Affinités méconnues entre métal et classique / Musique savante souterraine ? (3)

par Laurent Bellemare

Les 29 et 30 janvier se tiennent les premières mondiales du programme Voïvod Symphonique, rare manifestation grand public juxtaposant la “grande  culture “ classique avec le monde souterrain du métal. Pourtant, nombreux sont les liens qui unissent ces deux traditions européennes, tant par leur musique que par leur histoire. Néanmoins, ce rapprochement reste méconnu, même chez les plus érudits, notamment chez les musiciens d’orchestre sauf exceptions. Pour démystifier le contexte duquel culmine cette collaboration hors du commun, notre collaborateur et musicologue Laurent Bellemare vous propose ici un brillant survol comparatif des similitudes entre ces deux univers. Voici la troisième partie de cet excellent dossier.

Musique savante souterraine ?

Pour Pascal Germain-Berardi, le changement des références utilisées dans le métal est aussi un miroir de ce qui est perçu comme classique dans la société. 

Si à une certaine époque, le classique signifiait Bach, Mozart, Beethoven et consorts pour la majorité des gens, ce devait être également le cas pour la plupart des métalleux des années 80 et 90. Mais avec l’accessibilité croissante de la musique sur le web, “ l’omnivorisme” musical des nouvelles générations et aussi l’éducation institutionnelle de nombreux musiciens métal, la connaissance du corpus classique s’est beaucoup approfondie. 

Au Québec, l’un des cas les plus évidents de ce nouveau paradigme est celui de Luc Lemay, guitariste fondateur de Gorguts qui a fait son conservatoire en interprétation (alto) à l’époque de la composition d’Obscura (sorti en 1998, mais composé en 1994). Cet album mythique était un exercice de style renversant complètement les clichés du death metal de l’époque, épurant tremolo picking, power chords et rythmes de thrash metal au profit d’harmonies dissonantes, de formes labyrinthiques et d’exploration des techniques étendues.

Luc Lemay a souvent indiqué qu’il voyait peu de différences entre composer du métal et de la musique de chambre, mis à part l’amplification et la distorsion des timbres. Cette approche a d’ailleurs laissé une trace indélébile sur les courants les plus extrêmes du métal d’aujourd’hui. Pensons ici à Deathspell Omega (France), à Imperial Triumphant (États-Unis) ou encore à Ad Nauseaum (Italie).

Germain-Berardi abonde en ce sens : 

« … que je compose pour quatuor à cordes ou guitare, basse et drum ou orchestre, la musique reste une forme d’énergie. […] Le geste de composition ne change pas vraiment entre l’un ou l’autre ».

Les spectateurs de la dernière édition du festival FIMAV auront pu le constater en entendant Basileus, une œuvre orchestrale de plus d’une heure, dont le langage est un véritable hybride entre les traditions classiques et métal. Le Canadien Harry Stafylakis et l’Autrichien Bernhard Gander sont deux autres figures émergentes de cette esthétique hybride en musique contemporaine. 

Vers un académisme du métal

Les férus de métal ont toujours formé  une communauté valorisant les connaissances, une curiosité qui a entre autres donné naissance à l’impressionnante base de données Encyclopedia Metallum, fondée au Québec en 2002 et gérée depuis par les fans. 

C’est certainement une telle curiosité pour la découverte qui pousse de plus en plus de métalleux à poursuivre de hautes études en musique. Il n’est plus rare aujourd’hui de rencontrer des interprètes classiques ayant fait leurs dents avec le métal, ou encore des improvisateurs jazz en pâmoison devant la complexité  polyrythmique de Meshuggah.

C’est avec l’objectif avoué de faire du métal que David Therrien Brongo dit s’être inscrit en classique au cégep plutôt qu’en jazz/pop: « Je me suis dit que j’allais être plus proche de ce que je veux faire qu’en batterie jazz. Je sentais que j’étais plus proche en musique classique. Il y avait plus de similitudes. »

Le lien avec le jazz, issu d’une culture davantage axée sur l’improvisation et les formes musicales plus libres, est effectivement moins évident. En revanche, le métal est aussi une forme née d’un contexte relativement défavorisé s’étant sophistiqué à une vitesse remarquable. Comme le jazz, on pourrait bientôt imaginer des programmes en métal s’institutionnaliser, et cela s’observe en temps réel dans certaines institutions à travers le monde (ex : Metal Factory, aux Pays-Bas).

À suivre:  Le diable est dans les détails

Affinités méconnues entre métal et classique / Le diable est dans les détails (4)

par Laurent Bellemare

Les 29 et 30 janvier se tiennent les premières mondiales du programme Voïvod Symphonique, rare manifestation grand public juxtaposant la “grande  culture “ classique avec le monde souterrain du métal. Pourtant, nombreux sont les liens qui unissent ces deux traditions européennes, tant par leur musique que par leur histoire. Néanmoins, ce rapprochement reste méconnu, même chez les plus érudits, notamment chez les musiciens d’orchestre sauf exceptions. Pour démystifier le contexte duquel culmine cette collaboration hors du commun, notre collaborateur et musicologue Laurent Bellemare vous propose ici un brillant survol comparatif des similitudes entre ces deux univers. Voici la quatrième et dernière partie de son excellent dossier.

Un enjeu de cordes vocales

À l’instar de l’opéra, dont le vibrato des solistes et les techniques de projection vocale sont souvent durs à digérer pour le commun des mortels, le métal repousse tant de mélomanes à cause de son approche vocale. 

