Après un A Umbra Omega complètement déjanté et tordu, Dødheimsgard sort de l’ombre avec un album d’une mélancolie inédite. Cela fait maintenant quatre albums que le mouton noir du black métal norvégien lance à exactement huit années d’intervalle, dans une séquence calendaire quasi prophétique!
Les années nous font oublier la subversion dont Vicotnik et ses collègues sont capables. Alors qu’on aurait pu s’attendre à un assaut de riffs dissonants et de blast beats vertigineux, on a plutôt affaire dès les premières notes à des passages mélodiques beaucoup plus traditionnels pour le genre. Plus tard, l’album se livre toutefois à un exercice stylistique hautement décomplexé, passant du funk des années 1980 au doom metal. Les synthétiseurs sont utilisés à profusion, tout comme la voix claire de Vicotnik. Ce dernier n’aura jamais autant chanté dans un album de Dødheimsgard, prenant le relais d’Aldrahn qui nous avait habitués à une folie incontrôlable sur l’opus précédent.
Structurellement, les différents moments des pièces semblent être davantage le résultat de juxtapositions que de savoureuses transitions. C’est du moins la première impression qu’on aura de Tankespinnerens smerte dans laquelle une montée en intensité culmine vers un changement abrupt de matériau musical et d’atmosphère. Maladresse ou génie? Bien que ce moment laisse perplexe d’emblée, une écoute plus approfondie révèle que les éléments harmoniques de cette queue de poisson reviennent avec élégance lors de la finale. C’est dans une décontenance similaire que l’auditeur est plongé tout au long de Black Medium Current.
Chose certaine, l’album justifie amplement sa longueur (70 min). Les compositions sont sculptées dans leurs moindres détails et l’expérimentation est bien présente dans le mixage créatif et la superposition des couches sonores. Moins extrême que par le passé, Dødheimsgard continue néanmoins à déjouer les attentes et à élargir l’étendue de sa vision unique.