Faye Webster est une autrice-compositrice-interprète d’Atlanta qui fait de la musique mielleuse à la touche country, qui chante sa vie en nous la chuchotant à l’oreille, et qui, à 26 ans, vient de sortir son cinquième album.
J’ai découvert cette artiste de la même manière que plusieurs, il y a quelques années, par sa chanson « Kingston ». Tout de suite charmante par la chaleur de ses instruments, et par son refrain saccadé. L’album dont la chanson est issue a généralement le même effet, très réussi.
Ce que Webster fait aujourd’hui, sur Underdressed at the Symphony, se démarque par l’attention au détail, à l’atmosphère et au feeling. On peut dire que l’album nous met dans un état de détente, et qu’il nous y maintient pour toute sa durée. Pas le genre de détente qui nous endort, par contre. Plutôt celui qui nous donne envie de ne rien faire d’autre qu’écouter, tard dans la nuit, loin du soleil. C’est un sentiment que la chanteuse exprime aussi par ses paroles, qui dénotent un sentiment d’inadéquation face au poids des responsabilités de la vie adulte. Elle dit sur la page Bandcamp de l’album que son titre vient du fait que, dans cette période de sa vie, elle achetait souvent des billets de concert d’orchestre symphonique à la dernière minute. L’anonymat d’être fondue dans la foule dans ce monde à part était attrayant, même si elle n’était pas habillée pour l’occasion.
Si elle n’est pas anonyme sur ses albums comme elle l’est à ces concerts, sa voix se réduit presque toujours à un chuchotement. C’est intime et enchanteur, surtout lorsqu’elle assemble des harmonies angulaires. Le chef-d’œuvre de l’album, à mon avis, est « Lifetime ». L’image d’une plume bercée par la brise devant un crépuscule me vient. La chanson présente les meilleurs côtés de l’album: piano étincelant, ambiance veloutée, voix aiguë et languissante, groove lent, cordes et cuirs en dose mesurée. Aussi, juste assez de bizarrerie dans les accords, dans les paroles. Ajoutons à cela que tous les enregistrements sont des (premières ou deuxièmes) prises studio live, et nous avons là l’obligation de remarquer ce talent déployé. On s’imagine parfaitement Webster et ses musiciens en train de jouer dans une pièce enfumée.
S’il y a un hic à l’album, c’est « Lego ring » avec Lil Yachty, que je ne trouve pas tout à fait à sa place, mais qui n’est aucunement un affront. La collaboration ne sort pas de nulle part, cependant, compte tenu que Webster et Yachty sont des amis de longue date.
En somme, Underdressed at the Symphony est peut-être né d’inconfort, mais son effet est contraire. L’artiste a trouvé le genre d’honnêteté qui tue la honte, et la légèreté de savoir que les choses passent. Elle a eu la grâce d’en faire des chansons à nous faire fondre dans notre sofa.