Longtemps, la musique new age a eu mauvaise presse. On la qualifiait de muzak d’ascenseur pour hippies en quête d’illumination pseudo-mystique. Pourtant, depuis quelques années, le genre a la cote. En témoigne l’intérêt porté aux rééditions des albums de Iasos, Laraaji et Beverly Glenn-Copeland, ainsi que l’engouement récent pour la musique environnementale japonaise nourri par la publication de la compilation Kankyō Ongaku et d’une collection de disques dédiée au compositeur Hiroshi Yoshimura. On pourrait croire que le percussionniste californien Carlos Niño surfe sur cette vague, mais on aurait tout faux puisque ce dernier prenait le new age au sérieux bien avant ce regain de coolitude que le style connaît maintenant. Depuis plusieurs années, le créateur intègre cette musique à son art, l’amalgamant au jazz, au folk et même au hip-hop.
Comme son nom l’indique, le projet Carlos Niño & Friends met l’accent sur la musique qu’il conçoit en compagnie d’amis proches avec lesquels il a des liens artistiques privilégiés tels le pianiste Jamael Dean, le saxophoniste Aaron Shaw, le guitariste Nate Mercereau ou le multi-instrumentiste Sam Gendel. Ensemble, ces bons camarades créent une musique hybride, synthèse entre les nappes synthétiques du new age, le jazz spirituel de Pharoah Sanders et les constructions rythmiques planantes d’un Madlib ou d’un J Dilla. L’improvisation y tient une place privilégiée. Avec doigtée, Niño superpose tous ces genres et y ajoute des constellations d’effets sonores et de percussions. Au cours de la première moitié de ce nouvel opus, il fait preuve d’une grande maîtrise de l’art du collage. Ensuite, l’atmosphère générale se tranquillise et se rapproche davantage d’un new age plus pur alors que s’invite Laraaji en personne et qu’un bref hommage est rendu à Iasos, un des pères du genre. Finalement, bercée par le saxophone de l’omniprésent Shabaka Hutchings et le piano divin de Jamel Dean, la dernière pièce au programme continue de nous faire atterrir tout en douceur.