Pour son 10ème, le Festival afropolitain nomade est de retour à Montréal

par Sandra Gasana

 « Gestion et développement de projets culturels, une approche afro-féministe. » 

Tel était le thème de la 2ème journée du volet professionnel du Festival afropolitain nomade, qui rassemblait sur une même scène des professionnels de l’industrie culturelle provenant du Québec, du Brésil et du Cameroun, sous l’animation de Marina Mathieu. Jaqueline Fernandes a brisé la glace. Originaire de Brasilia, au Brésil, elle est gestionnaire culturelle, elle fonde le Festival Latinidades en 2008, et continue son activisme pour la cause des femmes noires au Brésil, encore trop invisibles dans le milieu de l’art. 

« Au Brésil, on nous invite dans les festivals pour parler de racisme, alors que dans la salle à côté, on discute de business », raconte-t-elle. En plus du festival, Jaqueline a créé l’Instituto Afrolatinas qui fait de la recherche en recueillant des données.

 « Les données sont les seuls moyens de prouver ce que nous vivons, ces données deviennent des faits, puis s’opèrent les transformations ». 

Dalila de Carvalho est du même avis. Montréalaise et originaire du Brésil, Dalila est sociologue, immigre à Montréal en 2013 et se penche pour son doctorat sur l’insertion des musicien.ne.s immigrant.e.s dans la « musique du monde ». En abordant les tendances qui ressortent de ses recherches doctorales, elle insiste tout comme Jaqueline sur l’importance des données, puisqu’il n’en existe pas beaucoup sur le sujet. 

Retraçant l’historique de l’appellation «musique du monde», son travail consiste à  faire ressortir les rapports inégaux qui existent à l’intérieur de cette catégorie. « La musique du monde permet de faciliter la circulation des artistes, à travers les festivals par exemple, mais ensuite ils retournent dans leur pays d’origine », affirme-t-elle.

Elle distingue cependant cette réalité de celles des artistes montréalais qui sont cantonnés dans cette catégorie trop générale, qui vient diluer leurs spécificités. « Les critères de musique ne devraient pas être basés sur l’origine de l’artiste mais bien sur le style de musique », conclut-elle. Toutefois, elle propose de ne pas tout simplement supprimer cette catégorie « sans d’abord comprendre la logique qui l’a créée ». 

Le terme « diluer » est revenu dans les propos de Louise Abomba, originaire du Cameroun. Venant du milieu du hip-hop, elle se présente comme activiste culturelle et accompagne de jeunes artistes en arts plastiques, en danse, en théâtre afin qu’ils atteignent leur plein potentiel et que « leur fragilité devienne une force ».

Après 20 ans passés dans le mouvement culturel, elle insiste sur la notion de « redéfinir les narrations ». Oratrice hors-pair, elle donnait des frissons à la salle à chacune de ses prises de parole. « Le savoir-faire, on connaît. Mais c’est le savoir-être qui est le plus important. Nos narrations sont diluées, nous devons repartir à la source. » 

Cette redéfinition des narrations, l’artiste la voit comme une possibilité de nous repositionner. Elle rappelle notamment aux femmes artistes l’importance de travailler ensemble puisque l’art transcende tout et devient un vecteur de dignité. Elle a pris le temps d’ouvrir la cérémonie en partageant un rituel tout droit venu de son Cameroun natal, et a clôturé l’activité en envoyant de la force à chacune des femmes sur la scène.

« Au Brésil, de plus en plus de festivals s’intéressent à l’Afrique alors que d’autres, beaucoup plus gros, n’ont  aucun intérêt. Après la pandémie, nous avons connu une crise dans le milieu des festivals », nous partage Jaqueline.

« La bureaucratie est devenue difficile, tout a pris de la valeur, les billets d’avion sont plus chers », donne-t-elle en exemple. Selon elle, les festivals qui vont survivre sont ceux qui sont plus nichés, puisqu’ils mettent en valeur les identités, la diversité. « Le futur de l’industrie est dans ces festivals », conclut-elle, avant d’énumérer une liste de festivals à surveiller.

La quatrième panéliste, Diane Gistal, est Montréalaise d’origine haïtienne. Elle est gestionnaire culturelle, elle est née et a grandi en France, de parents passionnés d’histoire et de culture. Elle fait des études en histoire et en littérature avant de se tourner vers les arts visuels, ce qui la conduira plus tard à la direction de Nigra Iuventa, une organisation à but non lucratif dédiée à la promotion de la scène artistique afrodescendante et africaine.

Questionnée sur le manque de représentativité dans les cercles de pouvoirs auxquels elle a accès, Diane préfère parler des exemples de leadership au féminin qu’elle côtoie au quotidien. « Je crée les espaces dans lesquels je veux évoluer, je m’entoure de femmes comme Veeby, avec toute leur authenticité, et qui ont la force de se déployer pleinement ».Si nous avons déjà toutes ces émotions durant le volet professionnel, comment seront les concerts du 30, 31 mai et 1er juin ?  À suivre dans un texte à venir !

4100 milliards d’écoutes de chansons en 2023… bonne nouvelle pour les artistes?

par Luc Tremblay

Luminate, organisme auparavant connu sous le nom de Nielsen SoundScan, a rendu public cette semaine son rapport d’analyse de l’industrie musicale en 2023. Sans surprise, c’est l’écoute en ligne qui domine le marché.On diffuse beaucoup de musique, mais c’est toujours la misère pour la majorité des artistes. C’est La misère des niches, pour reprendre le titre d’un essai de notre collègue Alain Brunet, paru en 2018.

Le rapport en donne un exemple probant.

Pour consulter de le rapport de Luminate, c’est ici

Jetons d’abord un coup d’oeil aux faits saillants de ce rapport:

  • En 2023, il y a eu 4100 milliards d’écoutes audio en ligne sur Terre, c’est 22,3% de plus que l’année précédente.
  • Si on additionne les écoutes vidéos aux écoutes audio, on obtient 7100 milliards d’écoutes en ligne, une augmentation de 33,7%.
  • Sans surprise, c’est Taylor Swift qui domine le marché avec 1,79% de toutes les écoutes en ligne.
  • Le genre musical dominant aux États-Unis est le hip-hop (25,5 % de l’écoute), suivi du rock (19,9%) et de la pop (12%)
  • Au Canada, la croissance est un peu plus faible:
    • 130 milliards d’écoutes audio en ligne,soit  une croissance de 15% par rapport à 2022.
    • 145 milliards d’écoutes audio et vidéo en ligne, une croissance de 18,3%
  • La vente d’albums est toujours marginale. Au Canada, il s’est vendu 5,1 millions d’albums (physiques et numériques), une baisse de près de 2%

Au-delà de Taylor Swift, qu’est-ce qu’on écoute?

Du vieux stock. Le répertoire des chansons âgées de 18 mois et plus occupe 73% de l’écoute.  Le mélomane moyen passe la grande majorité de son temps à écouter ce qu’il connaît.

Une industrie où les blockbusters dominent

La pyramide des écoutes en ligne présentée ci-haut nous offre un cliché spectaculaire de l’emprise des blockbusters sur le marché. On y observe :

  • 184 millions de titres sont sortis en 2023
  • De ce nombre, 160 millions de chansons ont toutes obtenu moins de 1000 écoutes, ce qui génère un revenu moyen de 4$ *
  • 436 000 chansons ont été écoutées 1 million de fois ou plus, cd qui représente à peine 0,2 pour cent de la production. Un million d’écoutes, c’est un impact important,  l’équivalent 100 000 albums vendus à l’époque pré-streaming **. Or, la rémunération obtenue par l’artiste est de 4000$. Même si l’on parvient près du sommet, l’air se fait rare. En somme, pour 99,8% de la production, il n’y a pas de modèle économique viable.

L’anglais toujours dominant mais en régression

Par ailleurs, on note deux statistiques intéressantes dans ce portrait de l’année 2023:

  • L’hégémonie américaine décline. En deux ans, l’écoute de chansons en anglais est passée de 67% à 55% au profit de la production en hindi qui, dans la même période, est passée de 4 à 8%. Le marché indien de l’écoute en ligne est en pleine croissance. 
  • Les jeunes américains s’ouvrent sur le monde. 63% des membres de la Génération Z et 65% des milléniaux déclarent écouter de la nouvelle musique pour découvrir de nouvelles cultures. Dans un monde où le repli sur soi et la peur de l’autre, de l’étranger semblent gagner du terrain, on verra cet attrait comme une bonne nouvelle.

Le portrait de l’année 2023 de Luminate confirme une tendance lourde en musique; cette forme d’art accroît son rayonnement mais, paradoxalement, cela ne profite pas aux auteurs, aux compositeurs, aux interprètes.

