Prolifique depuis toujours comme le sont l’Américain Bob Dylan et le Canadien Neil Young, l’Irlandais Van Morrison récidive avec pas moins de 23 reprises et adaptations originales de musiques traditionnelles. Renouons ici avec la connaissance profonde et la grande maîtrise de toutes formes anglo-américaines, incluant le legs celtique dont Van the Man est lui-même directement tributaire.
Moving on Skiffle couvre les expressions en vogue durant la première moitié du siècle précédent: skiffle, blues, boogie-woogie, folk, country&western, Texas swing, bluegrass, R&B de la première heure, zydeco cajun, jazz primitif, gospel, doo-wop, folkllore celtique, rock’n’roll. Tous ces styles glissent comme du beurre dans la poêle de Van Morrison, inutile de le préciser.
Depuis des lustres, l’homme de 77 ans s’entête à jouer ce rôle de créateur musicologue à la recherche des pépites d’un passé auquel il s’accroche. Il remet ainsi en marche sa puissante machine de musique pour l’enregistrement d’un 42e album, énoooorme fournée de musiques traditionnelles et de reprises (Hank Williams, Elizabeth Cotten, Red Nelson, Dickie Bishop, Leroy Carr, Jim Reeves, Jimmie Rodgers, Washboard Sam, Hank Snow). Ce répertoire est réarrangé par le maître qui en respecte impeccablement l’esprit – voix proverbiale du chanteur et multi-instrumentiste, orgue Hammond, harmonica, saxo, guitares, piano, violon, basse, batterie, choeurs.
Brillamment, Van the Man ravive cet esprit du skiffle, si cher à l’époque de sa propre adolescence et cet artiste oublié, l’Écossais Lonnie Donegan qui en fut la bougie d’allumage au Royaume-Uni, avant que le blues et le rock ne galvanisent les jeunes musiciens de l’époque… aujourd’hui septuagénaires et octogénaires.
Passéiste à l’extrême? Absolument, mais pour les bonnes raisons dans le cas qui nous occupe, quoi qu’on pense de ses inclinations conspirationnistes mises en lumière pendant la pandémie, quoi qu’on pense de son obstination à regarder (surtout écouter) derrière plutôt que devant. On ne pourra nier l’expertise absolue de Van Morrison en la matière, et le plaisir évident qu’il prend à poursuivre ce voyage dans les décennies où furent posées les bases de la musique populaire moderne.