épuré, et qu’il était inutile de s’inquiéter pour eux.
L’album est réalisé par Connor Seidel, nouvel ami du groupe suite à leur collaboration sur 1969 Collective l’an passé. Le tout commence sur un ton intéressant avec You Can Let Go, qui met en vedette une cadence vocale saccadée et sèche du chanteur Devon Portielje sur un rythme effréné. Or, on retrouve bien vite le groupe qu’on connaît lorsqu’arrive le refrain et ses harmonies. Il s’agit bel et bien d’un album d’Half Moon Run, se dit-on. Mais certains morceaux réussissent tout de même à surprendre. Par exemple, Hotel in Memphis est un morceau pop à la percussion lourde et grave qui présente quelques cordes dissonantes. Bifurcation intéressante. Un peu plus tard, 9beat capte l’attention avec son rythme irrégulier accentué par une percussion minutieuse. Ensuite, le trio relâche un peu l’accélérateur pour nous présenter les réels propulseurs de ce nouveau projet, soit la douceur, l’émotion et un magnifique orchestre.
C’est un son merveilleux que présente ce quatuor de cordes lointain, aérien et mystifiant qui souffle sur la majorité des chansons. Everyone’s Moving Out East, Heartbeat, Gigafire et Crawl Back In sont particulièrement renforcées par cet élément, autant dans leur son que dans leur portée émotive. La forte présence de ces instruments mêlée aux chansons planantes et lumineuses rehausse le ton folk enraciné de l’album, et rappelle l’ère Sun Leads Me On du groupe. D’autant plus que le jeu de guitare et les percussions du groupe pourraient être brevetés tellement ils sont reconnaissables. Cela donne l’impression d’un regard en arrière, d’un retour aux sources avec les outils, le budget, et le public amassés en chemin.