*L’emploi du revenu moyen est justifié par le fait que les droits d’auteurs varient d’un pays à l’autre, il est généralement convenu d’utiliser un taux moyen de 4$ par 1000 écoutes.

**Pour les fins de l’exercice nous utilisons le chiffre de 10 chansons par album. Donc un million de chansons divisées par dix = 100 000 albums.

Crise des médias: après Meta et Google, pourquoi pas Bell, Rogers et Telus?

par Luc Tremblay

La plateforme PAN M 360 est née de la crise et dans la crise des médias… qui revient nous hanter dans l’actualité. Les coupes drastiques de la télévision traditionnelle chez TVA et la réduction budgétaire de CBC/Radio-Canada nous remettent sur le nez cette crise amorcée depuis trop longtemps déjà… et dont nous ne voyons pas la sortie. C’est pourquoi nous réfléchissons très fort à un avenir plus radieux que celui qui se présente à nous… sans solutions viables.

Professionnel du développement stratégique des grands médias depuis les années 80, notre collaborateur Luc Tremblay s’est joint à PAN M 360 pour participer avec nous au chantier des nouvelles plateformes de référence. À notre effort de réflexion, il suggère une série d’analyses sur l’actuelle crise des médias.

Les projets de loi C-18 et C-11, qui encadrent les acteurs  internationaux du numérique exploitant le marché canadien, commencent à se mettre en place. On ne peut douter de leur impact positif sur la visibilité et le financement de la production d’informations et de contenus canadiens et d’information à moyen terme. 

Mais ce ne sera pas suffisant. L’attrition des revenus des médias traditionnels va se poursuivre. Inexorablement. 

Pour aider à la transformation numérique, stimuler la production d’ici et compenser les travers du nouvel ordre, il faut urgemment trouver d’autres sources de financement que la vente de publicité traditionnelle. 

Vers qui se tourner ?

Les grands principes qui ont conduit à la création du Fonds des médias du Canada doivent être repensés pour y inclure les services internet et de mobilité. En effet, plusieurs arguments militent en faveur de l’option de mettre les géants canadiens des télécommunications à contribution. Ces derniers engrangent des profits exponentiels grâce à leur posture d’oligopole. 

En 2022, Bell, Telus et Rogers ont généré plus de six milliards de bénéfices. Intégrés verticalement les groupes médiatiques les plus importants au pays ne viendront pas s’asseoir devant le CRTC et y proposer de prendre une partie de leurs profits pour la redistribuer aux producteurs de contenus vidéos, de musique, et de journalisme. C’est une évidence. 

Alors voyons pourquoi il faut les forcer à le faire.

Du propriétaire artisan au conglomérat

Il faut remonter au milieu des années 1990 pour comprendre comment nous en sommes arrivés à la situation actuelle. Les entreprises médiatiques étaient alors, pour la plupart, contrôlées par des propriétaires entrepreneurs, capitalistes assumés mais également artisans du métier. Des patrons près de leurs opérations, exigeants quant au rendement financier mais assez facile d’accès et ayant en général une bonne compréhension des enjeux d’affaires spécifiques de leurs propriétés.

Les premiers changements se manifestent au milieu des années 1990, lorsque les canaux spécialisés ont pris leur envol en télévision et que la multipropriété en radio a été permise, la valeur des organisations a été multipliée par 5, parfois plus. On était soit vendeur ou acheteur. La première vague de consolidation a créé des entreprises ayant des milliers d’employés et détenant des actifs concentrés en radiodiffusion, en affichage extérieur, ou en production de contenu.

Astral, CHUM, Corus pour nommer les plus importants, étaient des joueurs avec de grosses capitalisations boursières, exclusivement dédiés à l’exploitation de médias dont les moindres gestes étaient surveillés par les analystes financiers. Les règles des marchés boursiers faisaient leur entrée dans la conversation. Toute une industrie apprenait, un peu fascinée, le jargon financier : résultats trimestriels, BAIIA, bénéfice par action. 

Puis, avec les transactions sont venues les synergies, économies d’échelle et autres rationalisations. Nous vivions un premier choc. Le centre de décision s’éloignait des opérations, des directions de programmation, des artisans, des artistes, des rêveurs.

De plus en plus contrôlés par des actionnaires préoccupés par la valeur de l’action, et non plus par des artisans comprenant les aléas d’un métier soumis à la dictature de la créativité, aux modes, aux humeurs des artistes et à l’actualité, les comités de direction des empires médiatiques ont adopté l’approche de courte vue de la gestion trimestrielle.

Les géants des télécommunications (telcos) font des emplettes

À compter du début des années 2000 et pendant la dizaine d’années qui ont suivi, des transactions importantes ont modifié le paysage : Québecor a acquis Vidéotron et TVA, Rogers a fait de même avec CHUM, Bell a mis la main sur AAstral, Cogeco sur les actifs de Corus au Québec.

Les géants des télécommunications (telcos) sont devenus des joueurs intégrés verticalement : fournisseurs de câblodistribution, de services internet et de mobilité et grands propriétaires de média. La donne a radicalement changé. Non seulement, les médias étaient maintenant soumis à la pression de la gestion au rythme des résultats trimestriels, mais encore, faisant partie de groupes gigantesques, ils n’étaient plus au centre de la conversation. Importants certes, mais plus au centre. 

Mis à part leur rendement financier, les divisions médias étaient intéressantes pour les telcos parce qu’elles devenaient un formidable mégaphone pour vendre de la bande passante et des téléphones. Dans chacun de ces grands groupes, par leurs revenus, leurs profits, leurs nombres d’employés, les médias sont, au mieux, mineurs, souvent marginaux, parfois carrément accessoires, de plus en plus une distraction. 

On s’en occupe quand on a le temps. On a d’autres chats à fouetter : bâtir des infrastructures pour desservir les communautés des régions, maintenir ses technologies de télécommunication à la fine pointe, ou encore justifier les différences tarifaires avec l’Europe. Or, en tant que média, si vous devez vous adapter à la plus grande révolution technologique de notre époque, ce n’est pas une approche garante de succès. On ne traverse pas la mère de toutes les tempêtes en naviguant à temps partiel.

L’espoir déçu

Le passage des groupes médiatiques sous le contrôle des telcos avait suscité des attentes et de l’espoir dans l’industrie. Des propriétaires aux poches profondes, champions de technologies, n’était-ce pas la meilleure solution pour garantir une transition numérique structurée, soutenue par la compétence et du capital abondant ?

L’année 2023, dominée par des annonces de coupures toutes plus spectaculaires les unes que les autres, est le point culminant d’une approche de courte vue qui ne se dément pas depuis dix ans : les telcos gèrent leurs divisions médias en leur imposant une rigueur budgétaire qui ne laisse que peu de place à l’innovation, et surtout peu ou pas de moyens, alors que la situation exige précisément le contraire.

Force est de reconnaître que les entreprises de télécommunications n’ont pas livré la marchandise pour les médias. Pire, elles ont évacué le talent qu’on y trouvait à force de coupures et de rationalisation.

Un nouveau fonds à la mission élargie

Le moment est venu d’adopter une approche différente. Le Fonds des médias du Canada  (FMC), reconfiguré à partir du fonds de production de la câblodistribution, fut érigé sur une prémisse dont l’évidence crève les yeux : les câblodistributeurs faisaient des profits en distribuant le contenu télévisuel sans contribuer à son financement. 

Le FMC a corrigé cette situation et contribué à l’essor de la production canadienne. Ce fonds souffre maintenant d’un problème systémique : la désaffection des services de câblodistribution. Avec la diminution du nombre d’abonnés à ces services, causée par le mouvement inverse vers les plateformes sur demande, les fonds ne cessent de diminuer.

Le principe fondateur du fonctionnement du FMC devrait être désormais appliqué aux fournisseurs de service internet et de mobilité. Une large part de leur bande passante sert aujourd’hui à consommer des contenus vidéos et audios. Si l’exploitation du canal de distribution télévisuel (la câblodistribution) vient à avec des responsabilités de contenu, comme l’industrie et le CRTC en ont convenu il y a 30 ans, pourquoi en irait-il autrement pour les services internet et de mobilité ?

Un pourcentage des revenus des fournisseurs de service internet et de mobilité (en câblodistribution, c’est un peu plus de 4%) devrait être perçu par  le FMC. On réglerait ainsi le problème de l’érosion des revenus du Fonds. Mieux encore, pourrait-on injecter de l’argent supplémentaire à une industrie affamée.

Mais nous ne devrions pas limiter l’utilisation de ces fonds à la production de contenu audiovisuel. Si la presse et la télévision sont frappées de plein fouet, depuis vingt ans les artistes œuvrant en musique ont souffert. Leurs œuvres sont diffusées en continu jusqu’à plus soif sur les plateformes, mais ils n’en récoltent que de maigres revenus. 

