Ces accords synthétiques qu’on entend à profusion sur Paradigmes, proviennent-ils du passé ou de l’avenir? Pourquoi ces agencements de genres en apparence antinomiques sont-ils aussi cohérents? Ces arrangements foisonnants s’irisent-ils par synesthésie, lorsque l’on ferme les yeux? Tant de questions qui ne nécessitent pas nécessairement de réponses. Ce qui importe, c’est d’écouter et de réécouter cet album, le troisième du groupe La Femme après Mystère en 2016 et Psycho Tropical Berlin en 2013. Au duo de base Marlon Magnée et Sacha Got se greffent Noé Delmas, Lucas Nunez Ritter et Sam Lefèvre.
Il n’y aurait donc ironiquement plus de femme au sein de La Femme, depuis les départs de Clémence Quélennec et de Clara Luciani? Peut-être pas dans l’alignement officiel de la formation, mais dans les faits on entend des voix féminines sur la plupart des quinze pièces. À commencer par celle de la susmentionnée Clara Luciani, ainsi que celles de Lisa Hartmann – aux accents de Brigitte Bardot –, d’Alma Jodorowsky, d’Ariane Gaudeaux, de Jane Peyronaud, de Sabine Happard, de Clara-Louise Mourier, d’Aurélie Magnée, de Klara Kristin, de Jane Peynot et d’Ara Méndez Murillo!
Entre les cuivres néo-orléanais de la première pièce et les synthés très Boards of Canada de la dernière, les sonorités déferlent : hymne punk nouvelle vague dans Foutre le bordel, slam dans Pasadena, hybridation d’Ennio Morricone et de Calexico dans l’instrumentale Lâcher de chevaux, banjo et clavier frénétiques sur fond de voix d’opéra et de réflexion philosophique dans Disconnexion (« Et c’est, euh, par conséquent par l’usage d’artifices que nous arrivons – À nous déconnecter de cette réalité pascalienne qui nous effraie tant »), romantisme hispano dans Le jardin et influences turques dans Va, entre autres.
Comme d’hab, on trouve très peu de mélancolie chez La Femme; Mon ami évoque le suicide d’un proche, sinon c’est généralement réjouissant. Ce qui importe, c’est d’écouter et de réécouter cet album, car en cette période où la musique est plus que jamais vitale, Paradigmes vous revitalisera.