Bogdan Gumenyuk est un saxophoniste montréalais que l’on connaît encore trop peu. D’origine ukrainienne, il est boursier Fulbright, gradué de l’école des arts de Philadelphie et gagnant de plusieurs concours. Basé à Montréal depuis quelques années, il a fondé et dirige à partir d’ici un label ukrainien, LabelWhoAble, qui soutient plusieurs artistes du pays.
Découvrez le label LabelWhoAble
Gumenyuk vient de sortir un single, La Terre en soi, une pièce écrite pour et avec la collaboration de l’autrice québécoise Michèle Houle, qui a écrit le texte et en fait la narration. La démarche expressive est bellement mise en musique par un ensemble suggestif d’influences de jazz moderne est-européen et nordique. La narration aurait eu avantage à être réalisée par une actrice professionnelle afin d’en faire résonner le plein potentiel dramatique.
Gumenyuk sera en format quartette à l’OFF Jazz le 12 octobre pour présenter un concert de compos et d’airs ukrainiens avec son saxophone et des instruments traditionnels ukrainiens.
Pendant qu’on y est, ça m’a donné envie de vous parler de son album complet précédent, Love Letters to the Other Side, un manifeste anti-haine dans le contexte de la guerre russo-ukrainienne. L’album est sorti l’an dernier, mais puisque vous n’en avez peut-être pas entendu parler, je rectifie le tir avec joie.
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Love Letters… est un excellent jazz bien planté dans la tradition du hard bop (exception faite de la plage no 9, éponyme, qui ose un jazz-rock en trois temps), avec solos impeccables, rythmiques soutenues et accords scintillants de cuivres. Des mélodies franches habillées dans des harmonies resserrées mais tendant vers la luminosité, servent d’ancrage auditif pour le profane. Le connaisseur appréciera, de sont côté, le superbe et fructueux dialogue qui se manifeste entre Gumenyuk et ses partenaires, la crème du montréalisme jazz : Jacques Kuba Seguin, Lex French et Artem Kovalchuk qui s’échangent les apparitions à la trompette, Joshua Rager au piano, Steve Raegele à la guitare, Adrian Vedady à la contrebasse et Jim Doxas à la batterie. Fort. Très fort!
Quelques balades bien balancées viennent équilibrer un album de très haute facture technique et d’un très beau classicisme stylistique qui nous ramène un peu dans les terres fertiles des Messengers, version Montréal 2023, terre d’accueil pour musiciens exilés du monde entier.