L’implantation d’une telle mesure pour corriger l’iniquité du nouvel ordre numérique en musique en injectant quelques dizaines de millions de dollars dans la production musicale canadienne serait plus que bienvenue.

Crise des médias | À propos de Radio-Canada

par Luc Tremblay

La plateforme PAN M 360 est née de la crise et dans la crise des médias… qui revient nous hanter dans l’actualité en cette fin d’année. Les coupes drastiques de la télévision traditionnelle chez TVA et la réduction budgétaire de CBC/Radio-Canada nous remettent sur le nez cette crise amorcée depuis trop longtemps déjà… et dont nous ne voyons pas la sortie. C’est pourquoi nous réfléchissons très fort à un avenir plus radieux que celui qui se présente à nous… sans solutions viables.

Professionnel du développement stratégique des grands médias depuis les années 80, notre collaborateur Luc Tremblay s’est joint à PAN M 360 pour participer avec nous au chantier des nouvelles plateformes de référence. À notre effort de réflexion, il suggère une série d’analyses sur l’actuelle crise des médias.

Depuis des décennies, l’idée de cesser la vente de publicité à la Société Radio-Canada (SRC) revient occuper l’espace public avec une régularité métronomique. Dans le contexte de la crise actuelle, elle est reprise avec plus d’insistance. 

Ses tenants arguent que les 450 millions de dollars en revenus publicitaires actuellement touchés par la SRC seraient automatiquement transférés vers les diffuseurs privés, et que cela mettrait fin à la dépendance de la société d’État envers un marché de la pub devenu incompréhensible. On dit aussi que la SRC pourrait enfin échapper aux pressions des cotes d’écoute, nécessaires pour tirer son épingle du jeu auprès des annonceurs.

Et tiens, tant qu’à y être, la société d’État se recentrerait sur une nouvelle interprétation de sa mission de diffuseur public : produire du contenu plus pointu que les médias privés ne proposent pas faute de potentiel commercial. Qui a dit qu’un diffuseur public devrait s’inscrire dans la marginalité ?

Pour s’opposer à une telle mesure, deux arguments prévalent.

On invoque que le coût serait trop important pour l’État canadien, et qu’une plus grande dépendance de la société envers les fonds gouvernementaux la mettrait à la merci du politique. 

Au premier des deux, opposons le modèle de la BBC qui reçoit au Royaume-Uni un financement public quatre fois plus important per capita que la SRC. La qualité de son contenu, que ce soit en documentaire, en fiction ou en information, son impact dans la société britannique, ses innovations technologiques (rappelons que la BBC savait faire de l’écoute en continu avant Netflix avec son fameux iPlayer!), en font un standard à l’international.

Certes, la BBC n’échappe pas aux difficultés liées aux perturbations actuelles, ou à la démagogie d’un Boris Johnson qui a gelé son financement voilà deux ans. Mais s’inspirer d’un modèle qui fait école est un scénario plus prometteur que n’importe quel autre. 

Quant à la dépendance accrue envers le politique, elle se vérifiera sans doute. Mais la SRC peut-elle vraiment prétendre à l’indépendance économique? Elle reçoit 1,3 milliard de financement public chaque année. Elle est l’objet de menaces de coupures de la part des conservateurs et a vécu des programmes de rationalisation par le passé. L’enjeu existe déjà, utiliser cet argumentaire est un bien faible rempart.

On constate l’évidence de la contre-productivité d’une telle mesure en faisant un examen plus approfondi. 

Avant d’aller dans cette direction, la ministre devrait d’ailleurs prendre le temps de mandater une ou plusieurs agences de placement média pour scénariser les transferts d’argent.

Comme le savent les praticiens de l’industrie publicitaire, les annonceurs cherchent des auditoires. En leur retirant l’accès à ceux des plateformes de la société d’État, il est illusoire de penser qu’un principe de vase communiquant s’appliquerait automatiquement. Les annonceurs rejoignent déjà les auditoires des TVA, Bell, La Presse et autres joueurs privés avec leurs campagnes actuelles. Tout planificateur média vous le confirmera : ajouter de la fréquence et du poids média pour surexposer le même public est contre-productif. Ces centaines millions de dollars, libérés par l’abolition de la publicité à la SRC, risqueraient plutôt de se retrouver en bonne partie chez les méga joueurs que nous connaissons.

Si 20 % de l’argent touché par la SRC se retrouve chez Google et Meta, on constatera à terme que les 100 millions récemment arrachés à Google avec la loi C-18 sont, ironiquement, ressortis du pays pour prendre la direction de la Californie. Quand on libère l’argent lié à des investissements stratégiques, on n’a aucune idée de la façon dont la nouvelle stratégie va se déployer. La part du gâteau qui se déplacerait vers les deux acteurs majeurs du numérique pourrait très bien atteindre 30 % et même 40 %. Le cauchemar qu’on cherche à éviter : l’amplification du phénomène.

Le secteur privé trouve son compte avec les investissements efficaces qu’il fait année après année sur les plateformes radio-canadiennes. Pourquoi déstabiliser ces  450 millions de dollars et courir le risque d’en voir une bonne part sortir du cycle de financement de productions canadiennes et d’information ?

Non vraiment. Quelle mauvaise idée. Quelle perte de temps.

Si on s’entend sur le principe d’un financement étatique soutenu et de la nécessité d’occuper l’espace commercial, les pratiques de la SRC et son rôle dans l’industrie doivent cependant faire l’objet d’un examen approfondi. 

Son comportement actuel s’assimile trop souvent à celui d’un holding privé engagé dans une lutte à finir avec sa compétition. À titre d’exemple, l’absence d’ouverture à de la publicité sur ses plateformes pour les entreprises médiatiques qu’elle considère comme ses compétiteurs ou encore la faible ouverture à des contenus externes sur Tou.tv et OhDio.

Dans un scénario de mutualisation, où les joueurs mettraient en commun des pans de leurs activités, la SRC devrait revoir certaines pratiques, agir comme un aidant pour l’industrie. Avec ce scénario, le pactole radio-canadien ne serait donc pas réinjecté dans l’industrie, le problème économique resterait pratiquement entier.

La mise à contribution des services de vidéo/audio sur demande, de Google et de Meta est un pas dans la bonne direction. Les lois C-11 et C-18 font ce travail. Mais pour atténuer le choc, favoriser l’innovation et permettre l’adaptation et l’amélioration du système, il faut faire plus. 

L’érosion des revenus des joueurs traditionnels va s’amplifier. Où trouver d’autres sources de financement ?  Les contenus audios et vidéos numérisés nous parviennent par les connexions Internet et de mobilité que les géants des télécommunications nous vendent (à fort prix).

À suivre: La  contribution des télécoms à la production de contenu canadien.

Crise des médias: un adulte dans la classe

par Luc Tremblay

La plateforme PAN M 360 est née de la crise des médias… qui revient nous hanter dans l’actualité en cette fin d’année. Les coupes drastiques de la télévision traditionnelle chez TVA et la réduction budgétaire de CBC/Radio-Canada nous remettent sur le nez cette crise amorcée depuis trop longtemps déjà… et dont nous ne voyons pas la sortie. C’est pourquoi nous réfléchissons très fort à un avenir plus radieux que celui qui se présente à nous… sans solutions viables.

Professionnel du développement stratégique des grands médias depuis les années 80, notre collaborateur Luc Tremblay s’est joint à PAN M 360 pour participer avec nous au chantier des nouvelles plateformes de référence. À notre chantier de réflexions, il suggère une série d’analyses sur l’actuelle crise des médias.

Comme les « majors » de la musique l’ont fait il y a 15 ans, les acteurs industriels des médias traditionnels cherchent aujourd’hui à préserver les structures actuelles et s’inscrire dans la durée. Y arriveront-ils ? Poser la question…

De toute évidence, les leçons de l’histoire récente de l’industrie de l’enregistrement musical n’ont pas été apprises, pour l’instant du moins.

Rappelons-en les faits. 

Pour se sortir de la crise du téléchargement illégal dans les années 2000, Sony, Warner, Universal, soit les trois multinationales de l’enregistrement ayant survécu aux grands bouleversements des années 2000, ont conclu des ententes à rabais avec Spotify et les autres plateformes d’écoute en continu. Les artistes en paient le prix et le paieront encore longtemps.

Ce qui se passe aujourd’hui du côté des médias traditionnels laisse présager un processus similaire de vente à rabais, dont l’objet est de maintenir les mêmes structures.

