Après Luc De Larochellière à Cash City et Jean Leloup à Paradis City, voici Marie-Gold à Baveuse City. La rappeuse a d’abord ébauché cette ville fictive sur un mixtape à l’époque de Règle d’or, son premier album complet fort bien reçu en 2020. De fil en aiguille, les idées se sont transformées en plan d’urbanisation et Baveuse City est née (pour plus de détails sur cette genèse, lisez l’entrevue de Pan M 360 avec Marie-Gold). Il s’agit donc d’un véritable album urbano-concept, comme l’ArchAndroid de Janelle Monáe où la chanteuse personnifiait l’androïde Cindi Mayweather venue sauver les citoyens de Metropolis (les 23 dernières secondes de la pièce Bienvenue sont d’ailleurs très « janelliennes » dans le rythme). Treize pièces entrecoupées de quatre interludes. Dans le cas qui nous occupe, Marie-Gold devient La Baveuse, un alter ego qui n’a pas la langue dans sa poche. Elle règne sur Baveuse City en balançant sans filtre tout ce qu’elle pense. Il en résulte des passages d’une beauté grave (« Elle en a lavé – Elle en a bavé – Et si quelconque idée lui a glissé entre les doigts – Elle en érigera – Une statue », dans À bientôt) ou d’une causticité hilarante (« Mes haters sont consanguins et ils s’prennent pour Eminem – Ta blonde a dit qu’a s’en vient pis qu’t’as un p’tit M&M », dans Pas de papas). Qu’importe le registre, les thèmes – misogynie, écologie, médias, politique – sont habilement amenés et les mots donnent à réfléchir. Musicalement, les beats bûchent et les arrangements convainquent, tout comme les invitées C’nee Starlette et Chloé KDL. À Baveuse City, on doit s’attendre à la vérité sans fard.
