C’est ce qui ressort du spectacle de Defa et Mamy Victory, aka Def Mama Def, hier soir au Ministère, lors de la 38ème édition du Festival Nuits d’Afrique. Le duo explosif féminin sénégalais de l’heure est bien plus qu’un duo, ce sont des soeurs en art. Vêtues d’une combinaison moulante à capuche, lunettes fumées, elles arrivent sur scène accompagnées par Simsa à la batterie et Mr No One aux platines.
Entre rap et chant, les deux artistes se complètent et dialoguent musicalement sur scène. « On n’a presque pas dormi cette nuit tellement on avait hâte », nous confie Mamy Victory, aux cheveux teintés de bleu pour l’occasion. En plus de chanter et rapper, elles dansent parfaitement bien, jouent des percussions, le tout avec une énergie électrisante. « La prochaine chanson est pour les amoureux » nous disent-elles avant de nous enseigner le lembel, une des nombreuses danses du Sénégal.
Devant un public encore timide, elles ont réussi à monter la température dans la salle sur le morceau Jigeen, qui signifie femme en wolof. Justement, elles s’adressent à la foule dans leur langue maternelle à quelques reprises, au grand plaisir des Sénégalais dans la salle. « Cette fois-ci, nous allons au nord du Sénégal », nous avertit Defa, qui nous fait des pas de danse de chez elle tout en faisant chanter le public. Les deux artistes se taquinent beaucoup surtout lorsqu’elles abordent la question épineuse des ethnies. « Y a pas que les Toucouleurs, y a aussi les Sérères », se défend Mamy Victory.
Autre moment fort de la soirée, lors du morceau Oh Maliko, sur lequel tradition et modernité se marient de manière fusionnelle. La deuxième partie du concert s’ouvre avec des percussions, puisqu’elles nous dévoilent leurs talents avec cet instrument. Les deux femmes reviennent sur scène munies de bâtons et on sent tout de suite que le niveau va monter en intensité. La complicité des deux femmes se ressent durant toute la performance. À travers des regards, des sourires, des chorégraphies improvisées, on sent qu’elles ont du plaisir à jouer ensemble, tel un yin et son yang, valsant entre douceur et dureté. Douceur à travers la voix mielleuse de Defa quand elle pousse la note, et dureté par moments lors des raps torrides de Mamy Victory.
Un autre moment électrisant est sans doute lors du morceau Dieuredieuf, paru en 2022, et qui signifie merci en wolof. « On va chanter pour toute l’Afrique », nous annoncent-elles, dans une ambiance aux airs de discothèque. On a même eu droit à une petite séance de cardio durant laquelle elles nous ont fait bouger les bras, avant de revenir aux percussions accompagnées par leur DJ, qui s’y est mis aussi. Mon coup de cœur restera Kalanakh, qui figure dans le EP Oh Maliko, qu’elles qualifient comme « sonnette d’alarme annonçant leur prochain album », lors de mon entrevue avec elles. En effet, 2025 sera l’année de Djar Djar, premier album du duo. Avant de clôturer leur spectacle, elles ont tenu à rendre hommage à tous les artistes qui ont frayé leur chemin avant elles, entre autres Positive Black Soul (PBS) ou encore l’Orchestre Baobab, pour ne nommer que ceux-là. Seule déception : la communauté sénégalaise n’a pas répondu présente en grand nombre pour accueillir les deux sœurs en art, mais on va dire que c’est leur premier concert, sûrement pas leur dernier à Montréal. D’ici là, le bouche à oreille fera son travail, je l’espère.