On a déjà pu le constater aux audiences du CRTC sur l’application du projet de loi C-11 (Loi sur la diffusion continue en ligne), les patrons d’entreprise tendent à réagir comme l’ours polaire accroché à un morceau de banquise qui fond.

On s’active, on s’insurge, on monte aux barricades pour sauver un secteur industriel et des emplois bien rémunérés, soit. Mais il s’agit d’abord ici de préserver la culture canadienne et québécoise d’une part, et la qualité de l’information, assise du processus démocratique, d’autre part.

On entend leurs dirigeants, par exemple, soutenir qu’il faudrait adoucir les contraintes, la réglementation et autres freins apparents. Qu’avec moins d’obligations, les diffuseurs retrouveraient la santé. 

On conviendra, bien sûr, qu’il y a un déséquilibre spectaculaire entre la réglementation imposée aux entreprises de communication canadiennes et la liberté totale dont bénéficient Netflix, Spotify et leurs semblables. L’intention du processus en cours est de modifier cet état de faits.

Mais comment le modifier ?

Passer le cadre réglementaire à la guillotine pour dupliquer le modèle du far web dans le secteur des médias traditionnels serait une grossière erreur à mon sens. Il serait inutile, voire indécent, d’injecter de l’argent public dans un éventuel fonds d’urgence pour préserver le statu quo. On cherchera l’erreur si ce fonds d’urgence devient pérenne.

Les solutions de sortie de crise ne peuvent rimer avec statu quo. Les propositions qui suivent cherchent à répondre à cet objectif.

Les médias traditionnels devraient réfléchir ensemble

À mon sens, les médias traditionnels devraient réfléchir ensemble. Le chantier de leurs états généraux souhaités devraient être complémentaires à celui de la modernisation du système de radiodiffusion en cours depuis le dépôt du rapport Yale en janvier 2020, dont les trains de mesures proposées par cette équipe sagace se mettent en place… tard, très tard. Et il y a de la résistance, de Meta notamment, mais ce mouvement intelligent et nécessaire est bel et bien entamé.

La modification du cadre réglementaire et législatif ne sera pas suffisante. Il faudrait aller plus loin.

L’industrie devrait se structurer différemment, sur des bases de mutualisation, de regroupement des activités qui ne concernent pas la production de contenu et d’information. Une telle rencontre aurait pour premier bénéfice de rassembler les acteurs de l’industrie dans cet esprit: la collaboration. Un arbitre devrait alors siffler alors la fin de la période des hostilités pour que les considérations de concurrence soient mises de côté, du moins pour un temps.

Quiconque balaie cette idée du revers de la main en la qualifiant d’utopique doit se demander quelle vision de l’avenir est plus engageante : celle d’une mise en commun des ressources des acteurs locaux ou encore la dystopie actuelle qui mène tout droit à la mainmise des géants du web sur la production culturelle et l’asphyxie subséquente du journalisme.

Small is not beautiful

Pourquoi souhaiter un regroupement ? À cause de la masse critique. 

Les “barbares numériques”, comme les nomme Alain Saulnier (ex-patron de la SRC devenu prof et référence dans le romaine), gagnent parce qu’ils ont du volume. Ce qui leur procure trois avantages majeurs: d’abord les milliers d’informaticiens qu’ils emploient leur procurent une nette supériorité technologique. Ensuite, les dizaines de milliards de dollars investis en production de contenus par les Netflix, Amazon, Disney en font des destinations incontournables pour l’usager. Enfin, le volume de données prélevées sur leurs centaines de millions, voire milliards d’usagers bonifient leurs algorithmes, en améliorant l’expérience usager et l’efficacité publicitaire.

Seule la combinaison des forces mènerait à profiter  des mêmes avantages.

La distribution des contenus a été la première activité déconstruite par l’expansion des fonctionnalités du web. Mais après une dizaine d’années d’expérimentation, la question se pose : les Crave, Illico et Tou.tv en vidéo, iHeart, QUB et RadioPlayer en audio; ces marques reconnues et jouissant d’auditoires importants n’ont pu sauver la mise, la vague de coupures sanglantes survenue cette année en est la preuve flagrante. Majeures à l’échelle canadienne, ces plateformes restent marginales à l’échelle internationale.

Qui plus est, le regroupement de l’entière production canadienne sur deux plateformes (vidéo et audio) permettrait de créer des produits d’appel plus pertinents. Il serait d’ailleurs assez facile d’en structurer le répertoire en mettant en valeur les marques des producteurs de contenu, cette façon de faire est déjà une norme dans l’industrie – Bell Média organise son offre de cette façon sur CRAVE avec ses propres marques et celles qu’elle exploite sous licence. 

La répartition des revenus se ferait en fonction des abonnés que chacun amènerait au service. On en convient, le coût d’un tel service ferait l’objet de négociations corsées, un arbitrage serait nécessaire. Les puissantes machines promotionnelles des conglomérats seraient un ingrédient essentiel du succès d’une telle plateforme et engendreraient une croissance des abonnements. 

Les coûts de maintien des plateformes serait rationalisé, les économies seraient  investies en recherche et développement. Où se retrouveraient alors les contenus réunis de ces plateformes ? Il existe des plateformes fonctionnelles, il suffit d’en choisir une parmi celles qui existent, de créer une nouvelle marque, d’y faire migrer les répertoires et répartir les revenus au prorata de la consommation.

Au passage, la création jeunesse, qui souffre cruellement à l’échelle locale, pourrait en bénéficier largement; elle retrouverait sa pertinence sur une plateforme de diffusion en continu où l’accès d’un jeune de 15 ans a la même valeur que celui d’un adulte de 49 – Netflix le démontre avec éloquence.

Le pari, en somme : l’ensemble serait plus fort que la somme de ses parties. 

Bientôt la suite de cette réflexion: bonification de l’offre aux annonceurs, publicité (dont celle à CBC/Radio-Canada), gestion des données

Crise des médias: “ Il n’en restera qu’un seul ”

par Luc Tremblay

La plateforme PAN M 360 est née de la crise des médias dont il est question dans l’actualité cet automne. Les coupes drastiques de la télévision traditionnelle (TVA) et les coupes récentes de CBC/Radio-Canada nous remettent sur le nez cette crise amorcée depuis trop longtemps déjà. C’est pourquoi nous réfléchissons très fort à un avenir plus radieux que celui qui s’offre à nous… sans solutions viables.

Professionnel du développement stratégique des grands médias depuis les années 80, notre collaborateur Luc Tremblay s’est joint à PAN M 360 pour participer avec nous au chantier des nouvelles plateformes de référence. Il suggère ici une série de réflexions sur l’actuelle crise des médias.

Alors que s’ouvre la saison de ski alpin, la crise des médias nous donne l’impression d’être à mi-pente d’une piste triple losange noir pour laquelle nous n’avons pas le niveau, entraînés par la force de gravité à travers des bosses, des sous-bois et des plaques de glace qui rendent notre descente douloureuse. On se doute bien que la succession de chutes et de blessures ne se terminera pas entre amis pour un 5@7 au chalet de la montagne.

Les analystes  répètent ad nauseam que la crise actuelle est sans précédent. Amorcée voilà plus de 20 ans, la disruption numérique est une folle descente dont on ne voit pas encore la fin. L’adaptation, la transformation inévitable de cette industrie, lieu de production culturelle et d’information, exigera de ses acteurs une déconstruction complète des paradigmes qui l’ont régi jusqu’aux premiers chocs des années 2000.

L’industrie musicale: le canari.

L’industrie musicale a été la première à subir les coups de boutoir de cette révolution. Les plateformes d’écoute en continu par abonnement, Spotify, Apple Music, YouTube, Deezer, ont semblé au départ offrir une approche qui pourrait protéger les artistes du téléchargement illégal en leur offrant rétribution au prorata des “plays”. Nous avons vite déchanté : aujourd’hui, seuls les artistes internationaux qu’on qualifie de “blockbusters” tirent leur épingle du jeu et encaissent des revenus substantiels pour leur écoute sur ces plateformes.

Bien sûr, l’industrie s’est adaptée. On a assisté à un transfert spectaculaire: la musique produite en studio a vu sa valeur se diviser par dix, sinon plus, et celle présentée sur scène a effectué un mouvement inverse chez ses artistes les plus populaires. Aujourd’hui, il y a toujours beaucoup d’argent dans l’industrie musicale, les superstars ne s’en sortent pas mal du tout, merci, mais ce sont les artistes nichés,  immensément majoritaires, qui ont écopé.

La niche prenant ici un sens large: au-delà des standards de la pop beyoncienne, tout artiste ou presque reçoit ce qualificatif et surtout la maigre rémunération qui y est associée! Le monde de la musique se cristallise dans un nouveau modèle qui profite aux blockbusters et où la majorité des artistes souffrent. 

