Lous and the Yakuza, c’est Marie-Pierra Kakoma, Belgo-Congolaise née en 1996. Et quel plaisir d’écrire à propos de celle qui réunit à elle seule la pureté et le gore ! Reçue à l’émission musicale culte Taratata fin 2019, Lous était la perle dévoilée par Nagui, présentateur qui en a pourtant vu bien d’autres mais qui était ébahi devant elle. Elle y présentait son premier morceau, Dilemme, produit par l’Espagnol El Guincho, à l’origine du sublime Malamente pour Rosaliá. Elle sort aujourd’hui son album Gore.
Elle est partout, de la presse rwandaise à la maison de prêt-à-porter de luxe Chloé, en passant par Colors (avec le morceau Bon acteur) sur YouTube, et maintenant au Canada. Difficile d’ignorer tous les signaux qui mènent à elle, mais au-delà du phénomène Lous and the Yakuza, sa vie n’est pas plus rose que sa peau est noire. Plutôt « couleur ébène », rouge pourpre et violet profond comme en témoigne la pochette, l’album Gore se pare d’une infinité de couleurs musicales. À se demander « pourquoi le noir n’est-il pas une couleur de l’arc-en-ciel ? » (Solo). Le rap bruxellois lucide qu’elle offre ne peut résolument se réduire à sa sensibilité féminine (« M’appelle pas ma jolie, mon crew est chaud », Tout est gore) tant sa poésie est tirée de la pénombre et peut toucher n’importe quel être humain. Personne n’aura si bien chanté « Une vie de merde, c’est juste une vie de merde » (Dans la hess) qu’avec la soie de sa voix. Sur des musiques mélangeant mélodies trap, RnB et piano classique, ses paroles oscillent entre flow hip-hop et chant des sirènes. Et comme un appel à témoin, son Quatre heures du matin, c’est la face B d’un Balance ton quoi d’Angèle, la cruauté en plus.
Mais qui est Lous ? Si on ne parle pas de pouvoir, on parle de puissance. Puissance des mots, du caractère, puissance esthétique (allez voir ses clips vidéo) et vitale. Et de clore cette bulle gore, avec le morceau Solo. Car si l’on en croit Lous, on naît et on meurt seul, avec entre les deux une vie traversée de désirs, d’amours, de vengeance, de violences et surtout d’indépendance. Le tout contenu par la délicatesse de ne pas s’épancher sur sa propre personne pour en faire un hymne propre à l’humanité.
Et si on s’intéresse à son nom, « Lous », « Solo », « Soul », ces anagrammes illustrent une multiplicité d’univers contenue dans quatre lettres, que l’album Gore décline avec finesse et que son équipe de Yakuza sublime. Enfin, Lous, c’est un symbole, celui du Y et « ses mains levées vers le ciel », l’emblème lourd de sens d’une nouvelle déesse.