Je me retrouve souvent avec des amis et des amis d’amis à écouter certains des grands albums parus dans les années 1960 et 1970. J’abaisse l’aiguille du tourne-disque sur les chefs-d’œuvre qui alliaient la musique de quatuors rock à des mélodies et à des harmonies relevées, ainsi qu’à des textes poétiques et réfléchis. Inévitablement, nous nous lamentons et quelqu’un finit par dire « On ne crée plus de musique comme ça ». Souvent, je rétorque que, même si le folk-rock n’a plus la vigueur culturelle d’antan, il y a Dawes.
Cette formation folk-rock californienne originaire de Los Angeles comprend Taylor Goldsmith (guitares et chant), Griffin Goldsmith (batterie), Wylie Gelber (basse) et Lee Pardini (claviers). J’ai entendu Dawes pour la première fois lorsque North Hills, son premier album, est sorti en 2009. J’ai adoré les chansons, la musicalité et ces paroles qui allaient droit au but. Leur deuxième album, Nothing is Wrong, n’a fait que renforcer ce sentiment. La musique tangue et roule au bon moment et au bon endroit. Je n’ai pas lâché Dawes depuis lors. Et comme tous les grands artistes, les membres Dawes ont fait évoluer leur groupe, repoussant les limites de ce qu’il est et de ce qu’il fait. Ils continuent à renouveler leur répertoire et leurs parutions.
Avec Misadventures of Doomscroller, son huitième album studio, Dawes pose un autre jalon dans son évolution. Misadventures exige de l’auditeur qu’il absorbe tout, du début à la fin. On y trouve des chansons thématiquement liées, dont certaines durent près de dix minutes. Un autre fait que nous avons tendance à déplorer, dans nos conversations musicales : « Est-ce que quelqu’un veut encore faire, ou même écouter, ce genre d’albums? » Inévitablement, quelqu’un affirme en râlant que « personne ne veut d’une chanson rock de dix minutes ». Et, encore une fois, je rétorque qu’il y a Dawes.
Rien qu’en lisant le titre, on a le sentiment que cet album capte l’air du temps. « Vous pouvez empoisonner l’opposition – Savoir quelle guerre déclarer – Vous pouvez faire reluire les prisons – Et y envoyer tous vos détracteurs », entend-on dans Someone Else’s Café. Mais le refrain est plein d’espoir : « Profitons de la compagnie d’autrui – Malgré le désespoir qui point – Est-ce que quelqu’un a une chanson à chanter – Ou une blague à raconter? »
Les chansons semblent décrire la folie, la frustration et la négativité du quotidien, ainsi que ce qu’il en coûte de passer notre vie devant des écrans : « Un désert de ragots – Exigeant des dépôts –-Et pourtant il ne vous laisse que des retraits – Jouant sur nos sens – Avec un millier de lentilles – Visant tout ce que vous avez mangé ou acheté » (Everything Is Permanent). Mais Dawes préserve aussi l’équilibre au moyen d’un message positif, selon lequel il importe de se rassembler et de ne pas laisser ce nouveau monde nous séparer : « Chaque fois qu’on s’assoit ici – Craintifs quant à l’avenir – Il y a une blague là-dedans – Nous devons trouver le moyen d’en rire » (Joke in There Somewhere).
Dawes est un groupe qui se souvient de l’auld lang syne, c’est-à-dire des jours passés. Mais sa musique est créée aujourd’hui, pour aujourd’hui. Alors, abaissons l’aiguille du tourne-disque, pour ainsi dire, sur ce nouvel album. Misadventures of Doomscroller allie la musique de quatuors rock à des mélodies et à des harmonies relevées, ainsi qu’à des textes poétiques et réfléchis. Cet album tangue et roule au bon moment et au bon endroit.