« Le growl, c’est encore la plus grosse barrière », nous explique Pascal Germain-Berardi pour élucider cette appréhension partagée même par de nombreux musiciens. David Therrien Brongo renchérit en précisant que « la voix c’est ce qui rejoint le plus les gens. On utilise nos cordes vocales tous les jours. De s’imaginer growler, j’imagine que les gens, ça leur fait mal. […] Je ne sais pas si c’est une forme d’empathie, un blocage ou le fait que les gens crient… les gens n’aiment pas la chicane… Encore là, la distorsion [de la guitare], c’est le côté granuleux, le grain qui rappelle aussi le growl de la voix. C’est pas lisse ».

Là aussi, il y a un parallèle à faire avec la musique contemporaine et ses techniques grinçantes et bruitistes. 

David ajoute : « Je suis justement sur une pièce où je passe un archet sur [de la] styromousse. Moi, ça ne me dérange pas, mais il y a des gens pour qui ça fait le même effet que des ongles sur un tableau. Je sais qu’au concert, il y a des gens qui vont sauter sur leur chaise à cet effet là… c’est de la musique classique! »

Le diable est dans les détails

Les mondes classique et métal sont de plus en plus proches, mais ce développement est loin d’être généralisé dans l’imaginaire collectif. Même dans le milieu orchestral, peu d’artistes connaissent la musique métal, ce que l’arrangeur de Voivod Symphonique Hugo Bégin nous confirme. 

Quoi qu’il en soit, il y a heureusement une volonté de l’OSM d’accueillir autre chose que des concerts traditionnels. Mais au-delà d’attirer des métalleux au concert classique, peut-on s’attendre à une fusion progressive des deux milieux culturels? 

Pour Pascal Germain-Berardi et David Therrien Brongo, cette potentielle ouverture est plutôt un effet collatéral du fait de la ponctualité de l’événement: « On va pas créer des nouveaux fans de Chostakovich et Mahler avec Voïvod Symphonique même si c’est une clientèle qui pourrait très bien y répondre ». 

Le succès de ce dialogue culturel consisterait-il  plutôt à présenter des concerts hybrides ou on inviterait les deux genres côte à côte sans les fusionner?

Certes, l’Orchestre symphonique de Montréal appose son sceau de légitimité sur la musique de Voivod, et c’est un bel hommage au regretté guitariste Denis ‘Piggy’ D’amour, un mélomane qui s’intéressait notamment à Karlheinz Stockhausen, Penderecki et Ligeti. 

Le programme permettra aussi de célébrer la complexité avant-gardiste du premier groupe de métal québécois à s’être imposé mondialementl, il y a plus de 40 ans. 

Espérons que Voivod Symphonique laissera sa marque dans le paysage culturel et créera un précédent pour d’autres collaborations. Pour l’heure, les concerts de métal avec orchestre restent des événements très ponctuels, et il est remarquable que Montréal, autoproclamée “capitale du métal” en 2019, en soit l’hôte.

FIN

Voilà notre série Ici Tokyo !

par Rédaction PAN M 360

Voici la porte d’entrée de notre série spéciale de 9 contenus consacrés à la culture musicale à Tokyo. Rupert Bottenberg et Alain Brunet ont passé quelques semaines au Japon le printemps dernier, ce qui les a menés à ce reportage émaillé de compte-rendus et interviews. Enjoy!

Ici Tokyo | teamLab Planets, secteur Toyosu

par Alain Brunet

Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est une vaste zone où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte.

Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps dernier.


Expositions immersives teamLab Planets, 5 avril, Toyosu Area.

À Tokyo, teamLab Planets a un statut comparable à celui de la Société des arts technologiques ou celui du Centre Phi, c’est-à-dire un centre de diffusion et de recherche sur les arts immersifs, c’est-à-dire la réalité augmentée ou virtuelle. Le centre teamLab Planets est situé à Toyosu, une zone industrielle du port en pleine gentrification hi-tech et résidentielle, entre les secteurs de Ginza et d’Odaiba.
L’accès se fait généralement sur réservation, à une heure précise. On y accède par un train léger et automatisé, en fait très similaire au REM, qui donne une excellente vue d’ensemble des environs. Nous trouvons la file d’attente et entrons à l’heure prévue. Le personnel et les écrans de la réception nous invitent à enlever nos chaussures et à rouler nos pantalons jusqu’aux genoux, puis à les déposer dans les casiers prévus à cet effet.

Nous traversons ensuite un couloir de pénombre, puis de lumière, pour arriver dans la première salle, remplie à ras bord de rideaux ou de grilles de cristal à travers lesquels sont projetées des formes et des lumières sur fond de musique d’ambiance. Les chemins à parcourir ressemblent d’abord à un labyrinthe, mais ils mènent finalement au couloir suivant.

Nous nous retrouvons ensuite dans une salle aquatique, où nous entrons dans une vingtaine de centimètres d’eau. On regarde vers le bas et on voit des nénuphars fluorescents et des carpes semblables à celles que l’on voit dans les étangs japonais. Ces projections sont à couper le souffle !
Nous nous retrouvons ensuite dans une pièce remplie de ballons de différentes tailles, avec plus de musique d’ambiance pour correspondre, et diverses lumières projetées sur toutes ces formes circulaires. Les ambiances sonores new-age ne nuisent pas vraiment, mais elles n’étoffent pas l’image comme on pourrait s’y attendre.
Une dernière pièce est consacrée à une immense floraison, accompagnée d’une musique de chambre à la fois instrumentale et électronique, absolument consonante et donc encline aux harmonies néoclassiques dans un contexte ambiant. L’omniprésence des fleurs dans cet univers virtuel s’avère réconfortante, apaisante, un complément plus important à la création visuelle.
La visite est terminée, nous ramassons nos chaussettes et nos chaussures et quittons le TeamLab Planets avec le sentiment que l’impact spectaculaire des technologies l’a emporté sur la profondeur des œuvres au programme.