Pour nourrir le débat actuel, il serait à propos de se souvenir que cette structure a émergé dans un contexte de panique, pour éviter que les médias affolés ne répètent les erreurs commises en musique. En quelques années, les “majors” de la musique ont signé des ententes à rabais avec les plateformes de streaming pour se sortir du piratage qui avait cours et sécuriser leur position au détriment de celle des artistes dont ils gèrent les répertoires.

Les autres pans de l’industrie médiatique et culturelle regardaient ce qui passait avec la musique en voulant croire que le phénomène ne les menacerait pas. C’était oublier que ce qui pouvait être dématérialisé le serait forcément.

La musique était aspirée par la numérisation de ses productions et la déconstruction de ses canaux de distribution, la presse écrite suivait pas très loin derrière. En quinze ans, le secteur canadien de la presse écrite a vu ses revenus passer de près de 4 milliards de dollars à quelques centaines de millions. 

Beaucoup plus lourde à numériser et surtout à distribuer, la télévision linéaire a commencé à subir le même traumatisme au début des années 2010. Le tout a été amplifié exponentiellement par les médias sociaux, qui déterminent de nombreuses variables de la crise. 

Cette transition s’accélère et bientôt se conclura par la marginalisation des médias traditionnels. L’exemple de la diffusion sur Facebook de l’hommage à Karl Tremblay, décision prise de bonne foi, dans l’esprit d’une plus grande accessibilité, en est, chez nous, la plus récente démonstration.

Ralentir le choc pour permettre l’innovation.

La question de l’adaptation aux changements se pose en cette fin d’année avec une criante acuité. On verra ici une similitude entre la crise des médias et le réchauffement climatique.

La rapidité avec laquelle les changements climatiques se produisent empêchent les

écosystèmes de s’adapter.  Idem pour l’écosystème médiatique. Les solutions que les analystes patentés et politiciens proposeront aujourd’hui seront demain des prothèses peu efficaces. Il faut ralentir le choc pour permettre la transition, pas revenir à 1993.

Alors devant l’ampleur de cette crise, il faut d’abord assumer l’inconfort qui accompagne les solutions à venir.

Faisons un peu de maths, les chiffres nous guident vers ce pragmatisme;  au Canada 60% des dollars publicitaires sont maintenant investis dans le numérique et de ce 60%, 80% vont à Google et Meta. Il reste donc la moitié des dollars disponibles pour l’ensemble des médias du pays. Cette  tendance s’alourdit  depuis vingt ans et ne s’inversera pas.

Dans un tel contexte, les comportements compétitifs et les structures actuelles du marché ne peuvent être la réponse. La mise en commun des ressources pour ralentir la déconstruction et la recherche en innovation devient une évidence et cela sur tous les fronts: modèle de distribution, gestion des données usagers, offre publicitaires aux annonceurs, financement public de Radio-Canada et de la production privée, il faut tout revoir selon de nouveaux paradigmes.

Autrement, il n’en restera qu’un seul, comme le disait Sean Connery dans le film Highlander ce vieux sci-fi des années 80.  L’atrophie sera progressive, les joueurs disparaîtront jusqu’à ce qu’il n’en reste, au mieux, que quelques-uns.

Ne serait-il pas  plus stratégique de ne faire qu’un, d’unir véritablement les forces, encore considérables, des médias traditionnels, pour faire face à la menace et innover ? 

Ce sont les avenues que nous explorons dans notre prochain épisode. Pour le lire, cliquez ICI

18e GAMIQ: ÉCOUTEZ LES GAGNANT.E.S !

par Rédaction PAN M 360

Le dimanche 3 décembre dans un Théâtre Plaza archi-plein, le 18e Gala Alternatif de la Musique Indépendante du Québec (Gamiq) a mis en relief la musique alternative et émergente du Québec, toutes langues, toutes cultures, tous genres, tous styles musicaux confondus.

Élisapie (artiste de l’année), La Sécurité (révélation de l’année et album indie rock ) et Population II (révélation de l’année), Arielle Soucy (espoir 2024) et plus d’une trentaine d’autres artistes ou pros de l’industrie sont repartis dans la neige avec leur Lucien – statuette baptisée en hommage au poète rock.

Avant que l’animatrice Émilie Roux ne prenne la barre du gala, Patrice Caron, le fondateur du Gamiq, a démarré le show en rendant hommage à feu Karl Tremblay, affirmant en substance que le regretté chanteur était un punk à l’origine, qu’il en avait été témoin à l’Hémisphère gauche avant que les Cowboys Fringants passent à une autre ligue tout en conservant l’empathie proverbiale des punks. Consensus national, force est d’observer !

Les groupes et artistes Margaret Tracteur (kebamericana), le Choeur des Growlers (métal choral), Naïma Franck (soul pop), Shauit (autochtone) , Belle Grande Fille , Alice, DVTR (punk), Cure-Pipe (indie pop), Laura Krieg (synthwave) et Calamine (rap keb) ont offert tour à tour leur numéro de production au public essentiellement constitué d’artistes et professionnels du champ gauche québécois.

Voici la liste des gagnant.e.s et leur récente production sur Bandcamp

ÉCOUTEZ TOUS LES ARTISTES !

Artiste de l’année : ELISAPIE

Révélation 2023: LA SÉCURITÉ

Révélation 2023: POPULATION II

Espoir 2024: ARIELLE SOUCY

Album rock: FUUDGE – …qu’un cauchemer devienne si vrai

EP Rock: GRAND PUBLIC – Idéal tempo

Album indie-rock: LA SÉCURITÉ – Stay safe!

EP Indie-rock: LYSANDRE – Les heures innocentes

Album Pop : SHEENAH KO – Future is now

EP Pop : LUIS CLAVIS – Échos d’une vie distante, volume 2

Album Folk: VANILLE – La clairière

EP Folk: PÉPÉ ET SA GUITARE – Ta yeule pis joue

Album ou EP Rap / Hip-hop: CALAMINE – Lesbienne woke sur l’autotune

Album ou Ep Électro : SUPER PLAGE – Magie à minuit

Album ou EP Post-Rock/Post-Punk: ATSUKO CHIBA – Water, It Feels Like It’s Growing

Album ou EP Punk: ENFANTS SAUVAGES – Arythmie

Album ou EP Métal: GET THE SHOT – Merciless Destruction

Album ou EP Soul / R&B : NAÏMA FRANCK – Petite fille devient grande

Album ou EP Jazz : OLIVIA KHOURY – Portraits

Album ou EP expérimental: FLORE LAURENTIENNE – Volume II

Album ou EP Country: HAUTERIVE – Hauterive

Album ou EP World: ROBERTO LOPEZ – Ritual

Album ou EP Trad: SHAUIT – Natukun

Hors-Québec (Canada): BAIE – Grand Bleu

Simples: ANTOINE CORRIVEAU: La panique est une fleur

Vidéoclip — Auto-production: SAINTS MARTYRS – Minotaure

Vidéoclip — Production sur un budget (5000$ et moins): DVTR – DVTR

Viédoclip — Production professionnelle: VIOLETT PI – Celui qui attend / Baloney Suicide

Vidéoclip — Animation : BON ENFANT – Pâte à biscuit

Étiquettes de disques

  • Mothland

Médias

  • CFAK Gagnants ex-aequo
  • CHOQ.ca Gagnants ex-aequo
  • CHYZ 94.3 Gagnants ex-aequo
  • CISM 89. Gagnants ex-aequo
  • ecoutedonc.ca Gagnants ex-aequo
  • Le Bad Crew Gagnants ex-aequo
  • Le Canal Auditif Gagnants ex-aequo

À noter que PAN M 360 ne figure pas sur cette liste vu l’apparence de conflit d’intérêt: Patrice Caron fait partie de notre équipe de direction.

Balados Musique

  • Le Clash Podcast 

Relations Médias

Salle de spectacle

  • Le Zaricot 

Festival

  • La Noce

Représentation d’artistes

  • Ruel Tourneur

Service à la communauté

  • Le Pantoum

Sweet Swana Montréal: pour une juste part d’électro arabe (5e partie- fin)

par Salima Bouaraour

5. Artistes électro swana sous les projecteurs PAN M 360: Sammy Halimi, Crissemarqueur, Firas Nassri, Mourad Bncr, OM El Beat, Shadya, Wake Island

La population arabe constitue 20,6% des minorités visibles de l’agglomération  montréalaise, occupant ainsi la 2e position après la population noire, elle, avoisinant les  30%. Visible, dit-on? Peut-être pas tant que cela. Fort est de constater leur faible  représentativité dans plusieurs domaines de la société y compris dans le milieu de la  musique électronique. 

