Ross Lee Finney (1906-1997) n’est sans doute pas le plus connu des compositeurs américains, et pourtant ! Il est tout de même lauréat d’un prix Pulitzer en 1927 pour son premier quatuor à cordes (il en composé huit), et son catalogue est fort bien fourni, même s’il a consacré la majeure partie de sa vie à l’enseignement (à l’Université du Michigan, où il a fondé un studio de musique électronique en 1965).
L’album couvre une décennie, soit de 1962 à 1973, une belle époque pour le développement de la musique contemporaine. Ce sont les Three Pieces — Strings, Winds, Percussion, and Tape qui ouvrent le programme. Moins de 10 ans après Déserts (1954), d’Edgard Varèse, dans laquelle les « interpolations électroniques » étaient placées entre les parties instrumentales, la musique mixte s’était déjà bien développée. Chez nous, par exemple, c’est dès 1955 que Serge Garant composait Nucléogame, une pièce dans laquelle la bande s’intègre parfaitement à l’ensemble instrumental (sextuor de vents et piano). C’est aussi le cas ici, mais avec un orchestre au grand complet, une section de percussion très dynamique et une écriture nerveuse. C’est une œuvre puissante et une autre superbe preuve que les musiques électronique et symphonique peuvent s’accorder à merveille. La discographie de Finney n’est pas imposante et il semble bien que ce soit un premier enregistrement (bien que le livret n’en fasse pas mention) ; une belle découverte et surtout un autre bon coup du BMOP, qui les accumulent.
Landscapes Remembered (1971) est une pièce pour petit ensemble dont le thème tourne autour de la mémoire et de la nostalgie (celle du compositeur pour sa ville natale). Elle est, nous dit-il, l’autre face de sa pièce Summer in Valley City (la ville en question), qui se rapporterait à des souvenirs plus légers. C’est aussi une pièce pour laquelle Finney n’a pas attendu de commanditaire ; « My work was written because I wanted to write it ». Ce n’est pas l’œuvre la plus forte du disque, mais elle accompagne bien les deux autres.
La quatrième (et dernière) symphonie de Finney est très animée, très urbaine, avec quelques accents varésiens. Quelques espaces de calme sont dispersés à travers les trois mouvements comme pour donner à l’auditeur·trice des moments pour respirer. Ce programme en forme de montagnes russes tient en haleine. Les trois premières symphonies de Ross Lee Finney ont été enregistrées par Robert Whitney avec le Louisville Orchestra et ça donne envie d’aller voir de quoi il retourne.