Toutes les expositions en vidéo ICI

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Ici Tokyo | Un récital de la pianiste Eri Yamamoto au Tokyo Opera City Concert Hall, Nishi-Shinjuku

par Alain Brunet

Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est un endroit où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps dernier.

Rcital d’Eri Yamamoto Piano Recital au Tokyo Opera City Concert Hall, Nishi-Shinjuku, 17 Mars

Vous devez d’abord savoir qu’il y a deux pianistes portant le nom de Eri Yamamoto au Japon. L’une est expérimentée, née et élevée à Osaka, et se produit en tant que jazzwoman aujourd’hui basée à New York… et il y a cette jeune virtuose de Tokyo dont nous avons pu constater le grand potentiel au printemps dernier, plus précisément au Tokyo Opera City Concert Hall. Ce fut une occasion très spéciale d’assister à un concert rempli d’afficionados de la musique classique japonaise, toutes générations confondues, lors d’un récital du dimanche après-midi. Eri Yamamoto a magnifiquement joué et montré ses compétences et sa sensibilité évidente à travers son répertoire, de Chopin à Ravel et Liszt. Quelques semaines plus tard, PAN M 360 l’a jointe à Londres, où elle vit actuellement, pour cette généreuse interview. Nous voulions en savoir plus sur elle et sur la façon dont elle a construit sa jeune carrière depuis son adolescence jusqu’à aujourd’hui. Voici les vidéos d’Eri Yamamoto sur sa page FB si vous cliquez ici.

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Ici Tokyo | Orchestra Ensemble Kanazawa au Suntory Hall, Akasaka

par Alain Brunet

Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, une région où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps dernier.

Beethoven joué par l’Orchestra Ensemble Kanazawa, sous la direction du maestro français Marc Minkowski au Suntory Hall, Akasaka, le 18 mars.

Le 18 mars au Suntory Hall, Main Hall, à 18h30, les Symphonies 5 en do mineur Op.67 et 6 en fa majeur (Pastorale) de Ludwig van Beethoven ont été interprétées par l’Orchestra Ensemble Kanazawa sous la direction du chef d’orchestre français Marc Minkowski. Il s’agit certainement de l’un des orchestres symphoniques les plus renommés du Japon, qui compte plus de trente membres !

Pour un Occidental, assister à un premier concert symphonique de musique occidentale sur le sol japonais est une expérience en soi, quelle que soit la qualité de l’interprétation. Ce fut une prestation solide, mais pas exceptionnelle. L’orchestre existe depuis près de quarante ans et fait preuve d’une grande maturité dans chacun de ses pupitres. On sent ici une culture profonde et intégrée de ce répertoire que tant d’orchestres maîtrisent aujourd’hui.
On sent aussi que le public a une solide culture classique derrière la cravate et la tenue de gala. L’écoute est respectueuse et disciplinée, les applaudissements sont généralement polis, mais nous n’avons pas remarqué une seule ovation, ce qui contraste fortement avec Montréal, la capitale du… standing ovation. Nous l’avons également constaté la veille lors du récital de piano de Yeri Yamamoto.
Pour un Occidental, assister à un premier concert symphonique de musique occidentale sur le sol japonais est une expérience en soi, quelle que soit la qualité de l’interprétation. Ce fut une prestation solide, mais pas exceptionnelle. L’orchestre existe depuis près de quarante ans et fait preuve d’une grande maturité dans chacun de ses pupitres. On sent ici une culture profonde et intégrée de ce répertoire que tant d’orchestres maîtrisent aujourd’hui.
On sent aussi que le public a une solide culture classique derrière la cravate et la tenue de gala. L’écoute est respectueuse et disciplinée, les applaudissements sont généralement polis, mais nous n’avons pas remarqué une seule ovation, ce qui contraste fortement avec Montréal, la capitale du… standing ovation. Nous l’avons également constaté la veille lors du récital de la pianiste Yeri Yamamoto.

L’Orchestra Ensemble Kanazawa (OEK) a été fondé en 1988 avec le soutien de la préfecture d’Ishikawa et de la ville de Kanazawa, au nord-ouest de Tokyo. Le chef d’orchestre Hiroyuki Iwaki a entrepris de créer le premier orchestre de chambre multinational du pays, composé de 40 musiciens du monde entier. L’OEK a un programme chargé, présentant plus de 100 concerts par an à Kanazawa, dans toutes les grandes villes japonaises, y compris au Suntory Hall, l’une des plus importantes salles de concert de Tokyo. L’orchestre se produit également régulièrement à l’étranger.
L’Orchestra Ensemble Kanazawa interprète principalement le répertoire classique, mais encourage également les compositeurs d’aujourd’hui. Plus de 50 œuvres contemporaines ont été créées par l’OEK. Michiyoshi Inoue a été directeur musical après Hiroyuki Iwaki, de 2007 à 2018. Depuis, Marc Minkowski est directeur artistique.

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Ici Tokyo | Kagero, jazz sauvage @ Nepo Club, Mitaka

par Alain Brunet

Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est une région où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps dernier.

Kagero @ Nepo Club, Mitaka, 20 Mars

Kagero est sans aucun doute l’un des petits ensembles les plus lourds sur la planète Jazz , bien au-delà du Japon. Agressif avec un réel attrait hardcore/punk, puissant, sarcastique, presque acoustique mais musicalement violent, sauvage mais hautement qualifié, ce groupe repousse clairement les limites de l’idée d’un quartet de jazz. Au cours de la dernière décennie, il a été dit que Kagero est devenu un  » sujet  » pour les afficionados du jazz au Japon, et nous ne savons pas exactement pourquoi il ne l’est pas encore pour les auditeurs d’art punk et de jazz en Occident.

