Black Samson, the Bastard Swordsman de Wu-Tang Clan & Mathematics frappe comme un cypher venu du monde des esprits – brut, mythique et imprégné de l’ADN des guerriers Shaolin. Mathematics, l’arme secrète du Clan en matière de mixage et de DJ depuis un certain temps, emplit l’espace en créant des beats faisant écho au fantôme de 93, mais avec des lames plus tranchantes et des ombres plus profondes. C’est plein de nostalgie et de continuité spirituelle pour les versets sacrés du Wu-Tang. On peut compter ici sur des rimes de RZA, GZA, Method Man, Raekwon, Ghostface Killah, Cappadonna, Inspectah Deck, U-God, Masta Killa, les neuf membres vivants du Wu-Tang, pour la première fois depuis l’album Once Upon a Time in Shaolin de 2015.
D’entrée de jeu, Sucker Free City se déroule comme une bobine perdue de The Mystery of Chessboxing. Kurupt est aux côtés de l’état major du Wu. L’énergie est à son comble. Les kicks martèlent. La caisse claire crépite comme un feu de bois dans un dojo. Mandingo est un pur rap de style épée : Raekwon et Deck crachent des mesures comme s’ils gravaient des commandements divins dans le béton, tandis que Method Man les lisse comme de la soie sur de l’acier. On dirait du Wu à l’ancienne.
Mais c’est Claudine qui recentre l’âme de l’album, avec Ghostface Killah pleurant sa mère sur un sombre sample de soul et Nicole Bus chantant comme si elle syntonisait les dieux. Ce n’est pas seulement une chanson. Vous le sentez dans votre poitrine.
Ce qui est fou, c’est l’impression de cinéma qui se dégage de tout cela – Cleopatra Jones et Warriors Two, Cooley High sont intitulés comme des films VHS de la vieille école, et c’est ainsi qu’ils sont joués. Ils sont granuleux, crasseux, pleins d’arrogance et d’avancées au ralenti. L’apparition de Benny the Butcher n’est pas un gadget, c’est un passage de flambeau entre deux époques de crudité.
Black Samson est plus qu’un retour en arrière, c’est un bilan qui poursuit la saga. Le Wu-Tang n’a pas besoin de se réinventer car son modèle tient toujours. C’est du boom bap pour l’apocalypse, craché avec la sagesse d’hommes ayant vu des royaumes s’élever et s’écrouler. The Bastard Swordsman swingue!