Tout mélomane féru de musiques violentes mais aussi de subtilités rock doit se pencher sur le quatrième opus studio de The Armed, du Michigan, d’abord associée à l’esthétique punk (vers 2009), progressivement reconvertie au metalcore, au mathcore, au bruitisme expérimental. Oui, il y dans Ultrapop a ces averses acides, ces fortes émanations de carburants fossiles à indice d’octane très élevé, cette frénésie hardcore. Il y a, bien sûr, la ration attendue de cris, rugissements, grognements individuels ou collectifs. Or il y a aussi des chorus rassembleurs typiques des hymnes grunge ou même de la pop rock, ce qui produit un contraste inédit avec la saturation dominante. Les beats exploitent différents patrons rythmiques (binaires, ternaires, mesures composées) sans négliger un excellent groove rock que suivent allègrement les guitares saturées, effets de pédale, couches électros, voix ou choeurs fondus dans le maëlstrom. Quiconque est rébarbatif aux expressions hardcore continue de l’être et… quiconque aime profondément le rock pour ce qu’il est peut tomber de sa chaise. Douze baffes dans ta face, tu en redemandes et il n’y a strictement rien de maso là-dedans. La violente exultation ici proposée relève d’un mélange rare de styles exécutés dans un mix volontairement embrumé. Du début à la fin, aucune baisse d’intensité dans le brouillard, malgré les variations f formelles et les fondus enchaînés de styles. Le tout coiffé à la fin par une participation de Mark Lanegan, carrément magistral. On ne s’étonnera pas que le guitariste de Converge, Kurt Ballou, eut mixé leur premier album en 2009, These Are Lights. Ça marque… Une douzaine d’années, The Armed a fait le chemin vers ce grand album rock. Ça marquera aussi. Ultrapop.
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