Depuis 2005, cet excellent groupe a joué et enregistré principalement au Japon et en Asie. Le groupe est composé de Shiromizu à la basse, Ryu « Ruppa » Sasaki au saxophone, Yokoyama Nana au piano (2005-09), Takayuki Suzuki à la batterie (2005-07, 2008-10, 2010-12), Chieko Kikuchi au piano (2010-aujourd’hui), Tomomichi Hagiwara à la batterie (2012-aujourd’hui).

Nous avons pu constater leur grand talent et leur avance au Nepo Club, dans le quartier de Mitaka, en mars dernier. Et nous sommes heureux qu’ils aient accepté de répondre à nos questions. Les voici !

PAN M 360 : Cela fait près de 20 ans que ce groupe se produit et enregistre. Êtes-vous de véritables pionniers du jazz punk au Japon ?

Yu Shiromizu : Nous ne savons pas si nous sommes de « vrais pionniers » ou non, mais nous ne nous sommes jamais inspirés de ce que quelqu’un d’autre a fait.

PAN M 360 : Qu’est-ce qui vous a inspiré pour faire ce mélange de free jazz acoustique et d’esprit punk ? Avez-vous eu des influences précoces dans ce sens ?

Yu Shiromizu : Pour nous, le jazz et le punk sont fondamentalement identiques en termes de « liberté ». En termes de fusion, il n’y a pas d’artistes particuliers qui nous ont influencés, mais nous aimons bien sûr plusieurs artistes dans chaque genre.

PAN M 360 : Avez-vous tous les quatre été formés dans des écoles de musique avant de devenir des professionnels ?

Yu Shiromizu : La pianiste Chieko Kikuchi a étudié le piano aux États-Unis, et les trois autres se sont rencontrés dans le club de musique légère d’une université japonaise ordinaire.

PAN M 360 : Avez-vous suivi les groupes de jazz punk occidentaux comme Lounge Lizards, Tupelo Chain Sex, King Krule, Puma Blue, Tim Berne Caos Totale, Last Exit, The Ex et bien d’autres ? As-tu un coup de coeur pour l’un d’entre eux ?

Yu Shiromizu : Pas du tout.

PAN M 360 : Il y a beaucoup de virtuosité dans votre groupe et aussi beaucoup de bruits violents. Comment voyez-vous cette tension ?

Yu Shiromizu : La technologie et le bruit sont des moyens d’exprimer un sentiment d’urgence et d’exubérance.

PAN M 360 : Certains musiciens japonais m’ont dit que la scène jazz locale avait décliné au cours de la dernière décennie. Qu’en pensez-vous ?

Yu Shiromizu : Je ne sais pas si le jazz a décliné au cours des dix dernières années, mais j’ai l’impression que le jazz devient de plus en plus classique au Japon.

PAN M 360 : Dans ce groupe, vous considérez-vous comme des musiciens de jazz ou comme des musiciens libres se référant au jazz moderne tout en faisant autre chose ?

Yu Shiromizu : Je ne suis pas trop concerné par un tel concept. Je suis conscient que chacun d’entre nous est un musicien indépendant, unique en son genre, et que nous sommes un collectif de musiciens.

PAN M 360 : Y a-t-il beaucoup d’autres groupes de jazz punk au Japon ?

Yu Shiromizu : S’il y en a, j’aimerais être leur ami.

PAN M 360 : Quelles sont vos conditions sociales et économiques en tant que musiciens alternatifs ou de niche au Japon ? Comment gagner sa vie avec la musique dans votre pays ? Vous produisez-vous souvent dans d’autres pays ou sur d’autres marchés ?

Yu Shiromizu : La réalité est que l’écrasante majorité des musiciens au Japon ont également un autre travail. À cet égard, les membres de KAGERO ont de la chance. Ils vivent essentiellement de la production musicale et des concerts, qui entraînent inévitablement de nombreuses dépenses. C’est pourquoi Yu Shromizu(Ba) a son propre club de musique live, NEPO. Dans le passé, il s’est rendu deux fois aux États-Unis avec KAGERO, ainsi qu’en Chine et à Taïwan.

PAN M 360 : Quels sont vos prochains projets en tant que groupe ou en solo ?

Yu Shiromizu : Travailler sur le prochain album, et en tant qu’artiste solo, il travaillera sur un large éventail de projets, de l’expression personnelle à la production de musique commerciale.

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Ici Tokyo | Unhellys, duo iconoclaste @ Nepo Club, Mitaka

par Alain Brunet

Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est une région où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps dernier.

Unhellys @NepoClub, 20 mars

Kim rappe, chante, joue de la guitare basse sur mesure et est également capable de dessiner de belles lignes et riffs avec une trompette de poche. Midi chante également et joue surtout de la batterie à un excellent niveau. Les deux membres génèrent des boucles électroniques passionnantes en temps réel. Au-delà de ces considérations, UNHELLYS est un duo explosif, unique en son genre. Ils semblent absorber tous les genres de la musique contemporaine : rap, hardcore, punk, jazz, dancehall, électronique, noise et même d’autres sous-styles sont au service d’un son cohérent et brillant. À travers ce son, on trouve un vaste corpus de chansons de protestation, une collection très créative de déclarations qui ne manque pas d’humour caustique et d’un grand sens de l’absurde. Spectaculaires, radicaux mais aussi raffinés, les UNHELLYS offrent un spectacle grandiose (avec des lumières et des projections de toute beauté) partout où ils se produisent. Par chance, nous avons pu assister à l’un de leurs concerts intimes au Nepo Club, une petite salle de Tokyo plus précisément située dans le quartier de Mitaka, après quoi nous leur avons demandé cette interview.

