« Ça me donne envie d’acheter un DX7 », voilà ce qui m’a traversé l’esprit lorsque j’ai écouté pour la première fois le premier EP de Home Front, Think of the Lie, à la fin de l’année 2021. J’ai en effet fini par m’acheter un synthétiseur quelques mois plus tard. Une coïncidence ? Peut-être. Le groupe d’Edmonton (Canada), qui se définit lui-même comme « bootgaze », est revenu ce mois-ci avec son premier album complet, Games of Power, sur le label londonien (UK) La Vida Es Un Mus Discos.
L’album démarre fort avec le single « Faded State », suivi de « Real Eyes », un morceau de synthé punk, puis de « Nation », un titre électro-oi ! très énergique avec Cal, membre du groupe anglais de street punk/oi ! The Chisel. À ce stade, je ne peux m’empêcher d’être impressionné par la coproduction impeccable de Nik Kozub et Jonah Falco (Fucked Up, Career Suicide). Les fans de disques comme Listen de A Flock of Seagulls ou Architecture & Morality d’Orchestral Manoeuvres in the Dark apprécieront le triptyque de milieu d’album composé des chansons « Overtime », « Contact » et « Crisis ». C’est comme si vous étiez mort et que vous étiez allé au paradis de la new wave. Les deux autres chansons qui m’ont le plus marqué sont le funk morose de la chanson-titre chargée politiquement et la chanson « Born Killer », fortement inspirée par Suicide/Alan Vega.
Les séquences de synthé glaciales à plusieurs niveaux, l’utilisation de boîtes à rythmes intelligemment programmées (ainsi que de percussions analogiques), les riffs de guitare punk ultra accrocheurs, les voix tendres mais très hymniques, ce groupe a tout pour plaire, ou presque – la seule chose qui manque : que ses membres arborent des coiffures new wave des années 80 outrancières. Leur capacité à combiner des genres tels que le oi ! et le post punk avec de la synthpop et de la pop punk est ce qui les rend uniques à notre époque. Comme dans un univers parallèle où New Order jouerait sur le Warped Tour, ou les Blitz de l’ère Second Empire Justice porteraient des costumes en similicuir assortis. Les gars de Home Front pourraient vendre de la laque aux skinheads.
Games of Power est un album à la hauteur de sa propre ambition. Il est fluide et joliment homogène, il a une profondeur émotionnelle et surtout, il vous tient en haleine. Sans aucun doute un album pour les années à venir.