 

Pourtant, les artistes électro swana ont le vent en poupe dans toutes les grandes métropoles du monde! Montréal, néanmoins, n’échappe pas à la mouvance, elle regorge de petits  trésors, mais plus souvent encensés à l’étranger ou en dehors de la Province que sur l’île.  Leur visibilité dans les médias ou sur les grandes scènes ou dans des événements  d’envergure sont encore plutôt minimes, ici. 

Pour PAN M 360 notre collaboratrice Salima Bouaraour met ici en lumière ce  vivier foisonnant d’artistes impliqués dans le développement de la vie culturelle et  nocturne montréalaise ainsi que la promotion et la défense des valeurs d’égalité, de justice,  de créativité, d’inclusivité et de célébration de la beauté arabe.  

PAN M 360 vous souhaite une bonne écoute et vous pouvez accéder ici à la page Souncloud de Sweet Swana Montréal 

Par ordre alphabétique 

Aquaventure (Canada/Québec/Algérie): 

Sammy Halimi est curateur pour les séries d’événements estivaux Oxygen et producteur connu  sous le nom d’Aquaventure. 

 

Tant ses événements que sa production musicale s’inspirent de la Nature et de tous les potentiels  qu’elle peut offrir en terme de cadre accueillant pour la collectivité lors d’une expérience sonore  ou d’idéation.  

On a pu retrouver Sammy lors du Festival Mutek sur scène ou en projet de création avec RAMZI  ou en tant qu’intervenant lors des Conférences Internationales du Sommet de la Nuit pour 

partager avec la ville de Montréal, la manière d’investir les parcs ou les sites semi-naturels  inusités pour les artistes en prenant pour modèle Berlin ou Amsterdam.  

Crissemarqueur (Canada/Québec/Tunisie)

Taher Gargouri est le cerveau derrière LATEX, une série d’événements hors-normes kinky et  ultra-avant gardiste.

DJ connu sous le nom de Crissemarqueur, Taher est aussi curateur de la  société de production Slata Prod (Tangerine, Kafichanta, LATEX). Il est aussi co-fondateur de la  Fédération des Arts Nocturnes – FANTOM-

LATEX apporte une énergie nouvelle et contagieuse aux scènes kink et rave montréalaises tout  en créant un espace plus sécurisant et plus qu’indispensable aux individus (artistes et public  confondus) BIPOC, queer et marginalisés, leur permettant ainsi de s’exprimer et de célébrer leur  identité. Fusionnant le BDSM et la Techno dans des espaces inclusifs et sécuritaires pour les  ravers montréalais, LATEX propose une expérience sensorielle live à la communauté. 

Crissemarqueur explore avec franchise et sincérité ses racines nord-africaines à travers des  morceaux percussifs et sensuels teintés de nuance techno. Ses mix sont d’une grande richesse en  terme de sélection et il aborde une technique remarquable pour offrir un panel d’écoute à son  public en alternant de la musique traditionnelle orientale, de la techno percussive, noire et  dansante ainsi que de l’électro.  

Notre interview de Crissemarqueur ICI

Firas Nassri (Canada/Québec/Syrie)

Firas est un artiste et un producteur prolifique qui explore à travers sa musique ses désirs, les  diverses facettes de son identité et de sa culture multidimensionnelle ainsi que le sens de la  création.  

Son album, La Levantine en 2021, a connu un franc succès, entremêlant musique électronique et  orientale. Sorti sur l’étiquette CosmoVision, cet album a été porté par le collectif dont le but est  de promouvoir les artistes montréalais.es issu.es de l’immigration à travers une approche  collaborative.  

Entre autres, il développe Ossa Project: un duo avec un multi-instrumentiste et chanteur libano canadien – Naïm Souaid – où ils explorent des contes en arabe chantés sous fond de musique  électronique, riche, variée et onirique.  

Son dernier projet « Ghosts Within » a été soutenu par le Conseil des Arts du Canada et présenté  en avant-première à Vancouver. Le 24 septembre dernier, il fut dévoilé au public montréalais  avec enthousiasme.  

Site web de Firas ICI

Compte Instagram de Firas ICI

Indistinct voices of PA (Canada/Québec/Algérie)

Mourad Bennacer (Bncr) est un artiste multimédia versatile et polyvalent, depuis plus de deux  décennies.

Son travail sonore et visuel s’inspire du concept de mémoire éphémère tout en  s’imprégnant de beat-music laissant ainsi une grande place à la texture et au détail. Il crée, de ce  fait, un point de ralliement entre son héritage culturel nord-africain, des univers empreints de  science-fiction et une fascination pour l’obsolescence technologique.  

Depuis plusieurs années, il mène une carrière professionnelle prolifique en tant que formateur et  concepteur sonore spécialisé dans la création d’environnements immersifs à la Société des arts  technologiques, l’audio spatialisé et la réalité mixte. Mêlant prise de son réelle, instrumentation,  synthèse sonore et techniques de microsampling, son langage musical s’approprie la notion  d’espace de façon singulière et se rapproche de la composition cinématographique. Il collabore  régulièrement avec des artistes de renommée tels que Pierre Friquet ou les studios Nature  Graphique ou le fameux Iregular. 

Son EP UNREST, sorti chez Unlog en 2021, se veut une synthèse de ce parcours, une transition  assumée vers une nouvelle couleur musicale.  

Mourad est également un membre actif de Silicon Beats, un collectif de musique électronique  connu pour ses jam et ses ciné-concerts. Il est également cofondateur d’Unlog, un collectif et  label de musique axé sur les explorations électroniques et audiovisuelles. Unlog a su forger une  signature musicale distinctive au fil de ses dix ans d’activité en tant que label et organisateur  d’événements musicaux, soutenant le travail d’artistes internationaux et locaux tels que Engone  Endong, Camille Frey, Tehu, Vince Konigan, TSF et bien d’autres.

Site officiel ICI

Page Bandcamp ICI

Compte Vimeo ICI

Compte Instagram ICI

Om El Beat (Canada/Québec/Syrie)

La productrice et DJ Om El Beat – Batoul Almohamad – est d’origine syrienne et basée à  Montréal.

Cette artiste queer prolifique a de nombreux albums et performances à son résumé.  Elle entremêle des ambiances nostalgiques sous fond d’électro mélancolique. Ses mix sont une  fusion de musique swana, électro et techno.  

L’étiquette CosmoVision a également porté certains de ses projets avec brio.  

Sa présence sur scène se fait souvent aux côtés de Crissemarqueur, Wake Island, SHADYA,  QUEEN AND QUEER et bien d’autres encore! Son activité au Proche Orient est extrêmement  riche.  

En 2021, un incroyable live a été tourné avec drone surplombant la ville d’Istanbul en Turquie.  https://soundcloud.com/batool-mohamad 

SHADYA (Canada/Québec/Algérie) 

Artiste queer, féministe intersectionnelle décoloniale et engagée dans la lutte contre le racisme systémique, SHADYA mène un parcours pluriel depuis plus de vingt ans.

Elle est fondatrice et co-manager d’une étiquette de musique électronique – Chez.Kito.Kat records – depuis 2006, DJ,  journaliste pour PAN M 360, co/curatrice des soirées Tempio Nero/AnaLoveMyLog et impliquée  dans des comités comme le Conseil de Nuit de MTL24/24 (depuis 2020) ou le comité Racisme,  exclusion sociale et laïcité de l’État de la Ligue des droits et libertés (2021).  

Par le biais d’une gestion collective horizontale avec DBY et Mr Bios (producteurs et DJs), son  label compte à ce jour 91 publications d’une trentaine d’artistes internationaux. La direction  artistique est résolument orientée vers les musiques électroniques exploratives, le plus souvent  analogique et modulaire. Les références « dancefloor » sont distribuées par Lobster Theremin  (UK) et Underscope (FR). Les artistes du label montréalais se retrouvent sur les scènes des  grandes institutions de la musique électronique: Berghain, Mutek, Le Sucre…L’étiquette est  référencée sur Hate Music, Trax, Nova, The Wire, Les Yeux Oranges, Resident Advisor, Les  Inrockuptibles, NPR, Le Monde, FIP Radio de Radio France.  

Longtemps performeuse dans un groupe d’électro clash en Europe, elle se consacre aujourd’hui à  la pratique du djing entremêlant des sélections électro/techno/breaké/acid/oriental/dark/jungle/ hip hop electro breaké swana. SHADYA se produit régulièrement à Montréal et a eu la chance de  célébrer les 20 ans de la Nuit Blanche au MTELUS en février 2023 en partenariat avec  MTL24/24 ou une célébration en musique pour le Musée d’art contemporain Pompidou de Bruxelles au Kanal Studio en 2021. 

ra.co/dj/shadya 

https://chezkitokat.com/

Wake Island (Canada/Québec/Liban)

Wake Island est un duo de producteurs de musique électronique originaire de Beyrouth et basé à  Montréal.