PAN M 360 : Bonjour, je suis Alain Brunet de Montréal Canada, pour www.panm360. Je vous ai rencontré lors de votre concert à Mitaka le 20 mars dernier, il y a quelques semaines. J’ai quelques questions à vous poser, les voici !

こんにちは、カナダのモントリオールからwww.panm360のアラン・ブリュネです。数週間前、320日の三鷹公演でお会いしましたね。いくつか質問が

PAN M 360 : Depuis quand travaillez-vous sur ce projet et comment vous êtes-vous rencontrés et avez-vous décidé de monter un groupe ?

 いつからこのプロジェクトに取り組み、どのようにして知り合い、バンドを始めることにしたのですか?

KIM : Nous avons créé UHNELLYS en 1998. Nous étions camarades de classe au lycée. Nous, les moutons noirs, avons commencé à faire de la musique underground.

私たちは1998年頃からUHNELLYSを始めました。高校の同級生です。天邪鬼な私たちはアンダーグラウンドな音楽を始めました。

PAN M 360 : Le processus d’assemblage des genres musicaux et des personnalités a-t-il été long pour aboutir à ce que nous avons entendu lors du concert et sur votre page Bandcamp ?

コンサートやBandcampのページで聴いた音楽のジャンルや個性をまとめるのに、時間はかかりましたか?

KIM : No, it didn’t take long. There’s not much difference between the way I played when I started and the way I play now. I just love loop music.

いいえ、時間はかかりませんでした。始めた頃の演奏と、今の演奏に違いはあまりありません。loopする音楽がとにかく好きなんです。

PAN M 360 : Y a-t-il d’autres groupes de votre type au Japon, c’est-à-dire mêlant le punk hardcore au rap, au funk, au jazz ou à la musique d’avant-garde ?

パンク・ハードコアにラップ、ファンク、ジャズ、アヴァンギャルドなノイズを融合させたようなバンドは、日本には他にいますか?

KIM : Je ne pense pas qu’il y ait quelqu’un d’autre. S’il y avait quelqu’un d’autre, nous déciderions de faire de la musique différente.

他にいないと思います。もし他にいたら私たちは別の音楽を作ることにするでしょう。

PAN M 360 : Vous devez avoir de fortes influences musicales d’Asie mais aussi d’Occident. Est-il pertinent pour vous de mentionner les plus importantes s’il y en a ?

あなたはアジアだけでなく、西洋からも強い音楽的影響を受けているはずです。最も重要なものがあれば挙げてください。

KIM : J’ai été particulièrement influencé par la musique new-yorkaise des années 90. Parmi eux, Soul Coughing est spécial. Je l’écouterai jusqu’à ma mort.

90年代のNYの音楽に特に影響を受けました。その中でもsoul coughingは特別な存在です。死ぬまで聞き続けます。

PAN M 360 : Pouvez-vous décrire certains aspects de vos textes, votre approche poétique, votre humour, votre esprit critique, votre vulnérabilité ou autre ?

あなたの歌詞、詩的なアプローチ、ユーモア、批評的思考、脆弱性など、いくつかの側面について教えてください。

KIM : La plupart de mes textes abordent des problèmes. J’ai abordé la politique, la race, l’énergie nucléaire, les vaccins, l’eau et bien d’autres sujets. Plutôt que de me plaindre de la « réponse » que j’ai trouvée, je reviens sur le problème. L’information circule trop vite. Je veux que vous vous arrêtiez, que vous regardiez en arrière et que vous réfléchissiez. N’oubliez pas l’humour.

私の歌詞は問題提議がほとんどです。政治、人種、原発、ワクチン、水、他にもたくさん扱ってきました。私が考えた「答え」を訴えるのではなく、問題をぶり返すのです。情報の流れはあまりにも早すぎる。立ち止まって、振り返って、考えて欲しいのです。ユーモアも忘れずに。

PAN M 360 : Pouvez-vous vivre de votre musique au Japon ? Quelles sont vos conditions sociales et économiques en tant que musicien ?

日本では音楽で食べていけますか?音楽人としての社会的・経済的条件は?

KIM : Je pense qu’il est difficile de vivre de la musique underground. Mais pour quelqu’un qui aime la musique underground, ce n’est pas un problème.

アンダーグラウンドな音楽で生活するのは難しいと思います。しかしアンダーグラウンドな音楽を愛した人間にとって、それは大したことじゃない。

PAN M 360 : Visez-vous des marchés spécifiques ? Où se situe votre public ?

特定の市場を持っていますか?観客はどこにいますか?

KIM : Le Japon compte beaucoup de petites salles. C’est probablement le plus grand nombre au monde. Les gens qui s’y réunissent acceptent n’importe quel type de musique. Un monde mystérieux et bienveillant.

日本には小さいベニューがたくさんあります。きっと世界で一番あります。そこに集まる人はどんな音楽も受け入れてくれるのです。不思議で優しい世界。

PAN M 360 : Parce que vous créez ce type de musique hybride, votre identité artistique internationale est-elle aussi forte que votre identité japonaise ?

あなたはこのようなハイブリッドな音楽を創作していますが、あなたの国際的な芸術的アイデンティティは、日本的なアイデンティティと同じくらい強いですか?

KIM : C’est vraiment très fort. En fait, le label auquel j’appartiens est un label australien, et 99 % de la musique qui m’influence vient de l’étranger.

強いです。実際所属しているレーベルはオーストラリアの音楽レーベルですし、自分が影響を受けた音楽の99%は海外の音楽なので。

PAN M 360 : Collaborez-vous avec d’autres musiciens ? Avez-vous le sentiment de faire partie d’une grande communauté d’artistes à Tokyo ou ailleurs ?

