Je suis d’avis que le Québec est démesurément choyé en talents musicaux, en grande partie grâce à ses institutions de qualité, à ses innombrables festivals qui permettent aux artistes de faire progresser leur carrière et à la ferveur unique avec laquelle les Québécois soutiennent ces carrières. En raison de ces circonstances uniques, le Québec a créé une industrie musicale distincte au sein de l’industrie canadienne. C’est particulièrement le cas en ce qui concerne la musique francophone.
Il faut toutefois se rappeler que le Québec n’est pas, et n’a jamais été, le seul contributeur à l’expressiob francophone au Canada. Heureusement, Les Moontunes nous servent un de ces rappels occasionnels en provenance d’Acadie.
Ce septuor canadien est dynamique et lourd qui incorpore des éléments de stoner metal, de prog rock, de soul, de hip hop et de jazz. Armés de deux batteurs, d’une basse, d’une guitare, d’un clavier, de cuivres et de voix, Les Moontunes sont bien équipés pour faire fondre les visages, même à travers des haut-parleurs d’ordinateur portable.
Les paroles du groupe explorent les thèmes du voyage spatial, des mages mythiques et d’autres thèmes proches de H.P. Lovecraft. De plus, certaines chansons de leur discographie contiennent des sections dédiées au rap en français. Si tout cela vous semble maximaliste, c’est parce que ça l’est ! Franchement, la multitude de genres qu’ils sont capables d’intégrer à leur son sans réduire chaque élément à une version pire d’elle-même est impressionnante. C’est exactement ce qu’un groupe de fusion devrait s’efforcer de faire.
Elephant Wizard est le plus récent album du groupe, son deuxième – je ne compte pas l’album live sorti la même année. Les paroles sont entièrement anglophones cette fois-ci, mais en tant que personne familière avec la culture du Nouveau-Brunswick, je peux vous dire que le choix d’utiliser le français ou l’anglais à n’importe quel moment est presque toujours bénin. Passez un après-midi à Moncton si vous ne me croyez pas!
Musicalement, Elephant Wizard nous emmène dans de nombreux endroits. Il y a des nuances de King Crimson et de Pink Floyd dans la pièce titre, avec un saxophone distordu à la 21st Century Schizoid Man et une ligne de basse qui ressemble à Money. Un peu plus robotesque est Enchanted Tusk, où Miguel Dumaine utilise un vocoder pour relayer la beauté de l’ivoire galactique et créer une mélodie qui est principalement un la bémol répété. Des changements de tempo contrastés brisent la chanson avant qu’un solo de guitare de style heavy metal ne vienne déchirer le reste du groupe. Gallop in the Jungle, quant à lui, m’a fait penser à Rattlesnake de King Gizzard, mais en plus métallique.
Il faut dire que la lourdeur de la facture est en grande partie attribuable aux batteurs Marc-André Richard et Martin Daigle. Ils jouent simultanément pour fournir exactement ce dont la musique a besoin sans se gêner l’un l’autre. Daigle est également candidat au doctorat à McGill, mais, à ce qu’il semble, il n’a pas négligé depuis longtemps ses talents de musicien au profit de son développement académique.
En contraste avec les moments plus lourds de l’album, on trouve des morceaux comme Midnight Magic, une sélection instrumentale qui ressemble à une ballade de jazz moderne. Il comporte un solo plus subtil de la trompette de Monica Ouellette. Dorian Sunrise offre également une pause dans la fusion des visages en faveur de quelque chose qui ressemble à une pièce cosmique de Carlos Santana. Il y a d’autres observations que j’aimerais inclure dans cet article et qui devront rester inexprimées pour l’instant, mais en bref, Les Moontunes continuent de fusionner de façon ambitieuse leurs nombreuses influences pour créer un son qui leur est propre. Et surtout, avec une bonne exécution. Je suis curieux de voir quelle direction ils prendront à l’avenir avec tant d’influences musicales, mais je suis sûr que s’ils prennent le temps de planifier leur production, cela ne devrait pas être pire que leurs deux premiers albums. Allez les voir !