À travers leur musique, ils tentent de concilier leurs racines libanaises avec leur vie  nord-américaine. Mêlant sonorités moyen-orientales à des rythmes techno, ils créent des  chansons pop qui rappellent parfois les années 80 et 90, tout en gardant une claire ouverture vers  le futur.  

Le duo est formé de Philippe Manasseh (il/lui) et Nadim Maghzal (il/lui), deux immigrants  libanais qui se sont rencontrés à Montréal au début des années 2000. Depuis 2018, le groupe est  fortement établi entre New York et Montréal dans les scènes moyen-orientales et LGBTQ.

Ils ont notamment créé Laylit, une soirée dansante cherchant à valoriser la diversité musicale de la  région du moyen orient et d’Afrique du Nord.  Glorifiée par le New York Times et Pitchfork, Laylit a célébré, durant l’été 2023, son 5e  anniversaire avec une tournée Amérique/Proche-Orient et une session Boiler Room, à New York. 

Depuis 2020, ils se concentrent sur des projets multidisciplinaires, établissant leur présence dans  les domaines interactifs et VR/AR.  

Pour cette compilation, Wake Island nous offre généreusement une track de leur dernier album:  Sleep 2.0 de l’album Born to Leave. 

Wake Island Boiler Room, Été 2023, New York INTÉGRER les vidéos du boiler room MNSA (Wake Island).  

Nadim Maghzal (Wake Island) 

FIN

Sweet Swana Montréal: pour une juste part d’électro arabe (4e partie)

par Salima Bouaraour

4. Quand la Musique, l’Histoire et la Politique sont intrinsèquement liées 

La population arabe constitue 20,6% des minorités visibles de l’agglomération  montréalaise, occupant ainsi la 2e position après la population noire, elle, avoisinant les  30%. Visible, dit-on? Peut-être pas tant que cela. Fort est de constater leur faible  représentativité dans plusieurs domaines de la société y compris dans le milieu de la  musique électronique.  

Pourtant, les artistes électro swana ont le vent en poupe dans toutes les grandes métropoles du monde! Montréal, néanmoins, n’échappe pas à la mouvance, elle regorge de petits  trésors, mais plus souvent encensés à l’étranger ou en dehors de la Province que sur l’île.  Leur visibilité dans les médias ou sur les grandes scènes ou dans des événements  d’envergure sont encore plutôt minimes, ici. 

Pour PAN M 360, notre collaboratrice Salima Bouaraour met ici en lumière ce  vivier foisonnant d’artistes impliqués dans le développement de la vie culturelle et  nocturne montréalaise ainsi que la promotion et la défense des valeurs d’égalité, de justice,  de créativité, d’inclusivité et de célébration de la beauté arabe.  

L’immigration arabe au Canada est ancienne. On recense le premier arrivant venu du Liban en 1882! À Montréal, la communauté algérienne est au deuxième rang après celle d’Haïti puis on  pourra citer l’Italie, la France et le Maroc. (Source : Québec interculturel)

Néanmoins, si on ose évoquer le terme de communauté arabe, il faudrait bien redéfinir ce que  le terme « ARABE » englobe à lui seul: Afrique du Nord? Proche Orient? Moyen Orient? Toutes  confessions confondues? Mosaïque linguistique? Diversité culturelle? À cela s’ajoute dans la  réflexion, le terme plus usité et on ne peut plus pertinent de “Swana » qui est plus en adéquation avec la réalité post-coloniale.  

En définitive, si nous voulons rester concentré sur notre sujet, on se limitera, cette fois-ci, à leur  implication dans le milieu de la musique électronique à Montréal et leur point d’ancrage sur la  scène extra muros.  

Néanmoins, « l’insertion dans le milieu culturel d’artistes issu-e-s de l’immigration (longue ou  récente) et d’artistes racisée-s né-e-s au Québec peut assurément participer à la cohésion  sociale et contribuer à un imaginaire collectif inclusif, c’est-à-dire à un vivre ensemble  incarné. Or, Il est regrettable de constater que les artistes dits de la diversité ne sont que trop  peu mentionnés lorsqu’il s’agit de pratique professionnelle, et que les citoyen-ne-s dits de la  diversité sont trop souvent perçus comme ayant besoin de médiation. Une pleine  reconnaissance des artistes dits de la diversité, ainsi qu’une représentation diversifiée juste et  adéquate à tous les paliers institutionnels, décisionnels, administratifs et créatifs. » (Source : Ville de Montréal)

Voilà qui est plus  que nécessaire, sinon urgente à mettre en œuvre concrètement. C’est ainsi qu’en 2017 se  détermine la politique de développement culturel de la ville de Montréal suite à la publication d’un mémoire sur la diversité artistique. Il est donc bien question ici du vivre et du travailler ensemble de manière égale.  

En outre, cette notion spécifique du « besoin de médiation » laisse sous-entendre que les  individus issus des groupes ethniques auraient besoin d’être en quelque sorte aiguillé et de  bénéficier de la bienveillance, souvent teintée d’un paternalisme néo-colonial si il est maladroitement mené par des individus issus de la population dite « Blanche ». Ce rapport  préconise de même réviser la sémantique qui porte, en effet, un réel préjudice aux actions  positives car elle induit une sécession invisible mais définitivement palpable entre le « Eux et le  Nous », le « Eux et les Autres ».

Par conséquent, « Une présence ainsi marquée et assumée de notre diversité montréalaise,  permettant réellement à tout un chacun de se reconnaître et de s’identifier autant dans les  structures que dans les récits créés, servirait sans aucun doute à la création d’un vivre  ensemble réel »  (Source : Ville de Montréal)

Le débat sur cette problématique est ainsi bel et bien un enjeu large et massif nous ramenant à notre sujet: la représentation des artistes arabes de la scène électro à Montréal. Il est impératif  de renégocier, collectivement, et dans l’espace public, au sens large, l’image que l’on se fait  d’eux ainsi que la manière dont la société les perçoit et les conçoit, sans compter leur implication  à toutes les échelles. La musique et l’art, dans leur essence même, sont des vecteurs forts de  l’intégration au cœur de la société.  

De par son ancienneté sur le territoire canadien et son poids démographique représentatif à  Montréal, les artistes arabes de la scène électro sont de ce fait dans la légitimité de se reconnaître  dans toutes les facettes de la société ainsi que de bénéficier des mêmes opportunités que ce soit en termes de programmation, d’opportunités professionnelles, de positions décisionnelles ou en  termes d’influence dans l’espace public.  

Par conséquent, les projecteurs doivent être davantage multidirectionnels afin de rectifier le tir et  de déclencher des actions concrètes positives pour que le « EUXet les AUTRES» deviennent un  NOUS substantiel. 

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Sweet Swana Montréal: pour une juste part d’électro arabe (3e partie)

par Salima Bouaraour

3. L’électro-techno-pop swana déferle sur la scène internationale! 

La population arabe constitue 20,6% des minorités visibles de l’agglomération  montréalaise, occupant ainsi la 2e position après la population noire, elle, avoisinant les  30% (1). Visible, dit-on? Peut-être pas tant que cela. Fort est de constater leur faible  représentativité dans plusieurs domaines de la société y compris dans le milieu de la  musique électronique.  

Pourtant, les artistes électro swana ont le vent en poupe dans toutes les grandes métropoles du monde! Montréal, néanmoins, n’échappe pas à la mouvance, elle regorge de petits  trésors, mais plus souvent encensés à l’étranger ou en dehors de la Province que sur l’île.  Leur visibilité dans les médias ou sur les grandes scènes ou dans des événements  d’envergure sont encore plutôt minimes, ici. 

Pour PAN M 360 notre collaboratrice Salima Bouaraour met ici en lumière ce  vivier foisonnant d’artistes impliqués dans le développement de la vie culturelle et  nocturne montréalaise ainsi que la promotion et la défense des valeurs d’égalité, de justice,  de créativité, d’inclusivité et de célébration de la beauté arabe.  

Bien connue pour son avant-gardisme et son syncrétisme musical, la scène électronique  londonienne voit, aujourd’hui, la communauté arabe brassée à grand coup de génie les influences  de musique traditionnelle orientale avec de l’électro breaké à l’instar de ce que la déferlante  tendance électro-pop indienne, des années 90/2000, avait fait en explosant pour faire danser le  monde entier! Aux USA, le phénomène fait rage. L’Institut du monde arabe à Paris programme régulièrement des artistes arabes électro. 

