L’année 2023 marque le 25e anniversaire de l’Ensemble SuperMusique, dont la mission est de se dédier à l’interprétation de musique actuelle et de création, ainsi qu’à la musique écrite, improvisée et aux partitions graphiques. L’ensemble est bien connu sur la scène musicale montréalaise pour son grand talent, son dynamisme, et ses prestations d’une constante grande qualité. Le concert d’hier soir, en co-diffusion avec Le Vivier, a prouvé encore une fois que l’Ensemble SuperMusique se démarque toujours dans son domaine.
Les deux œuvres au programme de la soirée étaient des créations et étaient dirigées par les personnes compositrices elles-mêmes. La première pièce, Versa es in luctum cithara mea… de Vergil Sharkyaʹ rassemblait plusieurs éléments en une seule et même œuvre : instruments préparés et acoustiques, amplification et effets sonores. Comme prélude à la pièce, le compositeur fait rouler des boules de métal sur les cordes de guitare, frappe les cordes avec des brosses lumineuses ou un marteau de piano. Tant de méthodes de jeu inusitées créent un superbe effet sonore, un peu éthéré et presque d’un autre monde. Cette première section nous transporte dans un monde aux sonorités épurées, dans lequel on se concentre sur les différentes manières de produire le son.
La seconde section de l’œuvre mobilise l’ensemble SuperMusique en entier et fait place à de beaux moments d’improvisation collective, sur une base mélodique portée par les instruments graves et les percussions. L’on traverse à nouveau plusieurs tableaux qui dépeignent chacun des ambiances différentes : rythmes et basses, méditation (ou l’on voit trois flûtes traversières basses à l’œuvre!) et un registre que l’on pourrait presque qualifier de science-fiction.
La deuxième œuvre au programme, Monnomest (« mon nom est »), de Joane Hétu, est une longue œuvre en trois mouvements et plusieurs tableaux dédiée à Rémy Bélanger de Beauport, créateur et violoncelliste, qui a été agressé en octobre 2020 à Québec lors de ce que l’on appelle maintenant « l’attaque au sabre ». L’œuvre se construit autour d’un thème qui épelle musicalement le nom de Rémy Bélanger de Beauport, thème se métamorphosant au fil de l’œuvre, mais étant toujours reconnaissable, en filigrane.
En plus d’impliquer, bien sûr, une part d’improvisation instrumentale, 7 interprètes prêtent également leur voix à l’œuvre. Cet élément ajoute une texture supplémentaire à une pièce à la composition déjà très riche. Chaque instrument a l’occasion de prendre l’avant-scène et cela permet de mesurer tout le talent de l’ensemble. Monnomest est une œuvre guidée par de magnifiques moments mélodiques et des instants d’introspection.
Ce concert a été construit avec attention, avec une scénographie qui invitait à l’écoute totale et complète. Les deux pièces se mariaient parfaitement et s’inscrivaient dans une continuité l’une de l’autre. Les moments d’improvisation ont été à couper le souffle et l’on est admiratifs devant la cohésion de l’ensemble.