Avec Phosphene Journal, on a l’impression d’être perdu en pleine ville sous une pluie torrentielle. C’est du moins ce que j’ai ressenti en écoutant le nouvel album du multi-instrumentiste Tamir Barzilay. Sur fond de synthétiseurs, de boîtes à rythmes, de piano et de synthétiseurs argentés, et d’une basse épaisse et douce, Barzilay crée un voyage pastiche inattendu que l’on pourrait classer dans le genre du jazz ambiant expérimental. Connu principalement comme batteur, Barzilay va ici bien au-delà du kit, créant un album fluide qui brouille les pistes. C’est un effort audacieux et tranquillement captivant qui mérite une écoute approfondie.
L’album met un peu de temps à prendre forme, avec les deux premiers titres « Fika » et « Najma » qui semblent un peu sans but, mais il trouve son équilibre atmosphérique et groovy avec le troisième titre, « Cage The Escape », en particulier pendant l’outro au saxophone lounge (Daniel Rotem), aux accents fumants et jazz. On retrouve cette ambiance un peu plus tard avec l’enjoué « Sailing ».
Il y a aussi pas mal d’analog bleed ou de tape fuzz mélangés tout au long de l’album, délibérément pour lui donner une qualité nostalgique et poussiéreuse. Certains morceaux planent dans une sorte de limbes ambiants, beaux mais statiques, tandis que d’autres flirtent avec des grooves qui n’atterrissent jamais complètement, laissant seulement la place au morceau suivant. « The Hungry Moon », avec Sharada Shashidhar, flotte dans l’air avec des voix respirantes et une instrumentation patiente.
On sent que Barzilay recherche une cohésion cinématographique sur un morceau comme « Heavy Stepper », mais il y a aussi un sentiment de retenue. Chaque élément est placé avec intention. Rien ne semble précipité ou forcé. Il peut être facile de se perdre dans la sauce jazz improvisée, mais Barzilay ne fait que flirter avec cette notion.
Cela dit, Phosphene Journal ne cherche pas à submerger l’auditeur avec des accroches ou de la grandiloquence. Il s’agit davantage de sensations que de structures – de l’espace entre les notes, du résidu du son. Phosphene Journal est plus une affaire d’impressions que de clarté – des éclairs de lumière derrière les paupières, un journal intime écrit par fragments. Même si tout ne colle pas, il y a suffisamment de moments de résonance pour justifier une nouvelle écoute.