他のミュージシャンとのコラボレーションはありますか?東京や他のどこかで、より大きなアーティストのコミュニティの一員であると感じますか?

KIM : C’est la meilleure question. J’adore Soul Coughing, et j’ai participé au travail du chanteur de Soul Coughing, Mike Doughty, avec le rap japonais. J’ai le disque en ma possession et j’ai demandé à ma femme de le mettre avec moi dans ma tombe.

最高の質問です。私はsoul coughingを愛していますが、soul coughingのボーカル、Mike doughtyの作品に日本語ラップで参加しました。レコードを所持していますが、墓に一緒に入れてくれと私の妻に頼んであります。

PAN M 360 : Quels sont vos prochains projets ?

次のプロジェクトは?

KIM : J’ai commencé à ne jouer que des percussions et de la voix. Les grands changements prennent du temps, mais nous avons besoin d’inspiration si nous voulons continuer à faire de la musique pendant les décennies à venir.

打楽器と声だけの演奏を始めています。大きな変化のために時間がかかりますが、私たちが何十年先も音楽を続けていくには刺激が必要です。

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Ici Tokyo | Jeff Mills presente The Trip: Enter the Black Hole @ Zerotokyo, Shinjuku

par Rupert Bottenberg


Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est un endroit où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PANM360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet, qui étaient au Japon au printemps dernier.


Jeff Mills presente The Trip: Enter the Black Hole @ Zerotokyo, Shinjuku, 1er avril, 2024

Depuis 2009, Jeff Mills organise des spectacles multimédias sous le nom de The Trip. Figure fondatrice de la scène techno de Détroit, le nom de Jeff Mills est rarement prononcé sans les appellations « parrain » ou « pionnier », et sa fascination pour la science-fiction est manifeste depuis de nombreuses années. C’est ce qui motive The Trip : Enter the Black Hole, la dernière itération de sa série d’événements multimédias, dont la première mondiale a eu lieu le jour du poisson d’avril à Zerotokyo, un vaste espace de club facile à parcourir, situé dans le ventre souterrain du complexe de divertissement Tokyu Kabukicho Tower récemment érigé, au cœur de la zone Kabukicho de Shinjuku, qui est par ailleurs un lieu de pacotille et d’ordure.

Vêtu d’une combinaison d’astronaute d’époque et assis à un poste de travail tout aussi antique et encombré de consoles (avec un téléphone à cadran rouge, sans doute pour alerter Houston en cas de problème), Mills a livré un délicieux mixage en direct tout en servant de maître de cérémonie pour un spectacle comprenant de la danse contemporaine abstraite, des projections hypnotiques et deux apparitions de Jun Togawa, une actrice/chanteuse superstar d’avant-garde depuis les années 1980.

Assumant le rôle d’une sorte d’oracle intergalactique, Togawa a été littéralement roulée sur scène – sa tenue volumineuse, de la taille de nombreux appartements tokyoïtes, était l’œuvre du costumier du spectacle, Hiromichi Ochiai, fondateur de la marque FACETASM. Togawa a prononcé ses soliloques dans un sombre sprechgesang, bien que, selon nos sources (le rendez-vous de votre correspondant pour la soirée), ce qu’elle bredouillait était en grande partie absurde.

Ce manque de substance était en accord avec les danseurs peu exceptionnels chorégraphiés par Hiroaki Umeda, et surtout avec le peu de pertinence scientifique des débats. On peut affirmer sans crainte que Mills ne remplacera pas Neil DeGrasse Tyson en tant qu’autorité en matière d’espace extra-atmosphérique. Divisée en cinq chapitres, l’émission offre peu de faits concrets sur la physique quantique et les phénomènes cosmiques, mais utilise plutôt un sentiment général de grandeur et d’émerveillement comme tremplin pour les images fascinantes créées par le fondateur de Cosmic Lab, C.O.L.O (dont le pseudonyme signifie Cosmic Oscillation Luminary Operator).

Tout cela était à la fois au service de la merveilleuse musique que Mills assemblait sur place, et lié par elle. Les chapitres de l’émission comprenaient des titres tels que « Abstract Time » et « Time in Reverse », et en effet, sa musique pour cette émission transcende toute période spécifique de l’évolution de l’EDM, et toute obligation d’établir ce qui pourrait venir ensuite. En fait, pour un mix dont le thème est le froid, l’obscurité et les confins de l’espace, on a souvent l’impression qu’il est assez chaleureux et, si j’ose dire, confortablement ancré dans son pays (le doux grondement d’un Hammond B-3 qui se glisse dans la palette sonore de Mill y a sans doute contribué). Pas de quoi se plaindre : c’est pour Mill que le public s’est principalement déplacé, et il n’a pas déçu.

Mills qualifie l’ensemble d' »opéra cosmique » et, bien qu’il n’ait aucune signification scientifique, il s’agit néanmoins d’une œuvre d’art solide et satisfaisante pour la génération rave. Il s’agit d’un spectacle sur l’univers qui a un attrait assez universel, mais qui est empreint d’une forte sensibilité japonaise – même le programme souvenir distribué au moment du départ contient un manga complet, dont Mills lui-même est l’acteur principal.

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Ici Tokyo | Polysics et Helsinki Lambda Club, Peanut Butters @ Fever, Shimokitazawa

par Rupert Bottenberg


Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est un endroit où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PANM360 a le plaisir de rendre compte.

