Née de mère sud-coréenne et de père juif américain, Michelle Zauner évolue très clairement dans la culture occidentale. Les éléments de son héritage asiatique sont pour le moins ténus sinon absents, même si le nom de son groupe en est un clin d’oeil humoristique à ses origines partiellement asiatiques. Ce qui n’est un irritant en soi : seul compte le résultat dans nos oreilles. De concert avec le batteur et chanteur Craig Hendrix, la résidante de Philadelphie offre une pop archi-référentielle, mélange sophistiqué de pop middle of the road des années 60 (Nashville et Los Angeles) pour ses fastes arrangements d’anches, cuivres et cordes, pour ses claviers électro-pop et new wave extirpés des années 80, pour les motifs de guitare rappelant les séances de studios californiens à la fin des années 70, pour cette synthèse intégrée de musiques anglo-américaines inscrites dans l’inconscient musical collectif. Voilà une pop de chambre typique de la mouvance des deux dernières décennies. Les accroches mélodiques sont là, les arrangements sont fins, les chansons sont rigoureusement construites, cet art est bel et bien maîtrisé. Les textes peuvent certes élever le tout, Michelle Zauner en écrit des bons, sans que l’on puisse conclure à de la haute littérature chansonnière. Même sur son flanc gauche, et c’est le cas qui nous occupe, la pop consiste essentiellement à intégrer des couleurs orchestrales connues de quiconque, Japanese Breakfast en est un exemple probant. Or, pour distinguer du lot et durer, la rigueur et la connaissance ne suffisent pas, on a beau s’extasier devant maîtrise des outils et matériaux de création mais on ne peut conclure à une œuvre d’exception si on ne peut en identifier un angle d’attaque absolument unique. Aussi savoureux soit-il d’entrée de jeu, le petit déjeuner japonais peut, en ce sens, nous laisser sur notre appétit.
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