Camille Deléan : Une question d’équilibre

Entrevue réalisée par Jean-François Cyr

Trois ans après son premier 33 tours, Music on the Grey Mile, Camille Deléan propose un bien bel album anglophone au titre évocateur, Cold House Burning. Cette chanteuse franco-ontarienne d’adoption montréalaise a puisé dans son for intérieur pour livrer dix touchantes chansons.

Genres et styles : folk

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Crédit photo : Nathalie Deléan

Au cours de son tracé entre Toronto, Paris, Londres et Montréal, elle a toujours cru qu’elle ne trouverait jamais, justement, de point d’ancrage.

« Quand je suis arrivée au Québec, je ne connaissais personne. Dans ma tête, mon séjour montréalais était temporaire. Je repartais partie de zéro. Je suis restée plus longtemps que prévu. Mais, j’ai mis quelques années à m’entourer de gens que j’apprécie. Finalement, j’ai rencontré Michael Feuerstack [multi-instrumentiste, il avait travaillé sur le premier album avec Camille Deléan et le Britannique Ben Walker]. Il m’a aidée à terminer Music on the Grey Mile. Nous sommes maintenant des amis. Grâce à lui, j’ai réussi à rencontrer d’autres artistes au Québec. »

Ainsi, le second album a été conçu dans un peu plus de stabilité. De l’aveu de la chanteuse, celle-ci savait davantage ce qu’elle cherchait comme son pour Cold House Burning

Crédit photo : Nathalie Deléan

Par ailleurs, elle pouvait compter sur son comparse Feuerstack, qui s’est investi encore davantage sur ce récent album folk, un tantinet rock. En plus d’avoir joué de nombreux instruments au profit des chansons, il en a assumé la réalisation. Les enregistrements ont été faits en bonne partie aux Breakglass Studios.

« Je voulais que la batterie soit plus lourde, mais que l’instrumentation soit plus [raffinée] et plus épurée. J’avais également envie d’explorer davantage les chœurs. Je voulais plus que de simples harmonies vocales; je désirais en faire un élément important pour certains morceaux. Je n’ai utilisé que des instruments nécessaires. Il était important pour moi qu’ils donnent l’impression d’être près du micro, comme ma voix. »  

Outre Feuerstack, Jeremy Gara (batterie, piano), Mathieu Charbonneau (piano, synthétiseur), Philippe Charbonneau (voix, synthétiseur), Joshua Zubot (violon) et Adam Kinner (saxophone) ont également collaboré aux pièces, qui sont d’ailleurs mieux fignolées que celles de la précédente offrande, parue en 2017. Et la voix de Deléan coule, inébranlable, comme celle d’un beau fleuve tranquille.  

Zone à risque de tremblements de terre

Sur l’album, sa voix est ancrée dans l’assurance, douce et très près de nous. C’est comme si la jeune femme nous révélait une part d’elle, toute proche de nous, sans hésitation. Pourtant, elle a douté au fil des ans. Beaucoup. Et cet opus un brin lyrique est justement le testament artistique d’une recherche sérieuse de l’équilibre, physique et émotionnel.

Cela dit, même si Camille réfère aux tremblements de terre pour évoquer l’ambiance de son opus, celui-ci transcende plus la maturité que la fragilité. 

Lors de cette entrevue téléphonique en temps de pandémie, elle a raconté comment son histoire intime imprègne toutes les matières de son disque. Fault Line (Late July), notamment, représente la chanson épicentre de l’album, selon elle. «Tread lightly! Think steady! / Watch your footing around the lines / Or you’re going down », chante-t-elle.

« J’ai beaucoup exploré le thème de l’équilibre, qui ne vient pas naturellement chez moi. En fait, il s’étend partout et à toutes les échelles. […] Les textes de mes chansons en font foi; la musique aussi. Celle-ci est légèrement angoissante. Parfois. J’étais dans cet esprit lors de la composition de l’album, qui date de longtemps avant la pandémie. J’ai toujours eu peur de m’ancrer à un endroit. En plus, j’ai eu des problèmes de santé [qui datent de son enfance], qui m’empêchaient de bouger avec aisance. J’avais peur d’un possible danger. Cette crainte a nourri mon isolement, bien avant la crise de COVID-19. […] Plus on se renferme, plus il devient difficile d’aller vers l’autre, vers l’inconnu (la chanson Afraid of People). »

Comble de l’ironie : dans une période où elle se sentait de mieux en mieux à Montréal, ville où elle est maintenant entourée de personnes qu’elle chérit, son appartement a brûlé à la fin de mai ! Un drame pas si malheureux, finalement, qui a donné tout son sens au titre de l’album, Cold House Burning.    

Camille Deléan, dont le travail rappelle celui du groupe canadien The Weather Station, combat peut-être quelques petites peurs (la triste et plus grave Saturn Gravity), mais elles lui vont très bien comme artiste. 

Mentionnons que Camille Deléan fait partie de la programmation de l’événement Fun House, organisé par Pop Montréal. Elle jouera dimanche, le 7 juin, à 13 h 30.

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