Cela fait près de trois décennies que les Japonais du « pogo punk en technicolor » proposent leur mélange de rock garage et d’électronique rétro (ils sont nommés ainsi en l’honneur d’un synthétiseur Korg). On ne s’en rendrait pas compte en écoutant le concert de Polysics au Fever, une salle de taille moyenne plutôt banale, un peu à l’écart des sentiers battus de Shimokitazawa, le quartier hipster le plus en vue de Tokyo. Le groupe est connu pour son niveau d’énergie élevé sur scène, et lorsque cette scène se trouve dans une partie de la ville qu’ils chérissent manifestement et où ils jouent fréquemment, ils sont difficiles à battre à cet égard.

Vêtus de leurs combinaisons jaunes et de leurs lunettes de soleil à barre de censure, le fondateur et leader Hiroyuki Hayashi et sa troupe ont une dette énorme envers Devo, et ils ne s’en cachent pas. Ils ont repris, cité et même collaboré avec Devo au fil des ans, tout en reconnaissant l’inspiration de P-Model (le premier groupe new-wave de Susumu Hirasawa) et, bien sûr, de Yellow Magic Orchestra, toujours vénéré au Japon.

Les premières parties étaient frustrantes : le rock indé générique de Peanut Butters était tout à fait oubliable et les inflexions rétro d’Helsinki Lambda Club(légèrement funk et psychédélique) n’étaient pas beaucoup plus engageantes. Polysics s’est rattrapé avec un set puissant, parsemé d’échanges rapides avec Hayashi, tandis que le bassiste Fumi semblait se délecter de ses bêtises. Alors que leur dernier disque (parmi des dizaines) est sorti il y a cinq ans, espérons que Polysics trouvera une raison de repartir en tournée internationale, et vite.

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Ici Tokyo | McDog Works/Namara Mazaru underground idol showcase @ Loft X, Shinkoenji

par Rupert Bottenberg


Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est une région où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début précoces sont très appréciées et l’énergie même des publics locaux est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps.

McDog Works/Namara Mazaru underground idol showcase @ Loft X, Shinkoenji, 26 mars

Grâce à des groupes comme Kyary Pamyu Pamyu, Babymetal, plus récemment Atarashii Gakko ! et l’industrie artisanale AKB48 (qui détient le record du monde Guinness du « plus grand groupe pop », avec 90 membres en rotation), la modalité pop de longue date et typiquement japonaise appelée aidoru (« idole ») s’est imposée au niveau mondial ces dernières années. Des imitateurs sont apparus dans toute l’Asie et, dans le cas de la vague K-pop de Corée du Sud, ils sont parvenus à rivaliser avec la scène japonaise originale, voire à l’éclipser. C’est dommage, car en termes de production musicale, d’originalité, de spécificité et, souvent, de bizarrerie, les Japonais restent imbattables.

La meilleure façon de décrire l’Aidoru est de parler d’interprètes féminines de chant et de danse, en solo ou en unités coordonnées avec des costumes assortis, qui se produisent sur des morceaux préenregistrés. Les revenus proviennent moins des billets de concert et de la vente de disques que de la publicité, des produits dérivés et, surtout (et c’est problématique), de micro-moments de joie artificielle à prix élevé avec des fans masculins solitaires, ce qui illustre parfaitement le principe de l’interaction parasociale. Tout cela est un peu effrayant, plus qu’un peu triste et, après quelques verres, plutôt hilarant à observer.

La scène des idoles a ses superstars, dont certaines sont mentionnées ci-dessus, et, en dessous, un niveau de jeunes talents commerciaux, grand public et polis. L’élément le plus intéressant, cependant, est le mouvement chika aidoru, ou idole underground. Confinés à des salles minuscules et à des prix de poche, les chika aidoru sont peut-être les outsiders de l’industrie, mais à part peut-être les spectacles époustouflants de KPP, c’est sa composante la plus intéressante.

Les idoles font partie de l’écurie d’une agence de management, et deux de ces agences, McDog Works et Namara Mazaru, ont fait équipe pour ce showcase dans le minuscule club de sous-sol Loft X, en présentant trois groupes chacune. Les ouvreurs, Chicken Blow the Idol, fraîchement revenus d’une tournée aux Philippines et vêtus d’ensembles vintage en pied-de-poule, étaient probablement le groupe le plus fort et le plus uni de la soirée, mais seulement par une petite marge. Le niveau d’énergie et l’ambiance attrayante sont restés dans le rouge tout au long de la soirée, bien au-delà de ce que l’on pourrait raisonnablement attendre d’un concert en milieu de semaine dans une salle en sous-sol, avec peut-être deux douzaines de participants en tout.

Ils ont été suivis par Tokyo Psychopath, le plus punk rock du groupe par son attitude et son apparence, qui semble s’adresser avec précision à un public de jeunes lesbiennes. L’un des membres du quatuor manquait à l’appel, mais les trois présents ont compensé avec un set déjanté et maladroitement chorégraphié, qui a culminé avec le membre Oni Gunso perché sur un escabeau planté au milieu de la piste de danse, autour duquel un « cercle de la mort » (mosh pit) très poli et attentionné a spontanément fait irruption.

Kuroguro a suivi, et comme leur nom l’indique, le noir était le nouveau noir lorsqu’il s’agissait de tailler leurs tenues –un look de Lolita gothique à fleur de peau avec un soupçon de militarisme inquiétant. Le fait que trois des quatre membres soient des membres à part entière de Kyary Pamyu Pamyu est également quelque peu déconcertant. C’est sans doute un avantage.

Avec leurs robes bouffantes et ornementées, VS. VERSE étaient probablement les plus proches, en termes de style vestimentaire, des groupes d’idoles de niveau moyen du quartier d’Akihabara, bien que, comme les autres groupes de la soirée, leur son s’appuie fortement sur le punk rock et des explosions périodiques de cris, pour contrebalancer la néoténie sucrée et calculée que le modèle d’idole exige en général.