Issus du Proche et du Moyen Orient, ces artistes s’exportent de plus en plus: Saliah (UK/Liban),  Toumba (UK/Jordanie), Ibrahim Abu-Ali / DJ Habibeats (USA/Jordanie) etc. On pense évidemment à Omar Souleyman qui a largement et fortement participé à démocratiser cette tendance à l’échelle internationale. Et bien d’autres encore comme la Palestinienne Sama’ Abdulhadi.  

Et pendant ce temps-là, que se passe-t-il chez nous ? À vrai dire, de nombreux artistes  sont déjà florissants depuis plusieurs années! Néanmoins, leur visibilité reste bien en deçà de  leur dynamisme et de leur talent.  

Prenons pour exemple le collectif Laylit. Créé en 2018, il s’établit entre New York et Montréal  dans les scènes moyen-orientales et LGBTQ. Des soirées dansantes cherchant à valoriser la  diversité musicale de la région du Moyen Orient et d’Afrique du Nord sont régulièrement  organisées entre autres par les deux compères de Wake Island. La salle de spectacle  Ausgang Plaza, menée par Malick Touré, directeur général et DJ Mr Touré!, situé sur la rue Saint-Hubert, fut leur lieu de subterfuge, à Montréal.  

En moins de 5 ans, le collectif a explosé sur la scène internationale avec une reconnaissance bien  méritée due aux fruits de leur travail acharné et de leur talent – New York Times, Pitchfork, Boiler  Room, tournée en Europe/Amérique du Nord/Moyen Orient.  

Lorsqu’une ville a un vivier d’énergie et de pareil talent, on voudrait le voir programmé bien plus souvent dans une plus grande diversité de salles, de concerts, de festivals et bénéficier de plus de visibilité dans les médias québécois. En mai dernier, la série RADAR, présentée par M  pour Montréal et Mundial Montréal en collaboration avec QUB musique les a programmé pour  la sortie de leur nouvel album. 

Force est de constater lorsqu’on observe la scène électronique montréalaise, des artistes issus de la population non racisée occupent le stage et leur carrière explose en quelques  mois, sans exagérer. Tout le monde en a conscience. Tout le monde le voit. Mais rares sont celles  et ceux qui veulent exposer le débat publiquement.  

Plus que jamais, en 2023, il est totalement légitime de se questionner sur les mécanismes menant  à ce type de parcours différencié, à vitesse désynchronisée, sachant que la qualité, la créativité et  les compétences ne sont pas ici en question, aucunement.

Qu’en-est-il alors? 

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Sweet Swana Montréal: pour une juste part d’électro arabe (2e partie)

par Salima Bouaraour

2. Une scène en mouvement et progression constante 

La population arabe constitue 20,6% des minorités visibles de l’agglomération  montréalaise, occupant ainsi la 2e position après la population noire, elle, avoisinant les  30% (1). Visible, dit-on? Peut-être pas tant que cela. Fort est de constater leur faible  représentativité dans plusieurs domaines de la société y compris dans le milieu de la  musique électronique.  

Pourtant, les artistes électro swana ont le vent en poupe dans toutes les grandes métropoles du monde! Montréal, néanmoins, n’échappe pas à la mouvance, elle regorge de petits  trésors, mais plus souvent encensés à l’étranger ou en dehors de la Province que sur l’île.  Leur visibilité dans les médias ou sur les grandes scènes ou dans des événements  d’envergure sont encore plutôt minimes, ici. 

Pour PAN M 360 notre collaboratrice Salima Bouaraour met ici en lumière ce  vivier foisonnant d’artistes impliqués dans le développement de la vie culturelle et  nocturne montréalaise ainsi que la promotion et la défense des valeurs d’égalité, de justice,  de créativité, d’inclusivité et de célébration de la beauté arabe.  

 

La scène électronique montréalaise a connu et connaît encore une grande avancée comparativement à d’autres scènes dans le monde. Les individus dits non dominants comme les femmes, les catégories marginalisées – queer-bipoc-trans – jouissent d’une plus grande accessibilité et visibilité sur  la scène.

Cependant, pour permettre de toujours progresser vers un  avenir plus radieux, il persiste encore des enchevêtrements complexes de la discrimination  systémique et des enjeux liés, par exemple, à la représentation des femmes racisées et/ou queer,  ainsi que la problématique d’accès aux postes décisionnels, de leadership et d’accès aux médias.  

En effet, les personnes dites racisées ou issues des nations autochtones ont eu plus d’opportunités même si la situation est toujours criante face aux multiples défis liés à l’Histoire.  En outre, un immense travail de fond a été mis en place pour remédier au difficile accès à la  scène des artistes noirs. Son poids démographique des minorités visibles est de 28,3% (1) de  l’agglomération montréalaise.

Il est clair que l’accessibilité à toutes les sphères de l’espace  public dont la scène musicale doit être primordiale.  En prenant en compte, tous ces facteurs, un débat se doit d’être mis sur la table: la sous représentativité des artistes arabes de la scène électronique montréalaise. Bien que ce groupe représente le cinquième des minorités visibles (Statistiques Montréal 2016 (1 et 2) ), il reste en  souterrain comme un trésor bien gardé. Des collectifs tentent de rectifier la situation, mais tant  bien que mal, souvent de leur propre initiative. Les défis sont de taille!

RÉFÉRENCES

 

1. Minorités visibles. Population dans les ménages privés selon les groupes de minorités visibles,  agglomération de Montréal, 2021 

2. Population d’origine ethnique arabe au Québec en 2016 

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Sweet Swana Montréal: pour une juste part d’électro arabe (1e partie)

par Salima Bouaraour
  1. Cantonné dans le folklore de l’imaginaire collectif 

La population arabe constitue 20,6% des minorités visibles de l’agglomération  montréalaise, occupant ainsi la 2e position après la population noire, elle, avoisinant les  30% (1). Visible, dit-on? Peut-être pas tant que cela. Fort est de constater leur faible  représentativité dans plusieurs domaines de la société y compris dans le milieu de la  musique électronique.  

Pourtant, les artistes électro swana ont le vent en poupe dans toutes les grandes métropoles du monde! Montréal, néanmoins, n’échappe pas à la mouvance. La ville regorge de petits  trésors, mais plus souvent encensés à l’étranger ou en dehors de la Province que sur l’île. Leur visibilité dans les médias ou sur les grandes scènes ou dans des événements  d’envergure sont encore plutôt minimes, ici. 

Avec ce dossier de notre collaboratrice Salima Bouaraour, PAN M 360 met en lumière ce vivier foisonnant d’artistes impliqués dans le développement de la vie culturelle et nocturne montréalaise ainsi que la promotion et la défense des valeurs d’égalité, de justice,  de créativité, d’inclusivité et de célébration de la beauté arabe.  

Dans cet esprit festif de rassemblement, une compilation vous emmènera dans leur univers respectif. 

Avant cela, une analyse mérite toute votre attention.  En voici le 1er volet!

De nombreuses manifestations culturelles mettent à l’honneur la beauté arabe ainsi qu’un large  panel de sa florissante musique. On pense bien évidemment au Festival du Monde Arabe, existant depuis 23 ans, qui est devenu un événement incontournable ou au Centre Culturel Marocain, installé ici depuis 2014, qui participe à l’interculturalité, l’interaction et la coexistence  des différentes civilisations et cultures ainsi qu’à la promotion de la convergence et le  rapprochement entre elles ou bien encore à des micro-festivals comme celui de la Palestine (créé  en 2023).

Mais, qu’en est-il de la zone fragmentaire de l’électronique? Certains diront le néant! Si il  s’agit de la représentativité des artistes arabes électroniques programmé.es dans les événements  plus institutionnels ou les festivals de renommée. La portion est infime. Et pourtant, ces artistes issus de la communauté sont nombreux, extrêmement prolifiques et créatifs à souhait! Parfois, plus reconnu.es à l’étranger que sur l’île. 

Comme toujours, les données sont manquantes ou parcimonieuses lorsqu’il s’agit de problématique nichée ou possiblement considérée comme subalterne par certains. De nombreuses recherches corroborent ce phénomène de l’invisibilisation (2).  

Références:

1. Minorités visibles. Population dans les ménages privés selon les groupes de minorités visibles, agglomération de Montréal, 2021 

2 Le racisme systémique dans la musique/Soumission/Exploitation/Ostracisation (série de podcasts  histoire/musique/sociologie): 

Portrait et témoignage de Saïd Taghmaoui (acteur, témoignage des parcours désynchronisés à vitesse  différée liés aux discriminations systémiques dans le cinéma): 

Rokhaya Dialo (journaliste indépendante, éditorialiste, réalisatrice. Débat basé sur les récentes  recherches concernant l’intersectionnalité des femmes racisé.es dans toutes les sphères de la société)

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