Dans le labyrinthe Mothland avec Yoo Doo Right + Victime + We Owe

par Lyle Hendriks

Il n’y a pas de fête comme celle de Mothland. Avec une mer de spectateurs vêtus de noir, de la bière de merde qui coule à flot et un buzz industriel, c’est une scène familière qui s’offre à nous au Théâtre Plaza pour la sortie du double album de Victime et Yoo Doo Right.

Tout d’abord, nous avons assisté au tout premier concert de We Owe, le projet solo de Christopher Pravdica (Swans, Xiu Xiu). Armé de sa basse et soutenu par Brian Chase (Yeah Yeah Yeahs) à la batterie, Pravdica s’est lancé dans un pot-pourri de bruits industriels induisant la transe, comme si un équipement d’excavation lourd était retourné pour la première fois depuis des décennies.

Avec une sorte d’effet qui double sa basse, We Owe sonne comme le travail de bien plus qu’un duo, les deux maniant habilement leur instrument avec une aisance ludique satisfaisante. Chaque virtuose du grincement semble avoir des parties plus composites les unes que les autres, comme une tour de Jenga sonore de plus en plus haute qui, contre toute attente, se tient toujours debout à la fin. Pour les amateurs d’instrumentaux aventureux et hypnotiques, le deuxième concert de We Owe (quand il aura lieu) ne manquera pas de plaire.

Victime, qui a présenté son plus récent album, En conversation avec (2024), était également de la partie. Il y a une urgence dans ce trio power-rock post-tout qui frise parfois la douleur, la chanteuse Laurence Gauthier-Brown se dédoublant souvent en délivrant des proclamations grondantes et des climax catalytiques. Libre, agressif et incroyablement abstrait, le son de Victime vous fait grimper dans la colonne vertébrale avec ses basses inquiétantes, ses guitares stridentes et ses percussions frénétiques et imprévisibles. C’est un son qui nie la commodité du drame, insistant sur sa propre tapisserie compliquée d’influence qui semble impossible à analyser. S’il semble que j’essaie d’expliquer le son de Victime, c’est parce que c’est le cas. Si vous aimez la rugosité, Victime est plus qu’heureux de vous satisfaire.

Enfin, c’était l’heure des chouchous montréalais Yoo Doo Right, dont le son a été devancé par leur installation scénique tout à fait ridicule, composée de piles d’amplis imposantes. En regardant chaque ampli s’allumer, j’ai enfoncé mes bouchons d’oreille et me suis préparé au bruit. Le nouvel album de Yoo Doo Right, From the Heights of Our Pastureland, est tout à fait anxiogène – des respirations rapides et peu profondes qui n’atteignent jamais le fond de vos poumons, laissant vos épaules se soulever et votre cœur s’emballer. Ils traversent changement après changement, ne restant jamais au même endroit assez longtemps pour vous permettre de reprendre pied. La pochette de l’album (une tornade diaboliquement apocalyptique) ne pourrait pas être plus appropriée à la musique. C’est un maelström infernal, des débris et de la poussière qui défilent plus vite que vous ne pouvez les identifier, tandis qu’un grondement grave et effroyable emplit votre corps au-delà de ses limites.

Heureusement pour moi, il y a eu un répit bienvenu vers la fin du concert, lorsque le groupe s’est lancé dans le morceau « Lost in the Overcast », avec une section sombre mais magnifique de deux trompettistes invités (qui ont été complètement noyés par un mur de basse pour le reste de la performance). Ce morceau donne l’impression que les nuages se dissipent, que les rayons du soleil s’approchent prudemment et embrassent les cicatrices que la tempête a laissées derrière elle. C’est magnifique, complexe et contemplatif, et c’est le point culminant de leur set. Après cela, nous avons eu droit à quelques morceaux plus anciens du trio original, qui semblait bien décidé à infliger de graves dommages auditifs à la plus grande partie du monde possible. Malgré mes oreilles qui bourdonnaient, c’était un plaisir de voir Yoo Doo Right faire ce qu’il fallait pour ses fans.

Tout le contenu 360

Jaco – Plan F

Jaco – Plan F

JACO compte bien réussir son Plan F

JACO compte bien réussir son Plan F

The TWO, un duo blues improbable

The TWO, un duo blues improbable

Soir de jazz symphonique à Laval

Soir de jazz symphonique à Laval

Erika Hagen – Pouvoirs Magiques

Erika Hagen – Pouvoirs Magiques

Big Band de l’Université de Montréal et Marcus Printup : de la grande visite et du très bon jazz

Big Band de l’Université de Montréal et Marcus Printup : de la grande visite et du très bon jazz

Jeannot Bournival, éminence pas vraiment grise de Saint-Élie-de-Caxton

Jeannot Bournival, éminence pas vraiment grise de Saint-Élie-de-Caxton

OSM | La programmation 2025-26 présentée par la direction: faites vos choix!

OSM | La programmation 2025-26 présentée par la direction: faites vos choix!

Critique Love… minerais critique dans le sous-sol montréalais

Critique Love… minerais critique dans le sous-sol montréalais

Laurence Hélie – Tendresse et bienveillance

Laurence Hélie – Tendresse et bienveillance

De Zigaz à Charlie Juste

De Zigaz à Charlie Juste

Avant de s’asseoir seule au piano, Ingrid St-Pierre répond

Avant de s’asseoir seule au piano, Ingrid St-Pierre répond

Virginia MacDonald, étoile montante de la clarinette avec l’ONJM

Virginia MacDonald, étoile montante de la clarinette avec l’ONJM

Lionel Belmondo , Yannick Rieu et l’OSL: jazz symphonique autour de Brahms, Ravel et Boulanger

Lionel Belmondo , Yannick Rieu et l’OSL: jazz symphonique autour de Brahms, Ravel et Boulanger

Louise Forestier et Louis Dufort dans le nid de la Vieille corneille

Louise Forestier et Louis Dufort dans le nid de la Vieille corneille

Université de Montréal : une relève placée sous de bonnes étoiles

Université de Montréal : une relève placée sous de bonnes étoiles

Bon Iver – SABLE, fABLE

Bon Iver – SABLE, fABLE

Une nuit rouge et bleue avec Zaho de Sagazan

Une nuit rouge et bleue avec Zaho de Sagazan

Stéphanie Boulay – Est-ce que quelqu’un me voit? 

Stéphanie Boulay – Est-ce que quelqu’un me voit? 

Magnifiques Héritières

Magnifiques Héritières

Stéphanie Boulay: album guérison, album reconstruction

Stéphanie Boulay: album guérison, album reconstruction

Joni Void veut que vous « regardiez des films expérimentaux dans le club » ou à La Lumière

Joni Void veut que vous « regardiez des films expérimentaux dans le club » ou à La Lumière

Marcus Printup à l’UdeM : sagesse, générosité, musicalité

Marcus Printup à l’UdeM : sagesse, générosité, musicalité

Pascale Picard replonge dans la création

Pascale Picard replonge dans la création

Inscrivez-vous à l'infolettre