NEOTOKYO-TRIBE, dont le nom fait référence à plus d’un anime classique du tournant des années 90, étaient vêtues de tenues blanches exceptionnellement légères. Un haut de bikini sournois a laissé une pauvre fille au bord permanent d’un dysfonctionnement de la garde-robe. Il convient de mentionner que, contrairement à la plupart des autres formations d’idoles, la musique de NEOTOKYO-TRIBE est produite par un membre du groupe, Panya Melt. Himegoto Zettaichi (qui se traduit approximativement par « valeur absolue de la princesse ») a clôturé la partie musicale de la soirée. Ils ont abandonné leur look habituel, des tenues d’affaires noires et grises asymétriquement fracturées, pour un mélange loufoque d’écossais, de redingotes Pollyanna et de haori éclaboussants, afin de compléter leur chorégraphie particulièrement ludique et inspirée.

Une fois la musique terminée et les lumières allumées, l’inévitable processus d’après-spectacle de la scène idolâtre s’est mis en branle. Les différents groupes se sont rassemblés pour que le public qui s’attardait (en nombre égal à celui des artistes) fasse la queue, distribue des cadeaux et se laisse aller à des bavardages ineptes avec eux (pour un coût d’environ 10 $/trois minutes). Votre humble correspondant ne peut pas en dire plus sur cet aspect, car sa poignée de yens a été mieux utilisée pour des boissons mélangées au bar, mais ce qui est certain, c’est que pour l’énergie absurde, l’électro-pop-punk accrocheuse bien que formulée (une sorte de bubblegum du 21ème siècle), et le spectacle divertissant, la scène idol underground du Japon est difficile à surpasser.

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Ici Tokyo | Neko Hacker @ O-East, Shibuya

par Rupert Bottenberg

Tokyo, l’une des villes les plus peuplées du monde et certainement l’une des plus intéressantes, est une région où les activités intéressantes ne manquent jamais, y compris les options musicales dans les innombrables « live houses », ou bars à concerts, disséminés sur le territoire municipal. Les musiciens et les amateurs japonais ont depuis longtemps fait preuve d’une soif de sons étrangers et d’un respect éclairé, de sorte qu’il est facile de trouver du rock, du reggae, du jazz et bien d’autres choses encore. Pour le visiteur étranger, ce sont les créations et interprétations typiquement nationales qui sont les plus intéressantes. Bien que les billets ne soient pas bon marché, le système de réservation en ligne est pratique (et honorablement dépourvu de frais supplémentaires perfides), la qualité du son est prise au sérieux, les heures de début sont très appréciées et l’énergie même du public local est stupéfiante. Voici un quatuor d’événements musicaux du début du printemps dont PAN M 360 a le plaisir de rendre compte. Récits de Rupert Bottenberg et Alain Brunet qui étaient au Japon au printemps dernier.

Neko Hacker @ O-East, Shibuya, 23 mars 2024

L ‘une des nombreuses salles sous la bannière O dans le quartier éternellement animé de Shibuya, toutes détenues par le géant du streaming Spotify, O-East ne peut néanmoins pas être blâmée pour sa propreté, ses excellentes lignes de son et de vue, et son espace qui est une priorité dans une mégapole aussi dense et vertigineuse. La capacité de la salle (1 300 personnes) a néanmoins été entièrement occupée par le public enthousiaste (à la limite de la frénésie), dont peu avaient dépassé l’âge minimum de consommation d’alcool, fixé à 20 ans au niveau national. Certes, il s’agissait d’un spectacle gratuit (avec une demande de dons à la fin du concert), mais on ne peut nier la vénération féroce du public pour Neko Hacker, un duo et des amis qui ne sont guère connus en dehors du Japon.

Cela devrait changer, car le duo principal, le guitariste et producteur Sera et le parolier et auteur-compositeur Kassan, s’est donné pour mission depuis 2018 de « répandre la musique japonaise dans le monde ». Ce qu’ils font, c’est un amalgame presque parfait des sons contemporains de la culture pop du pays. Ils l’ont baptisé « kawaii future rock », c’est-à-dire « kawaii X EDM X rock ». La première partie, qui signifie « mignon » en japonais, est représentée par l’omniprésence de l’art des fans d’anime shoujo (les avatars du duo, qui apparaissent sur les pochettes de leurs disques et sur l’image ci-dessus, sont deux techno-coquettes, l’une avec des cheveux couleur pêche, l’autre turquoise à la Hatsune Miku), et par les jeunes femmes qui font office de chanteuses invitées, déboulant sur scène juste au moment où les pistes vocales préfabriquées de Kassan ne suffisent plus à les faire passer. Les deux autres ingrédients se manifestent sous la forme de jams vidéo-ludiques soutenues par des grooves trance et complétées par des riffs de guitare endiablés.

Cet élément rock a été renforcé dans la dernière partie du concert par l’apparition soudaine d’un trio heavy-metal complet (basse, batterie et une deuxième guitare) – tout à fait inutile, tout à fait drôle et agréable. Le tout était complété par un barrage vidéo sur l’écran de fond, une soupe chaotique de graphiques 8-bit et de filles chibi cyberpunk en dessin animé.

Ce qui est indéniable dans la musique accélérée et joyeusement exagérée de Neko Hacker, reflétant une tendance omniprésente dans le rock indépendant japonais, c’est l’esprit prononcé du ganbatte, un encouragement japonais qui pourrait s’expliquer par quelque chose comme « fais de ton mieux, nous croyons en toi ». Assaillis par le déclin démographique, la récession économique et l’anxiété environnementale, les Japonais ont du mal à faire preuve d’optimisme ces jours-ci, mais malgré cela, ou peut-être à cause de cela, les jeunes s’en emparent et en font un bruit délicieux.

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