Depuis 2015, Le Vivier chapeaute le Vivier Interuniversitaire (ViU), un regroupement qui vise à créer des liens entre les différentes institutions d’enseignement supérieur en musique à Montréal, dans le but de stimuler et de rendre visibles la relève et ses créations. Hier soir avait lieu le 8e concert annuel du ViU, lequel a donné lieu à des découvertes intéressantes et surtout très diverses.
Les six œuvres au programme étaient destinées à des formations musicales diverses. La première, Canción de Tomás Díaz Villegas, était pour trompette, accordéon, deux violoncelles et chef d’orchestre. On remarque le grand contrôle de tous les instrumentistes, en particulier lors des moments pianissimo. La trompette est à l’honneur, avec des lignes mélodiques qui prennent l’avant-plan, alors que les trois autres instruments accompagnent. L’accordéon fait, acoustiquement, le lien entre trompette et cordes avec sa sonorité complexe, et ajoute une autre dimension à l’œuvre. Composition très bien pensée.
La deuxième pièce, As The Light Shines Through de David C. Gale, pour électronique, ne demande pas de présence sur scène. On lance l’enregistrement sonore, et le public écoute, recueilli, dans la salle plongée dans la quasi-obscurité. Il s’agit d’une œuvre spatialisée, avec une ambiance sonore en trois dimensions. Très évocatrice, cette œuvre explore les sonorités. Un battement stable est entendu tout au long de l’œuvre, mais ce battement se transforme, se développe et bouge dans la pièce. Cette œuvre est troublante, dans le meilleur sens du terme.
Studies for the Second Womb, de Yulin Yan, est probablement la pièce la plus déroutante du programme. S’inspirant de l’expérience sensorielle universelle (mais oubliée) du moment passé dans le ventre de notre mère, cette œuvre est composée de bruits, onomatopées, cliquetis, échos et souffles, en partie produits par les interprètes, en partie diffusés sur haut-parleurs. Le saxophone et le violoncelle sont à l’honneur, mais surtout pour produire des sons qui sortent du répertoire traditionnel de ces instruments respectifs.
L’œuvre de Philippe Mcnab-Séguin, Generic Music 1 : Trad, est celle qui a suscité le plus d’enthousiasme de la part du public, et pour cause : il s’agit d’une œuvre surprenante, qui joue avec nos attentes du répertoire de musique traditionnelle québécoise. Cette composition mixte allie une bande sonore avec laquelle la violoniste solo joue. Lorsque l’on pense savoir où se dirige la mélodie, on bifurque pour aller totalement ailleurs. On passe ainsi par la musique trad, bien sûr, avec une grande virtuosité violonistique, qui évoque les réels et autres danses folkloriques du Québec. Mais on explore aussi le rock prog, en passant par le métal avec des distorsions et rythmes effrénés.
Ramification de Hannah Barnes est une pièce pour percussionniste seul. Derrière une installation de tambours, gongs et carillons, l’interprète nous emmène dans un monde d’explorations sonores. On entend des bruits fantomatiques et des sonorités qui semblent sorties d’une trame sonore de film de science-fiction. Il y a également de beaux moments de contemplation, suivis d’instants frénétiques.
Enfin, Insides de Florence M. Tremblay est interprété par un quatuor à cordes. Cette œuvre, qui explore l’utilisation des quarts de ton, demande à chaque interprète de s’accorder différemment. L’œuvre débute par de longs sons tenus, d’accords qui changent et évoluent lentement. On salue l’immense contrôle de chaque interprète : les notes sont stables, impeccablement stables, malgré les nuances très douces et les dissonances. L’œuvre se termine sur des gammes chromatiques, où les instrumentistes se retrouvent ensemble pour une fraction de seconde, une fois de temps en temps.
Le programme très varié de la soirée a su démontrer les différents modes d’expression en musique actuelle. Les œuvres ont été portées par des interprètes remarquables, tout au long du concert. On a hâte de voir se développer la carrière de cette brillante relève.