J’ai la conviction qu’un one-man band ne peut réellement exceller sans une certaine intransigeance artistique, celle qui ne laisse aucune place à la contribution des autres. Une conversation récente avec le créateur de Convulsing, Brendan Sloan, m’a effectivement confirmé que le projet résultait d’un désir de réaliser sa vision sans compromis. À travers l’esthétique désormais bien connue du death metal dissonant, Perdurance laisse entendre des compositions ambitieuses, méticuleusement construites et surprenamment sensibles.
Entièrement composé, interprété et produit par Sloan, ce troisième album de Convulsing est bâti selon des techniques et codes familiers : accords dissonants, riffs oppressants et angulaires, chromatisme, structures vertigineuses et percussion incoercible. Ce qui démarque pourtant Perdurance des autres albums du genre, c’est son sens narratif ainsi que la palette émotive qui est utilisée pour peindre cette déchéance délirante. Effectivement, les pièces denses qui composent l’album sont tissées selon une maîtrise remarquable de la tension et du relâchement, avec des progressions sinueuses qui passent aisément de la disharmonie la plus anxiogène aux mélodies transpirant de mélancolie.
Les réflexes guitaristiques de Sloan ont beau être musclés, à la saveur d’un Morbid Angel, la musique de Convulsing laisse pourtant beaucoup de jeu à la vulnérabilité. Cet élément est particulièrement notoire dans la voix, qui s’écarte fréquemment de son registre grave et rugissant pour laisser percer des cris de désespoir. À quelques reprises, des imperfections et cassures vocales sont conservées afin de préserver l’humanité derrière le chant monstrueux. La fin de “flayed” est particulièrement poignante à cet égard, alors qu’on peut entendre Sloan reprendre son souffle dans le silence, après un assaut sonore dense et brutal de cinq minutes.
En somme, Perdurance place Convulsing au sommet de son art, le langage du death metal le plus lugubre étant habilement filtré à travers les techniques et méthodes de la musique progressive. C’est toutefois la cohésion des idées et la performance chargée d’émotion qui rendent cet album mémorable.