Earl Sweatshirt, ancien membre du collectif Odd Future, n’a jamais créé de musique grand public. Il a toujours livré du rap simple, décontracté et indolent. En écoutant ses plus récents albums, on a parfois l’impression qu’il est sur le point de s’endormir après avoir rappé un couplet. Il est également rare que ses chansons durent plus de deux minutes.
SICK! reste conforme à ce mode opératoire. C’est la production, largement assurée par The Alchemist, qui distingue cet album des précédents d’Earl Sweatshirt. On pourrait dire qu’il s’agit d’une sorte de nouveau départ pour Earl Sweatshirt, puisqu’il tâte de certains des sons les plus populaires des cinq dernières années. On dirait une œuvre plus déterminée, avec boucles de piano, basse trap et échantillonnages de soul et de films. Dans 2010, Earl prononce l’éloge funèbre d’une époque où tout était plus simple. La crainte de la COVID pend comme un lambeau de peau morte sur des morceaux comme Visions, Sick! et Tabula Rasa. Ce titre, avec le duo Armand Hammer, est l’un des plus stimulants de SICK!
Certaines chansons ne font pas le poids face à Tabula Rasa ou Lye et semblent un peu bâclées, comme Lobby (int) et la gothico-rugueuse Titanic, avec sa trapitude qui sort de nulle part. La référence à MF DOOM compense toutefois ces éléments aléatoires. Côté paroles, SICK! s’avère très pessimiste, ce qui est sans doute logique puisque Earl Sweatshirt traverse, comme nous tous, cette période de confusion.