1er album en tant que Québécoise de Maryam Tazhdeh, éminente musicienne d’origine iranienne, virtuose du tar, un luth de culture persane ancienne et récemment nommé (sa facture et sa pratique musicale) sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO.
Tazhdeh pratique cet instrument à cordes pincées depuis plus de 30 ans. Elle a étudié avec, entre autres, Hossein Alizadeh, et a enseigné de nombreuses années au Conservatoire ainsi qu’à l’Université de Téhéran. Au fil de sa carrière, elle a remporté de nombreux prix pour son jeu remarquable de l’instrument. Aussi bien dire que pour l’Iran, elle est l’équivalent d’un Stéphane Tétreault ou d’un Charles Richard-Hamelin. C’est maintenant Montréal qui a la grande chance de l’avoir parmi sa grandissante communauté de musiciens et musiciennes exceptionnels venus du monde entier enrichir sa vie musicale.
Hezâr Âvâ est en réalité la sortie de plusieurs prises sonores réalisées en 2017-2018, soit avant l’arrivée de Maryam à Montréal. Ce sont celles de l’ensemble instrumental, constitué de Puyâ Sarâyi au santur, Kâmrân Ya’qubi au tombak, Vafâ Mesbâhi au ney, Sina Jâhânâbâdi au kamânche et Maryam Tazhdeh au tar, basse tar et robâb. D’autres pièces (celles-ci enregistrées en 2022) sont pour Saz-o-avaz (chanteur – Mojtaba Asgari, bien connu en Iran) et instrument soliste accompagnateur (ney ou tar). Toutes les compositions sont de Maryam Tazhdeh, dans le respect des traditions sonores de cette musique millénaire.
Je ne suis pas spécialiste ni ethnomusicologue de la musique persane, mais je l’aime suffisamment et j’en ai assez entendu pour savoir que ce sont ici d’excellentes interprétations. Les rythmes et l’équilibre des voix instrumentales de l’ensemble sont élégants. Les mélodies semblent assez simples pour être bien absorbées par un public occidental peu habitué aux longues et sinueuses lignes du discours musical oriental traditionnel, mais elles se déploient manifestement dans un contexte architectural raffiné que je présume tout à fait à la hauteur de la savante tradition artistique persane. Les compositions pour saz-o-avaz et instrument accompagnateur sont plus élaborées, longues d’une douzaine de minutes en moyenne. Elles nous plongent dans une intimité à la fois artistique et culturelle, mais aussi spirituelle.
Un album de très grande qualité, et un autre exemple de la vitalité inspirante de la scène world montréalaise.