Le Romantisme chinois a conquis le cœur des Occidentaux depuis la création du célébrissime Concerto pour violon ‘’Les papillons amoureux’’ de 1959, écrit par He Zhanhao et Chen Gang. Ce concerto correspond à l’idée que les non-Chinois peuvent se faire des harmonies, des rythmes et des atmosphères d’une musique provenant de l’Empire du Milieu. En l’écoutant, tel devant un documentaire de la BBC, on imagine sans peine les vallées luxuriantes, les montagnes imposantes, les rizières humides, les pagodes innombrables, les chapeaux pointus des paysans et les chefs-d’oeuvre architecturaux de cette civilisation, comme la Grande Muraille ou la Cité interdite. C’est un immense chef-d’œuvre, et même s’il est rempli de clichés, ceux-ci sont construits avec tellement de verve et d’énergie, avec de si attachantes mélodies, qu’on tombe invariablement sous le charme.
La version ici présentée est un arrangement pour orchestre de chambre, réalisée par le chef du Phoenix Orchestra, Claudio Vena. La réduction ne trahit aucun manquement à la riche tapisserie de couleurs de la version originale, mais ce qui fait un peu défaut, et c’est probablement la faute à la prise sonore, c’est la minceur musculaire de l’orchestre dans certains éclats de cymbales, roulement de timbales ou certains passages des vents. Le manque de rondeur, favorisé par une accentuation très nette de la luminosité du violon solo, finit par faire regretter la version pleinement symphonique. Pas tout le temps, loin de là, mais assez pour qu’on y pense.
Pour le violon solo, par contre, c’est autre chose. La Canadienne Angel Wang est une artiste possédant une technique ultra précise, infaillible. Elle déploie aussi une sonorité claire comme du cristal scintillant. Résultat, le violon virevolte comme un rayon solaire espiègle au-dessus de la trame orchestrale.
Six pièces traditionnelles (cinq chinoises et une mongole) poursuivent le voyage avec leurs mélodies toutes simples, joliment arrangées encore une fois par Claudio Vena pour cette formation, et jouées avec grâce et tendresse par Mme Wang. Le même problème de prise sonore se manifeste ici également dans le cas de l’orchestre, qui joue pourtant avec une admirable précision technique et rythmique.
Le programme se termine avec la pièce-titre de l’album, Phoenix Rising de la Canadienne Alice Ping Yee Ho, dont je vous ai déjà parlé dans un autre texte.
LISEZ MON COMPTE-RENDU DE L’OPÉRA CHINATOWN DE ALICE PING YEE HO
La transition entre cette œuvre contemporaine et le reste du programme se fait en douceur, avec une introduction au violon solo et jeu impressionniste de l’orchestre qui rappellent assez parfaitement le style des pièces précédentes. Les harmonies se corsent au bout d’une ou deux minutes, mais ne s’éternisent pas en revenant à la consonance initiale. Puis ça repart un peu,e t ça se poursuit pendant toute la pièce (environ 11 minutes), qui se termine par un crescendo expansif se voulant probablement symbolique de la renaissance enflammée de cet animal mythique, mais qui manque d’incandescence, encore la faute à l’enregistrement.
Un album de très belle musique, et d’excellent music-making, mais qui manque de soutien technologique.