J’ai découvert clipping., groupe hip-hop expérimental constitué de l’acteur Daveed Diggs, du producteur William Hudson et de Jonathan Snipes, en pleine pandémie, avec l’album Visions of Bodies Being Burned. Leurs rythmes horrifiques, décalés, ambitieu, parfois super trippants, et les rimes ultra-rapides de Diggs, tout ça m’a semblé rafraîchissant et dangereux, non sans rappeler Open Mike Eagle. Et ça produit la secousse nécessaire pour me faire revenir au hip-hop. Je me suis promis de découvrir le reste de la discographie de clipping. et j’ai écouté le premier album homonyme. J’ai tout de suite été séduit par cette ambiance très exploratoire du hip-hop, qui me semblait très nouvelle. Mais la vie s’en est mêlée et je n’ai jamais vraiment revisité clipping. Ce n’est pas faute d’avoir essayé non plus…
Alors quand j’ai entendu parler de Dead Channel Sky, ce nouvel album conceptuel de science-fiction de Clipping. J’étais tout à fait prêt à être ramené dans le trou du lapin. Afro-futurisme, cyberpunk et rap conceptuel/expérimental ? Je suis partant. Le premier morceau que j’ai écouté était Change the Channel, qui ressemblait à un hommage musical à Breathe de The Prodigy, mais qui offrait un son plus rave punk/techno pour clipping. Le reste de l’album continue sur cette lancée, plongeant dans les thèmes dystopiques avec le talent de conteur de Diggs, qu’il a sans aucun doute appris au cours de sa carrière d’acteur. C’est ce qui ressort de titres comme Dominator ou Keep Pushing.
Mais dans l’ensemble, cet album manque quelque peu de connexion ou de concept, et il est volumineux avec ses 20 chansons. Bien qu’elles proposent des notions futuristes intéressantes, les chansons sont plutôt superficielles, ne les approfondissant pas vraiment et ne les frappant pas aussi fort qu’elles le peuvent. Par exemple, Code, certainement influencée par Neuromancer de William Gibson, ce livre ayant donné naissance au genre cyberpunk, avec ses rythmes, son travail de synthétiseur et ses cordes, ne fait qu’effleurer la surface. Et la voix de Diggs, qui est davantage celle d’un auteur-compositeur-interprète, met de côté toutes les conventions du hard hip-hop.
Néanmoins, nous avons Dodger, probablement le morceau le plus fort de l’album, qui parle des gens qui essaient d’échapper à l’autoritarisme avec des rimes très rapides et des breakbeats techno qui grafignent. C’est redoutablement accrocheur – ce à quoi on s’attend d’un morceau de clipping – et la conclusion est magnifique, avec des cordes synthétiques autour desquelles Diggs montre à quelle vitesse il peut rapper. Polaroids est également très agréable, ressemble davantage à une séance de poésie parlée ou à un livre audio qu’à un morceau de rap. Diggs a certainement une façon de faire!
Mais… en toute honnêteté, peu de ces morceaux m’ont donné l’envie de réécouter. Malgré l’ambition évidente de cet album, clipping. a déjà fait mieux, j’en attendais un peu plus.